La CJUE vient de juger qu'une réglementation nationale ne peut pas limiter la possibilité d'exclure une offre à la procédure de passation de marché en raison de l'existence d'indices sérieux de comportements susceptibles de fausser les règles de concurrence. Dans sa chronique, Olivier Didriche, directeur de la Mission des affaires juridiques de la ville de Reims, revient sur la portée pratique de cette décision.
La CJUE était saisie, par la Cour administrative suprême du Portugal, d’une question préjudicielle portant sur l’interprétation de l’article 57, § 4, premier alinéa, sous d) de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics. Cette demande était présentée dans le cadre d’un litige opposant une société à un pouvoir adjudicateur portugais (ayant le statut d’entreprise publique), intervenant dans le secteur des transports, au sujet de la décision de ce dernier d’attribuer un marché public de fournitures à une autre société.
Plus précisément, la requérante avait introduit devant un tribunal administratif et fiscal portugais un recours tendant à l’annulation de la décision du pouvoir adjudicateur, en date du 25 juillet 2019, consistant à attribuer à l’autre société un marché pour l’achat de chevilles et de traverses en bois de pin traitées à la créosote destinées au secteur des infrastructures ferroviaires. Son recours a été rejeté et la société a interjeté appel devant le tribunal administratif central du nord qui, par un arrêt du 29 mai 2020, a annulé le jugement, fait droit à la demande et condamné le pouvoir adjudicateur à attribuer le marché à la requérante. Toutefois, la Cour administrative suprême a ensuite été saisie du dossier.
Elle relève que, le 12 juin 2019, l’attributaire originel a été condamné par l’autorité de la concurrence au paiement d’une amende pour violation du droit de la concurrence dans le cadre de procédures de passation de marchés publics, organisées en 2014 et en 2015 et portant sur la fourniture de services d’entretien des appareils et des voies faisant partie du réseau ferré national, infrastructures dont la gestion était assurée par une entreprise publique qui avait entre-temps fusionné avec le pouvoir adjudicateur concerné par la présente instance.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
La juridiction portugaise indique, à cet égard, que l’exclusion d’un soumissionnaire pour défaut de fiabilité en raison d’une violation du droit de la concurrence, commise en dehors d’une procédure de passation d’un marché public, ne serait admise, selon le droit national, que par l’effet d’une condamnation expresse prononcée par l’autorité de la concurrence, infligeant à ce soumissionnaire une sanction accessoire d’interdiction de participation à des procédures de passation de marchés publics pendant une certaine période. Or, selon la juridiction de renvoi, cette solution serait toutefois contraire à la directive 2014/24/UE et, en particulier, à son article 57, § 4, premier alinéa, sous d), en ce qu’elle porte atteinte à l’autonomie du pouvoir adjudicateur pour se prononcer sur la fiabilité de tout soumissionnaire.
Pour rappel, la disposition en question précise que « les pouvoirs adjudicateurs peuvent exclure ou être obligés par les États membres à exclure tout opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché dans l’un des cas suivants : [...] d) le pouvoir adjudicateur dispose d’éléments suffisamment plausibles pour conclure que l’opérateur économique a conclu des accords avec d’autres opérateurs économiques en vue de fausser la concurrence ».
Le dossier soulevant, de manière plus générale, plusieurs interrogations relatives notamment à l’interprétation de cet article, la juridiction suprême portugaise décida de surseoir à statuer et de poser plusieurs questions préjudicielles à la CJUE.
En réponse, la Cour dit pour droit que l’article 57, § 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24/UE, s’oppose à une réglementation nationale qui limite la possibilité d’exclure une offre d’un soumissionnaire en raison de l’existence d’indices sérieux de comportements de ce dernier susceptibles de fausser les règles de concurrence à la procédure de passation d’un marché public dans le cadre de laquelle ce type de comportements est intervenu.
Elle ajoute, par ailleurs, que ledit article s’oppose à une réglementation nationale qui confie à la seule autorité nationale de la concurrence le pouvoir de décider de l’exclusion d’opérateurs économiques des procédures de passation de marchés publics en raison d’une infraction aux règles de concurrence.
Enfin, elle précise que la décision du pouvoir adjudicateur sur la fiabilité d’un opérateur économique, adoptée en application du motif d’exclusion prévu par cette disposition, doit être motivée.
Cette décision tend donc à donner une portée large au motif d’exclusion prévu par l’article 57, § 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24/UE, et « condamne » les réglementations nationales ayant pour objet et/ou pour effet de limiter son champ d’application.
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