Modernisation et simplification des règles de publicité foncière

14.06.2021

Immobilier

Le projet de loi dit "4D" prévoit d’habiliter le gouvernement à réformer le droit de la publicité foncière par voie d’ordonnance afin de le rendre plus accessible et d’en renforcer l’efficacité.

Initié par Emmanuel Macron en 2019, le Grand débat national, dont l’un des thèmes portait sur « l’organisation de l’État et des services publics », avait laissé entrevoir une importante fracture territoriale en France. À son issu, le président de la République avait annoncé la nécessité d’adopter un nouveau texte de décentralisation afin de répondre aux besoins de proximité et d’efficacité exprimés par les Français. Le projet de loi dit « 4D » pour décomplexification, différenciation, décentralisation et déconcentration, vise à répondre à ce besoin. Présenté en Conseil des ministres le 12 mai 2021 par Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion territoriale et des relations avec les collectivités territoriales, le projet sera débattu au Sénat au début du mois de juillet avant d’être examiné par l’Assemblée nationale.

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La gestion immobilière regroupe un ensemble de concepts juridiques et financiers appliqués aux immeubles (au sens juridique du terme). La gestion immobilière se rapproche de la gestion d’entreprise dans la mesure où les investissements réalisés vont générer des revenus, différents lois et règlements issus de domaines variés du droit venant s’appliquer selon les opérations envisagées.

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Dans son Titre VII consacré à la simplification de l’action publique locale, le projet de loi entend moderniser le droit de la publicité foncière. Après avoir constaté des difficultés liées à l’accessibilité de ce droit, le gouvernement a fait le choix d’apporter des modifications au code civil.

Un constat d’accessibilité difficile au droit de la publicité foncière…

Rouage essentiel de la sécurisation des transactions immobilières, le droit de la publicité foncière est régi par le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ainsi que par des dispositions qui se trouvent dans différents textes. Il en découle une lisibilité réduite des règles applicables, notamment en matière d’opposabilité des transactions immobilières aux tiers. Fort de ces constatations, le gouvernement avait organisé, dès 2017, un groupe de travail pluridisciplinaire chargé d’élaborer un avant-projet de texte modernisant le régime de la publicité foncière. Ce travail, avait abouti à la rédaction d’un rapport « Pour une modernisation de la publicité foncière », présenté au ministre de la justice le 12 novembre 2018. C’est sur ces travaux que s’appuie la réforme envisagée aujourd’hui. Trois constats ont guidé ses objectifs :

  • le décret de 1955 est d’une trop grande technicité ;

  • les différents textes se rapportant à la matière ne respectent pas la hiérarchie des normes ;

  • les délais de publication au fichier immobilier au sein des services de publicité foncière ont connu un allongement trop important depuis 10 ans.

Pour pallier ces difficultés, le projet de loi n’entend pas remettre en cause les principes de la publicité foncière. La réforme s’inscrit dans une démarche de rationalisation. Le choix a été fait d’uniformiser et de simplifier le régime actuel afin de le rendre plus accessible et ainsi gagner en efficacité. Il s’agit donc de regrouper les règles existantes dans un corpus unique et simplifié : le code civil.

…rendant nécessaire une réforme du code civil

Le projet de loi distingue deux types de mesures, selon qu’elles portent sur la forme ou sur le fond.

Sur la forme du régime de publicité foncière, il est envisagé, au sein du Livre II du code civil, de diviser le Titre V, intitulé « De la publicité foncière », en 3 chapitres. Ce Titre du Livre II relatif à l’acquisition de la propriété ne contient actuellement qu’un unique article 710-1 affirmant la nécessité pour un acte de revêtir la forme authentique pour pouvoir donner lieu aux formalités de publicité foncière. Il est désormais prévu le découpage suivant :

  • actes soumis aux formalités de publicité foncière et conséquences de leur accomplissement ;

  • exécution des formalités de publicité foncière ;

  • fonctionnement de la publicité foncière.

De plus, le Titre II du Livre IV relatif aux sûretés réelles serait également modifié afin de mettre en cohérence les nouvelles règles et d’énoncer clairement les principes d’inscription de ce type de sûretés.

Parallèlement à ces mesures portant sur la forme du droit de la publicité foncière, le gouvernement a également prévu quelques réformes sur le fond dans le but de gagner en efficacité. Ainsi, il est envisagé de :

  • recentrer la liste des actes soumis à publication sur ceux susceptibles de créer un conflit de droits réels ou de nature à en affecter le contenu ;

  • renforcer le principe de « l’effet relatif » afin d’éviter la formation de plusieurs chaînes de propriété. La solution jurisprudentielle de l’arrêt « Hédreul » du 12 juin 1996 serait ainsi étendue à toutes les publications. Le service de publicité foncière devra donc vérifier la publication du titre antérieur, mais également que ce titre n’a pas perdu son effet juridique ;

  • supprimer la règle de bonne foi dans les conflits entre acquéreurs successifs d’un même immeuble. Instaurée par la réforme des contrats de 2016, cette règle aboutit à créer un double système d’opposabilité fondé sur l’ordre des publications et sur la connaissance effective des publiants. Cette dualité nuit à la sécurité juridique recherchée ;

  • simplifier les règles de refus de dépôt et rejets de formalité afin d’en diminuer la liste des causes.

À terme, cette réforme a pour but de sécuriser davantage les transactions immobilières et de réduire le délai de traitement des publications. Par ailleurs, l’étude d’impact menée ajoute que l’atteinte de ces deux objectifs serait de nature à améliorer le rang de la France dans certains classements internationaux tels que le « Doing Business » de la Banque Mondiale, mesurant le coût de l’activité économique d’un pays, et donc son attractivité.

Afin de tenir comptes des diverses contraintes précédemment énoncées, et dans l’optique de faire aboutir le processus de modernisation du droit de la publicité foncière dans de brefs délais, le projet de loi entend habiliter le gouvernement à mener la réforme par voie d’ordonnance, dans les 18 mois suivant la publication de la présente loi. Un projet de loi de ratification devra ensuite être déposé devant le Parlement dans un délai de 3 mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Sarah BERTONE, Dictionnaire Permanent Transactions immobilières
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