Nécessité des manoeuvres frauduleuses dans une escroquerie à l'assurance maladie
14.10.2022
Gestion d'entreprise

Commet le délit d’escroquerie une infirmière libérale qui ne se contente pas d’envoyer à la CPAM des demandes portant sur des prestations fictives ou surfacturées mais emploie des manœuvres frauduleuses constituées notamment par l’utilisation de prescriptions médicales frauduleuses.
Une infirmière libérale, par ailleurs dirigeante d’une société de fourniture de matériel médical, est condamnée par une cour d’appel pour escroquerie. Les juges relèvent ainsi que l’intéressée, en sa qualité d’infirmière libérale, « n’a pas contesté des problèmes de surfacturation mais a estimé qu’il s’agissait d’erreurs sans caractère intentionnel dues à sa méconnaissance de la nomenclature générale des actes professionnels, que pourtant il ressort de l’enquête que, depuis 2003, elle s’était vu notifier plusieurs créances à la suite de facturations remises en cause, qu'à la suite d’une nouvelle plainte pour facturation de soins non réalisés et majorations de nuit injustifiées, elle a fait l’objet d’un nouveau contrôle qui mettait en évidence pour quinze assurés des facturations frauduleuses, notamment concernant la nutrition parentérale et l’hospitalisation de patients et des remplacements non conformes, et enfin que l’enquête précise effectuée par la CPAM démontre, par l’ampleur des agissements, facturations et remplacements, un comportement délibéré pour obtenir des remboursements indus, la prévenue ne pouvant arguer de sa bonne foi ». Les juges ajoutent que l’intéressée a mis en place un système de facturation d’actes infirmiers non réalisés, de surfacturation de soins et d’utilisation de prescriptions médicales de complaisance ou fausses. Par ailleurs pour entrer en voie de condamnation toujours du chef d’escroquerie cette fois en sa qualité de dirigeante sociale, l’arrêt attaqué constate que l’intéressée a été gérante de la société A dès sa création, cette société reprenant l’activité de la société B clôturée par défaut de concours des banques après l’enquête diligentée par Tracfin. Les juges observent qu’il est établi que ces sociétés ont facturé des prescriptions de matériel et de soins à partir d’ordonnances de médecins préétablies portant mention des sociétés prestataires avec des signatures scannées ou fausses et que l’explosion de facturation par la société B, comme en témoigne le rapport de Tracfin, a été constatée par la CPAM. Ils précisent que « le stock de médicaments saisi et de matériel repris chez les patients et saisi à la société A témoigne de cette surfacturation effectuée au profit des sociétés, que sur un panel de dix assurés, il a été relevé des surfacturations de matériel destiné à la perfusion, de consommables et accessoires, ou de forfaits liés à la nutrition parentérale ou encore de facturation alors que les patients étaient hospitalisés, étant relevé qu’un taux exorbitant d’anomalies de facturation de 78,5 % a été établi pour un préjudice évalué par la CPAM à 1 655 646,71 euros et l’explication selon laquelle les patients en fin de vie nécessitaient un matériel et des soins particuliers ne peut suffire à expliquer ce chiffre exorbitant qui bénéficie à des sociétés dont les dirigeants avaient des salaires très élevés, le « trop facturé » étant au surplus repris pour le réintroduire dans le stock ou le revendre au marché noir » .
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Pour la chambre criminelle de la Cour de cassation, en se déterminant ainsi, la cour d’appel, qui ne s’est pas bornée à retenir que la prévenue avait adressé à la CPAM des demandes de remboursement portant sur des prestations fictives ou surfacturées, mais a mis en évidence l’emploi de manœuvres frauduleuses constituées notamment de l’utilisation de prescriptions médicales frauduleuses, a justifié sa décision.
Cette analyse est classique et ne peut qu’être approuvée. Les surfacturations et factures fictives ne constituent normalement que des mensonges écrits. Les manœuvres frauduleuses génératrices d’escroquerie impliquent une tromperie plus sophistiquée, avec recours à des faux ou à l’intervention de tierces personnes réelles ou supposées. La présente espèce en est une illustration patente, l’infirmière-dirigeante de sociétés ayant organisé avec son conjoint – dirigeant des mêmes sociétés et également condamné pour escroquerie – un système très élaboré pour piller l’assurance maladie à hauteur de plus de 2 millions d’euros, soit 1 646 655,71 euros dus solidairement par les deux époux et 276 619,06 euros et 99 566,03 euros dus par la seule infirmière. Sur ces remboursements l’arrêt de la cour d’appel est cassé au visa de l’article 593 du code de procédure pénale pour ne pas avoir répondu aux conclusions des deux époux contestant la méthode d’évaluation du préjudice de la CPAM, cette cassation étant limitée à l’action civile.
Pour revenir à l’escroquerie il y avait aussi de la part de l’infirmière abus de qualité vraie. Ce moyen frauduleux, négligé ici, peut s’avérer fort utile en présence de simples mensonges écrits non corroborés par des manœuvres frauduleuses. Enfin il est à noter que l’infirmière a été condamnée par la cour d’appel à deux ans d’emprisonnement avec sursis, à une mesure de confiscation et surtout à cinq ans d’interdiction professionnelle ; clémence des juges plutôt regrettable au regard de la gravité des faits puisque cette interdiction aurait pu être définitive (C. pén., art. 313-7, 2°).
Nos engagements
La meilleure actualisation du marché.
Un accompagnement gratuit de qualité.
Un éditeur de référence depuis 1947.
Des moyens de paiement adaptés et sécurisés.