Partage de la valeur dans l'entreprise : ce que prévoit l'ANI du 10 février 2023

08.03.2023

Gestion du personnel

S'inscrivant dans le prolongement de la loi "Pouvoir d'achat" d'août 2022, l'ANI sur le partage de la valeur a été conclu le 10 février dernier et signé, dans la foulée, par la majorité des organisations syndicales représentatives. Comportant quelques mesures normatives et de nombreuses recommandations, il devrait être intégré dans le projet de loi sur le plein emploi présenté au printemps au Parlement.

Fruit d’une négociation, de trois mois, structurée autour d’une feuille de route transmise par le Gouvernement, l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023 sur le partage de la valeur devait non seulement faciliter le développement des dispositifs de partage de la valeur (participation, intéressement et actionnariat salarié) mais également faire preuve de créativité à l’endroit des entreprises de moins de 50 salariés. Si l'innovation reste mesurée et certaines recommandations imprécises, cet accord, avant tout politique, a le mérite du consensus. Certaines des idées émises apportent également un peu de souplesse à certains dispositifs.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
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En pratique, cet accord comporte deux dispositions normatives : l’expérimentation d’un nouveau dispositif de partage de la valeur dans les entreprises de 11 à moins de 50 salariés à partir de 2025 et l’obligation de négocier sur le partage des résultats exceptionnels dans les entreprises d’au moins 50 salariés. Mais la majeure partie de son contenu est constituée de recommandations et demandes de modification du cadre législatif et réglementaire des dispositifs actuels.

Si les députés de la majorité présidentielle souhaitent aller plus loin avec la création d’un mécanisme applicable aux entreprises de plus de 5 000 salariés générant des profits exceptionnels ( « superprofits »), le Gouvernement a fait savoir qu’il proposerait « la transcription fidèle et totale de cet accord dans la loi ». L'ANI devrait être intégré dans le projet de loi sur le plein-emploi en préparation pour le printemps.

A noter que l’entrée en vigueur de l'accord, conclu à durée indéterminée (sauf pour les dispositions expérimentales prévues aux article 6 et 7 - voir ci-après), est subordonnée à son extension par le ministère du Travail. Sans cette extension, il sera dépourvu de tout effet normatif.

Généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises de moins de 50 salariés

Deux dispositifs expérimentaux

Pour favoriser le développement des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises de moins de 50 salariés, l’ANI prévoit d’expérimenter deux mesures, l’une normative, l’autre subordonnée à une modification de la loi :

  • mesure subordonnée à une modification législative : permettre aux PME de déroger plus facilement à la formule légale de la participation ;

  • mesure normative : obliger les entreprises d’au moins 11 salariés et de moins 50 salariés à mettre en place un dispositif de partage de la valeur.

Ces deux mesures sont prévues pour une durée expérimentale de 5 ans à compter de la signature de l’ANI. Afin de mesurer leur impact sur la couverture des entreprises de moins de 50 salariés par un dispositif de partage de la valeur existant, un bilan paritaire sera conduit au plus tard six mois avant la fin de cette période.

Remarque : pour faciliter la réalisation de ce bilan, les partenaires sociaux demandent aux services du ministère du Travail de réaliser un suivi annuel des accords dans ces entreprises.

Une participation mise en place à titre volontaire pouvant être moins favorable que la formule légale

Partant du constat que les PME ont des spécificités et des contraintes ne leur permettant pas de recourir facilement au dispositif de participation volontaire, les partenaires sociaux demandent une modification du cadre légal de ce dispositif, plus particulièrement la possibilité de déroger à la formule de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP), dans un sens plus ou moins favorable (ANI, art. 6).

Remarque : aujourd’hui, les accords de participation peuvent prévoir une base de calcul différente de celle prévue à l'article L. 3324-1 du code du travail. Ces accords dérogatoires doivent cependant respecter les principes de la participation (c'est-à-dire prévoir une participation liée aux résultats de l'entreprise) et comporter pour les salariés des avantages au moins équivalents par rapport au calcul de droit commun. Il n’est donc pas possible de déroger à la formule légale de RSP dans un sens moins favorable.

Concrètement, les signataires de l'accord souhaitent que les entreprises de moins de 50 salariés puissent mettre en place :

  • soit le dispositif de participation de branche existant par accord collectif ou décision unilatérale : à cet effet, les partenaires sociaux de chaque branche professionnelle ouvriront, avant le 30 juin 2024, une négociation visant à mettre à disposition des entreprises de moins de 50 salariés un dispositif de participation volontaire dont la formule pourra déroger à la formule légale de la participation, dans un sens inférieur ou supérieur à cette formule ;

  • soit, par accord collectif de travail, une autre formule dérogatoire de participation pouvant donner un résultat inférieur ou supérieur à celui de la formule légale de la participation.

Remarque : aujourd’hui, les entreprises qui ne sont pas légalement tenues d'appliquer un régime de participation aux résultats sont encouragées à s'y soumettre volontairement par des dispositions fiscales et sociales favorables, notamment depuis 2019, par une exemption pérenne de forfait social. Elles peuvent adhérer à l’accord de participation de branche par accord avec le personnel ou via un document unilatéral.

Attention ! Les entreprises déjà couvertes par un accord de participation conclu au niveau de l’entreprise ne pourraient pas mettre en place une formule dérogatoire, sauf à négocier un nouvel accord. Cette restriction évitera vraisemblablement certains effets d’aubaine : les entreprises de moins de 50 salariés pourvues d’un accord de participation volontaire pourraient être tentées de le dénoncer au bénéfice d’un accord de participation de branche moins-disant.

Remarque : force est de constater que la formule légale de la participation, qui n’a pas été adaptée depuis 1967, ne convient plus aux réalités de gestion des entreprises, au poids déterminant des capitaux et à l’évolution quotidienne de la fiscalité française. Pour grand nombre d’experts et de praticiens, la formule de RSP est perçue comme trop complexe, inadaptée et obsolète. En 2004, l’élaboration de formules de participation simplifiées pour les TPE et la substitution du bénéfice comptable au bénéfice fiscal dans la formule légale avait été étudiées par l'exécutif, sans suite. Si elle constitue, à n’en pas douter, un frein pour les entreprises souhaitant mettre en place un accord de participation à titre volontaire (ce que les partenaires sociaux souhaitent lever avec cette mesure), la formule légale de la RSP reste également inadaptée pour certaines entreprises de plus grande taille.

Au moins un dispositif de partage de la valeur dans les entreprises de 11 à moins de 50 salariés

A compter du 1er janvier 2025 (sous réserve de l’extension de l’ANI par le ministère du Travail), les entreprises de 11 à moins de 50 salariés devront se doter d’au moins un dispositif légal de partage de la valeur parmi ceux existants, dès lors qu’elles remplissent les conditions suivantes (ANI, art. 7) :

  • être constituées sous forme de société,

  • réaliser un bénéfice net fiscal positif au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant trois années consécutives : pour vérifier la réalisation de cette condition au 1er janvier 2025, seront prises en compte les années 2022, 2023 et 2024 ;

  • ne pas être couvertes par un dispositif de partage de la valeur au moment où la réalisation de la condition relative au bénéfice net fiscal est remplie : parmi les dispositifs de partage de la valeur mis en place pour échapper à l’obligation, les partenaires sociaux ne mentionnent pas la prime de partage de la valeur (PPV) ; à notre avis, il s’agit d’un oubli de leur part. A défaut, la distribution d’une PPV n’exonérerait pas l’entreprise de mettre en place un dispositif de partage de la valeur.

Ces entreprises auront le choix entre les dispositifs suivants :

  • un régime de participation, étant entendu que le régime de participation volontaire avec formule dérogatoire à la formule légale dans un sens moins favorable leur sera ouvert ;

  • un régime d’intéressement ;

  • la distribution d’une prime de partage de la valeur (PPV) ;

  • l’octroi d’un abondement patronal à un plan d’épargne d’entreprise ou interentreprises (PEE ou PEI) ou à un plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (PEREC).

Remarque : l’ANI précise que l’abondement patronal à un PER peut permettre de remplir cette obligation, sans préciser le type de PER. Il ne peut s’agir que d’un PEREC ou un PERE regroupé puisque la loi ne permet pas qu'un abondement ou des versements unilatéraux de l'entreprise viennent alimenter un plan d’épargne retraite obligatoire (PERO) (cette source d'alimentation est exclusivement réservée au PEREC et au PERE regroupé). Peut-être que le législateur corrigera cet oubli en comptant les versements patronaux à un PERO parmi les possibilités offertes aux entreprises. En outre, si un Perco a été mis en place avant 2020, les entreprises pourront-elles remplir cette nouvelle obligation en abondant ce plan ? Les partenaires ne visent pas ce dispositif qui, certes, ne peut plus être mis en place depuis le 1er octobre 2020 mais qui perdure dans les entreprises qui l’ont mis en place avant cette date. Enfin, l’ANI semble indiquer que les sommes versées dans le cadre de cette obligation ouvrent droit au régime social et fiscal de la participation. A notre avis, il s’agit d’une maladresse rédactionnelle. Le dispositif choisi par l’entreprise pour remplir son obligation suivra certainement son régime social et fiscal de rattachement. En tout état de cause, il n'appartient pas aux partenaires sociaux d’en décider.

Vers un durcissement des règles de déclenchement de l’obligation de mise en place de la participation ?

Depuis le 1er janvier 2020, l'obligation de mettre en place un régime de participation s'applique dès le premier exercice ouvert postérieurement à une période de 5 années civiles consécutives au cours desquelles le seuil de 50 salariés a été atteint ou dépassé. Les entreprises qui viennent à dépasser le seuil de 50 salariés n'ont pas l'obligation de mettre en place immédiatement la participation lorsqu'elles sont déjà dotées d'un accord d'intéressement. La participation ne devient obligatoire dans ces entreprises qu'au troisième exercice clos après le franchissement du seuil d'assujettissement à la participation, si l'accord est appliqué sans discontinuité pendant cette période.

Ces assouplissements ont été mis en œuvre par la loi PACTE du 22 mai 2019.

Pour permettre une généralisation plus rapide du dispositif de participation, les partenaires sociaux ne demandent pas expressément la suppression de ces règles de franchissement favorables aux entreprises à variation d’effectif sensibles (ligne rouge des organisations patronal) mais (ANI, art. 8) :

  • proposent de supprimer la règle reportant l’obligation de participation en présence d’un accord d’intéressement ;

  • demandent aux services du ministère du Travail de réaliser d’ici fin 2024 un bilan de l’impact des dispositions de la loi PACTE sur ce sujet.

Obligation de négocier en cas de résultats exceptionnels dans les entreprises de 50 salariés et plus

Dans les entreprises de 50 salariés et plus dotées d’au moins un délégué syndical et soumises à l’obligation de mettre en place un accord de participation, les négociations obligatoires sur l’intéressement et la participation devront, avant le 30 juin 2024, porter également sur l’insertion d’une clause spécifique dont l’objet est de fixer les modalités de prise en compte de « résultats exceptionnels ». Ces résultats sont ceux au sens de la participation, réalisés en France et présentant un caractère exceptionnel tel que défini par l’employeur (ANI, art. 9).

Remarque : cette obligation est réputée satisfaite dès lors que l’entreprise a mis en place un dispositif de participation prévoyant une formule dérogatoire conduisant à un résultat plus favorable que celui de la formule légale et/ou un accord de participation ou d’intéressement intégrant déjà une clause spécifique de prise en compte des résultats exceptionnels.

Cette prise en compte pourra prendre deux formes :

  • soit le versement automatique d’un supplément de participation ou d’intéressement dont les modalités (formule de calcul, temporalité, bénéficiaires) sont définies par accord ;

  • soit le renvoi à une nouvelle discussion sur le versement d’un dispositif de partage de la valeur (participation, intéressement, PPV, abondement à un PEE ou au PEREC, etc.).

NDLR : cette disposition impose une négociation sur la thématique du partage de résultats exceptionnels, sans obligation de résultat. En outre, la notion de « résultats exceptionnels » étant laissée à l'appréciation de l'employeur, en l'état actuel, ce dispositif risque de ne pas être mis en oeuvre très souvent, à moins que le législateur ne définisse plus précisément ce qu'il convient de qualifier de « résultats exceptionnels de l'entreprise » .

Extension du sytème des avances à la participation

Actuellement, seul l’intéressement peut faire l’objet d’avances. Les partenaires sociaux souhaitent sécuriser cette possibilité et l’étendre à la participation afin de soutenir le pouvoir d’achat des salariés (ANI, art. 12).

Même permis par l’administration, le système des avances (ou d’acomptes) pour l’intéressement est déconseillé. En effet, si séduisant soit-il, le système d’avances peut s'avérer finalement assez compliqué à gérer. 

Premièrement, si l'enveloppe globale de l'intéressement est, à la clôture de l'exercice, inférieure au montant des avances versées en cours d'exercice, il faut récupérer le trop-perçu. Mais si le salarié ne peut ou ne veut pas restituer le trop versé, comment récupérer les sommes avancées puisque l'entreprise ne peut pas considérer que ces sommes sont définitivement acquises ? Par la compensation (C. trav., art. L. 3251-3) ? A notre connaissance, la jurisprudence ne s’est pas encore prononcée sur ce point. 

En outre, lorsque l’avance versée est supérieure à la prime d'intéressement et que celui-ci a été affecté au plan d'épargne entreprise (PEE), les sommes sont bloquées pendant le délai d'indisponibilité (5 ans). Les versements ne peuvent être sortis du plan, mais ils constituent des versements volontaires. A ce titre, ils doivent être inclus dans l'assiette des cotisations sociales et déclarés à l'impôt sur le revenu comme complément de rémunération.

Sécuriser ces avances est donc un prérequis avant toute extension à la participation.

Demande de simplification du forfait social

Les organisations patronales et de nombreux experts militent, depuis fort longtemps, pour l’abrogation du forfait social, considérant que cette contribution patronale freine considérablement le développement de l’épargne salariale et qu’elle sanctionne les entreprises les plus participatives et donc les plus vertueuses.

Remarque : une revendication partiellement entendue par l’exécutif puisque le forfait social est supprimé depuis le 1er janvier 2019 sur l'intéressement dans les entreprises de moins de 250 salariés et, dans les entreprises de moins de 50 salariés, sur la participation et l'abondement de l'employeur.

Une position non partagée par les organisations syndicales.

Remarque : la suppression du forfait social est une ligne rouge pour l'ensemble des organisations syndicales.

Les partenaires sociaux de l’ANI se sont tout de même entendus sur un point : le niveau et la coexistence de plusieurs taux de forfait social sont un frein à l’attractivité et à la lisibilité des dispositifs de partage de la valeur. Une simplification du forfait social serait, selon eux, de nature à inciter la mise en place d’accords d’intéressement ou de participation et à encourager le versement de suppléments de participation ou d’intéressement plus conséquents en faveur de l’épargne et du pouvoir d’achat des salariés (ANI, art. 11).

Recommandations destinées au développement de l'intéressement

Sécuriser les primes plancher d'intéressement

Pour ouvrir droit aux exonérations sociales, un dispositif d'intéressement doit présenter un caractère aléatoire. Les éléments pris en compte dans la formule de calcul doivent assurer le caractère variable et incertain de l'intéressement : le versement des primes d'intéressement ne peut être garanti et leur montant ne peut être déterminé a priori. L'accord d'intéressement ne peut pas prévoir un montant minimum d'intéressement à titre global ou individuellement (Cass. soc., 26 nov. 1998, n° 96-19.367).

En revanche, les sommes peuvent être forfaitaires si le seuil de déclenchement de l'intéressement est aléatoire. En outre, il reste a priori possible, lors de la répartition de l’intéressement en fonction du salaire, d’intégrer à la définition du salaire retenue un plancher et/ou plafond destiné à atténuer la hiérarchie des rémunérations.

Constatant que la mise en œuvre de ces possibilités (et plus particulièrement celle des primes plancher) est diversement appréciée par les contrôleurs Urssaf, les partenaires sociaux réclament la sécurisation juridique de ces pratiques (ANI, art. 13).

Remarque : s'agissant des modalités de répartition de l'intéressement, les organisations signataires de l'ANI attirent également l'attention des pouvoirs publics sur l'intérêt de tenir compte des situations particulières de temps partiel, qu'il soit lié à un congé parental ou à un mi-temps thérapeutique (ANI, art. 14).

Favoriser la RSE en sécurisant les critères

Forte d'une stratégie, d'objectifs et d'une politique RSE (responsabilité sociétale des entreprises), les entreprises sont de plus en plus nombreuses à souhaiter intégrer des critères RSE dans l'intéressement de leurs salariés. L'intéressement permet en effet de donner du sens à l'action, de mobiliser les salariés en rendant très concrets les enjeux de la transition écologique et/ou sociétaux (définition d'objectifs et cibles à atteindre). Dans un accord d'intéressement, les enjeux sociaux (ex. : la réduction des écarts de rémunération femmes/hommes) mais aussi environnementaux (ex. : la gestion des déchets) et sociétaux (ex. : la politique d'achat responsable) peuvent constituer des indicateurs de performance et se décliner en s'adaptant à l'organisation de l'entreprise.

Pour que le dispositif d'intéressement soit efficace et valable, il faut préalablement identifier les enjeux sociétaux et environnementaux majeurs pour l'entreprise et les critères et indicateurs clefs sur lesquels les salariés vont pouvoir influer. Pour chaque indicateur, il est essentiel de construire des objectifs quantifiables, spécifiques à l'entreprise (voire à l'unité de travail) et sur lesquels les salariés ont une responsabilité. Et cette tâche n'est vraiment pas aisée, certains critères pouvant conduire au non-respect du caractère aléatoire de l'intéressement.

Souhaitant encourager ces pratiques en les sécurisant juridiquement, l'ANI propose (ANI, art. 15) :

  • de compléter l'article L. 3314-2 du code du travail pour y préciser que la formule de calcul de l'intéressement peut intégrer un ou plusieurs objectifs sociaux ou environnementaux ;

  • d'imposer aux organismes de contrôle de publier chaque année un guide de leurs modalités de contrôle des accords d'intéressement comportant notamment les éléments permettant d'apprécier le caractère aléatoire des critères de RSE.

Remarque : l'ANI encourage également les entreprises à faire apparaître au moins un critère non financier dans les accords d'intéressement.

Encourager les clauses de revoyure dans les accords

Le législateur a souhaité, avec la « loi Travail » du 8 août 2016, encourager les partenaires sociaux à faire régulièrement le point sur la mise en oeuvre des accords collectifs de travail conclus (notamment ceux à durée indéterminée), et prendre, le cas échéant, la décision de les réviser. Ainsi, l'article L. 2222-5-1 du code du travail issu de la loi susvisée prévoit-il que les conventions et accords collectifs de travail doivent définir leurs conditions de suivi et comporter des clauses de rendez-vous (ou de revoyure).

Remarque : l'absence ou la méconnaissance des conditions de suivi ou des clauses de rendez-vous n'est pas de nature à entraîner la nullité de la convention ou de l'accord.

Cette obligation ne concerne que les accords collectifs de travail de droit commun négociés avec un ou plusieurs délégués syndicaux. Elle ne s'étend pas aux autres modalités de conclusion de l'intéressement (accord conclu avec le CSE, ratification par le personnel, décision unilatérale de l'employeur...). Ces clauses de rendez-vous paraissent toutefois pertinentes lorsque l'intéressement est conclu pour une durée supérieure à un an (rappelons que l'accord d'intéressement peut être conclu pour une durée comprise entre un et cinq ans) car elles permettent de réévaluer périodiquement les objectifs de l'accord et d'envisager les modifications nécessaires.

A cette fin, les clauses de rendez-vous devraient être, selon les organisations signataires de l'accord, obligatoires quelle que soit la modalité de conclusion choisie lorsque le dispositif est mis en place pour une durée supérieure à une année (ANI, art. 16).

Mieux informer sur les procédures simplifiées de dépôt et de contrôle des accords et poursuivre cette simplification

Les partenaires sociaux se félicitent de la simplification du contrôle administratif des accords d'intéressement intervenues ces dernières années et de la création d'un outil de rédaction d'accord d'intéressement pré-validés (pour des détails, voir notre article du 17 février 2023).

Ils estiment qu'il convient de mieux informer les entreprises de ce cadre simplifié et sécurisant, et de poursuivre les travaux de simplification du contrôle administratif, notamment en limitant la possibilité pour l'administration de demander des pièces aux cas strictement justifiés par les dispositions légales (ANI, art. 18).

Remarque : l'ANI promeut également l'intéressement de projet (ANI, art. 17), un dispositif qui a, pour le moment, rencontré peu de succès. L'ANI ouvre la voie à un intéressement de projet qui doit permettre « aux entreprises faisant largement appel à la sous-traitance d’inclure l’ensemble des salariés des entreprises concernées dans leurs dispositifs ». Cette recommandation manque de précisions pour mesurer sa pertinence.

Prévoir un régime spécifique pour le secteur de l'intérim

Estimant les modalités de l'intéressement (et de la participation) peu adaptées au secteur du travail temporaire, les organisations signataires de l'ANI souhaite une intervention législative autorisant les partenaires sociaux de la branche d'aménager les modalités d'attribution de ces dispositifs pour tenir compte de la nature de la relation liant le salarié à son entreprise (ANI, art. 20).

Recommandations relatives à la prime de partage de la valeur (PPV)

 Pour que la prime de partage de la valeur (PPV) « ne se développe pas au détriment des dispositifs d’intéressement et de participation », les partenaires sociaux demandent au législateur et à l’exécutif (ANI, art. 10) :

  • de permettre l’octroi d’au plus deux PPV chaque année dans la limite du plafond (3 000 ou 6 000 €) et du nombre de versement (4 versements trimestriels ) actuels : aujourd’hui, si la prime peut être versée en plusieurs fois, il s'agit de la même prime unique et les critères d'attribution (et, à notre avis, de modulation) ne peuvent être différents pour chaque versement. Mais si l’idée émise par les partenaires sociaux est retenue, l’entreprise pourrait retenir des critères d’attribution et de modulation différents deux fois dans l’année ;

  • de pérenniser le régime social et fiscal actuel pour les entreprises de moins de 50 salariés : pour rappel, les PPV versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés percevant au cours des 12 mois précédant leur versement une rémunération inférieure à 3 Smic sont exonérées d’impôt sur le revenu, de CSG/CRDS, de taxe sur les salaires et de forfait social. Mais à compter du 1er janvier 2024, elles seront imposables et soumises à ces contributions (elles bénéficieront toujours du régime social de faveur) ;

  • de permettre l'affectation de la PPV sur un PEE ou un PERE lorsqu’ils existent (avec possibilité d’abondement patronal et alignement du régime social et fiscal sur celui de l’intéressement) : aujourd’hui, la PPV peut déjà faire l’objet d’un versement volontaire de la part du salarié que l’employeur peut décider d’abonder mais l’idée ici est de faire bénéficier le salarié qui place sa PPV sur un PEE (ou un plan d’épargne retraite) d’une exonération fiscale à compter du 1er janvier 2024 (à cette date, la PPV est imposable en principe).

Recommandations visant à améliorer l’épargne salariale

Un relèvement du plafond de l’abondement unilatéral au plan

L'entreprise peut aujourd'hui effectuer des versements sur le PEE pour l'acquisition d'actions ou de certificats d'investissement émis par elle ou une entreprise incluse dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison de comptes (entreprise liée).

Le montant total de cet abondement ne peut excéder 2 % du montant annuel du plafond de la Sécurité sociale (soit environ 900 euros par mois).

L’ANI préconise « de permettre à l’employeur d’effectuer chaque année un abondement unilatéral déplafonné à hauteur de la PPV » et d’étendre cette possibilité pour l’abondement des PERE (ANI, art. 31).

Remarque : faut-il comprendre que cet abondement unilatéral serait relevé à hauteur des plafonds d’exonération de la PPV (soit 3 000 ou 6 000 euros selon les cas) ou à hauteur du montant de la PPV ? Cette préconisation gagnerait à être précisée.

Trois nouveaux cas de déblocage anticipé

Les partenaires sociaux demandent à l'exécutif d'ouvrir trois nouveaux cas de déblocage anticipé des PEE (ANI, art. 33) :

  • pour les dépenses liées à la rénovation énergétique de la résidence principale ; 

  • pour les dépenses engagées en tant que proche aidant sous réserve de justificatifs (ex. : copie du livret de famille établissant le lien parental, ouverture d'une tutelle du proche, reconnaissance de l'invalidité du proche, prise en charge d'un dépendant dans l'avis d'imposition, présentation d'une facture pour le recours à un tiers) ; 

  • pour l’acquisition d’un véhicule « propre », neuf ou d’occasion.

Obligation de proposer deux fonds socialement responsables

Afin de promouvoir une orientation des fonds de l’épargne salariale vers des supports d’investissement à visée sociale, en faveur de la transition écologique ou de l’économie productive, les signataires de l’ANI demandent l’obligation pour les gestionnaires de fonds dans les PEE et les PER en comptes-titres (PEREC notamment) de proposer au moins deux fonds prenant en compte des critères extra-financiers (ex. : fonds labelisés ISR, GREENFIN, FINANSOL, CIES, France relance) (ANI, art. 32).

Remarque : ces fonds pourraient être nourriciers de fonds appartenant eux-mêmes à ces catégories.

Modification plus aisée des règlements de PEI

Un avenant au règlement du PEI peut être conclu selon les mêmes modalités que le plan. Une dérogation à ce principe est apportée pour les avenants aux plans institués entre plusieurs employeurs pris individuellement et ouverts à l'adhésion d'autres entreprises ayant pour objet d'intégrer des nouvelles dispositions législatives ou réglementaires postérieures au règlement du plan ou, lorsqu'ils portent, en tout ou partie, sur  la nature des sommes pouvant être versées, les possibilités d'affectation des sommes recueillies, en particulier le nombre, l'orientation de gestion et le profil de risque des fonds utilisés, la liste de différents taux et plafonds d'abondement parmi lesquels les entreprises souhaitent effectuer des versements complémentaires à ceux de leurs salariés. Dans ce cas, l'avenant doit faire l'objet d'une information auprès des entreprises prenantes au plan. Cette modification s'applique à la condition que la majorité des entreprises parties prenantes, ne s'y oppose pas dans un délai d'un mois à compter de la date d'envoi de l'information et, pour chaque entreprise, à compter du premier exercice suivant la date d'envoi de l'information. En cas contraire, le plan est fermé à tout nouveau versement (C. trav., art. L. 3333-7, al. 2 et 3).

Les auteurs de l’ANI réclament une simplification de la procédure actuelle de modification des règlements des plans d’épargne interentreprises (PEI), qu’ils jugent trop contraignante et limitant les capacités d’adaptation du plan et la mise en place d’offres orientées vers les investissements responsables et/ou verts. L’accord propose que, lorsque la modification du règlement du PEI ne fait qu’ajouter des possibilités pour les entreprises et leurs salariés, la procédure de révision passe par la conclusion d’un avenant entre les entreprises fondatrices et l’envoi d’une simple information aux entreprises adhérentes (ANI, art. 19). La modification pourrait s’appliquer dès cette information.

Une meilleure gouvernance des FCPE diversifiés

La société de gestion en charge d’un FCPE diversifié, aurait l’obligation, lorsqu’elle exerce le droit de vote pour le compte de l’épargnant salarié, de rendre compte annuellement en conseil de surveillance des fonds de sa politique de vote lors des dernières assemblées générales d’actionnaires. Les signataires estiment que lors d’une réponse à un appel d’offres, la présentation par la société de gestion de sa politique de vote serait une bonne pratique pour instaurer la confiance avec les salariés épargnants (ANI, art. 34).

Remarque : les signataires réclament aussi une information simple et lisible diffusée par l'Etat sur les dispositifs d'épargne salariale, sous la forme d'une campagne nationale d'information (ANI, art. 30).

Mesures visant à faciliter et sécuriser les opérations d’actionnariat salarié

Création d’un « plan de partage de la valorisation de l’entreprise »

L'ANI demande la mise en place d'un nouveau dispositif dit « plan de partage de la valorisation de l'entreprise » adapté aux entreprises de toute taille (ou groupes). 

Mis en place par accord collectif, ce plan devrait bénéficier à l'ensemble des salariés ayant au moins un an d'ancienneté. Ces derniers se verraient attribuer un montant indicatif. A l'issue d'une durée de trois ans, ils percevraient le montant correspondant au pourcentage de valorisation de l'entreprise appliqué à ce montant indicatif. Cette somme pourrait être versée en plusieurs fois.

Le dispositif bénéficierait des avantages sociaux et fiscaux prévus pour l'épargne salariale. Les sommes versées pourraient être affectées à un plan d'épargne salariale et seraient déductibles fiscalement pour l'entreprise. Elles ne devraient pas se substituer au salaire et aux autres dispositifs de partage de la valeur.

Remarque : tel que décrit par les partenaires sociaux, le dispositif ressemble au dispositif anglo-saxon « Phantom shares ». Ce dispositif permet de rémunérer les salariés clés d'une entreprise sans avoir à modifier la structure du capital ou la propriété de l'entreprise. Avec ce dispositif, des actions fictives, non réelles, sont attribuées à des salariés qui bénéficient ainsi des droits économiques correspondant aux titulaires d’actions (bien qu’ils ne soient pas formellement titulaires ou propriétaires de ces actions) mais n’ont aucun droit politique inhérent au statut d’actionnaire.  L’entreprise concernée remet les actions « fantômes »  au salarié à une valeur déterminée, équivalente à la valeur des actions réelles. Après une certaine durée ou une fois qu’une condition déterminée est remplie, elle verse au bénéficiaire le montant de la revalorisation de ces actions fictives (c’est-à-dire la différence entre leur valeur initiale et leur valeur au moment de leur exécution).

Selon les organisations signataires de l'ANI, le dispositif permettrait au salarié d'être très directement intéressé à la valorisation de l'entreprise et pas seulement à ses résultats. 

Elles indiquent également que, dans les entreprises non cotées, la valorisation de l'entreprise peut se faire notamment en fonction d'indicateur de référence (multiples d'EBITDA, par exemple) négociés à la mise en place du plan.

Remarque : la valorisation de ces entreprises n'est pas une mince affaire. Elle peut être faite en fonction des entreprises de même secteur, de leur chiffre d'affaires, de la croissance de leur chiffre d'affaires ; elle peut également intégrer des critères RSE. Mais la complexité de l'opération rebute un grand nombre d'entre elles.

Face à la complexité de ce dispositif, il n'est pas certain que les petites entreprises s'en emparent.

FCPE d'actionnariat salarié à effet de levier : vers une sortie en actions ?

La forme la plus répandue d’actionnariat salarié est l’acquisition d’actions dans le cadre d’un plan d’épargne entreprise (PEE), « en direct » ou via un fonds commun de placement collectif (FCPE). Le FCPE d’actionnariat est un véhicule d’investissement permettant à tous les salariés de l’entreprise de souscrire à une augmentation de capital réservée aux salariés dans des conditions très avantageuses pour l’entreprise et les salariés. Ce FCPE peut être doté d'un « effet de levier ». L'effet de levier est une technique consistant à s'endetter pour augmenter sa capacité d'investissant ; son objectif est d'obtenir à terme l'augmentation de l'épargne salariale affectée à la souscription d'action. Le prêt complémentaire permet de financer une souscription d'actions pour plusieurs fois son montant. Ce financement s'accompagne le plus souvent d'une garantie de capital ou de performance. En contrepartie, le banquier se rémunère en conservant une partie de la plus-value réalisée par l'action, mais supporte l'intégralité du risque en capital. Ainsi, grâce à ce mécanisme, les salariés bénéficient d'une majoration de leur plus-value, leurs gains augmentant plus rapidement que ceux des détenteurs d'actions sans l'avantage du levier. En cas de perte de valeur de l'entreprise, la moins-value de leurs actions est identique à celle de n'importe quel porteur. 

Si ce mécanisme est un vrai atout pour renforcer l'attractivité d'un FPCE d'actionnariat salarié, il présente tout de même un sérieux inconvénient : à l'échéance du fonds, les actions doivent être cédées puisque les sommes dues doivent être versées en numéraires. 

L'ANI met en lumière cette contrainte qui peut limiter l'intérêt de ce mécanisme pour l'entreprise comme pour le salarié (ANI, art. 23). Sans le dire expressément, les organisations signataires de l'accord recommandent-elles de prévoir une sortie en actions ?

Actionnariat salarié : encouragement à mieux garantir le capital investi par le salarié

Investir dans des actions présente évidemment un risque de perte du capital investi. Un risque encore plus important en cas d'actionnariat salarié puisqu'il est couplé avec le risque de perte d'emploi en cas de faillite de l'entreprise.

Des solutions existent toutefois pour limiter l'exposition au risque de perte en capital. Par exemple, l'on peut prévoir une obligation de rachat des actions par l'entreprise sur demande du salarié ou bien encore recourir à un tiers (une banque) se portant garant.

Les organisations signataires de l'accord s'engagent à sensibiliser leurs adhérents sur les possibilités permettant de limiter cette exposition au risque (ANI, art. 23).

Relèvement des plafonds des AGA

Il ne peut pas être attribué d'actions gratuites à un salarié ou un mandataire social détenant plus de 10 % du capital social ou si l'attribution a pour effet de porter sa participation à plus de 10 % du capital social. Cette limite est appréciée à la date de décision d'attribution des actions par le conseil d'administration ou du directoire, en tenant compte des actions détenues en nue-propriété par le bénéficiaire, et des attributions d'actions gratuites précédentes (c'est-à-dire des actions non encore définitivement acquises lors de la nouvelle attribution).

En outre, dans les sociétés dont les titres sont cotés, le volume total des actions attribuées ne peut pas excéder 10 % du capital social de la société attributrice. Ce pourcentage est porté à 30 % lorsque l'attribution d'actions gratuites bénéficie à l'ensemble des membres du personnel salarié de la société.

Dans les sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et qui ne dépassent pas à la clôture d'un exercice social les seuils communautaires définissant les petites et moyennes entreprises, les statuts peuvent prévoir :

  • dans le cas d'une attribution à certaines catégories du personnel salarié uniquement, un pourcentage plus élevé que le plafond de 10 %, mais n'excédant pas 15 % du capital social à la date de la décision d'attribution des actions par le conseil d'administration ou le directoire ;

  • dans le cas d'une attribution bénéficiant à l'ensemble des salariés, un plafond de 30 % du capital social.

L'ANI propose (ANI, art. 24) :

  • d'autoriser le rechargement du plafond individuel de 10 % pour permettre à des salariés et dirigeants qui ont fait le choix d'être des investisseurs de long terme de leur société d'être à nouveau éligible à un plan d'actions gratuites ;

  • de relever le plafond global d'attribution des actions gratuites (AGA) lorsque le plan est proposé à l'ensemble des salariés : ce plafond serait fixé à 40 % (contre 30 % actuellement) ;

  • de relever le plafond global dans le dispositif classique de + 5 %, soit 15 % (ou 20 % dans les sociétés non cotées), voire jusqu'à 30 % en contrepartie d'une condition à 25 % de la masse salariale.

Société de salariés actionnaires facilitée

La création de sociétés de salariés actionnaires réunissant l'ensemble des salariés actionnaires pourrait être facilitée en rendant fiscalement neutre l'apport d'actions par le salarié à cette société, préconise l'ANI. Le salarié ne paierait des impôts qu'au moment de la cession des actions, où il bénéficierait de liquidités. 

L'ANI demande également que le paiement du forfait social exigible au moment de l'acquisition par le salarié soit supprimé car il ne correspond pas à la création de liquidité mais à un transfert de capital entre l'entreprise et son salarié (ANI, art. 27).

Préconisations pour encourager les politiques de rémunération

Rappel de l'attachement au principe de non-substitution des dispositifs de partage de la valeur au salaire

Si l'ANI souligne l'importance du principe de non-substitution au salaire qui est prévu par la loi pour l'épargne salariale et pour la PPV, il préconise toutefois un traitement différencié aux discussions sur le partage de la valeur dans le cadre des négociations obligatoires en entreprise portant sur les salaires, le temps de travail et la partage de la valeur ajoutée (participation, intéressement et épargne salariale) (ANI, art. 1). 

NDLR : cette recommandation pourrait signifier que les auteurs de l'ANI sont favotables à la tenue de négociations clairement séparées sur les salaires d'une part et sur le partage de la valeur ajoutée d'autre part. Pour rappel, en l'absence d'accord d'adaptation, la négociation annuelle obligatoire (NAO) porte sur les salaires effectifs, la durée et l'organisation du temps de travail, les dispositifs d'épargne salariale et le suivi des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, ces thèmes étant bien distingués (C. trav., art. L. 2242-15).

Le principe de non-substitution à un élément de rémunération est bien encadrée par la loi, la réglementation, la jurisprudence et l'administration pour l'intéressement (C. trav., art. L. 3312-4). C'est nettement moins vrai pour la PPV. Le législateur viendra-t-il pallier cette carence ?

Négociations sur les salaires : un appel à une extension plus rapide

L'ANI rappelle les obligations légales concernant l'obligation de négocier périodiquement sur les salaires dans les branches, notamment lorsque le Smic dépasse les salaires minima de branche, et dans les entreprises, ainsi que l'obligation pour les sociétés cotées de publier de manière claire et compréhensible, au sein du rapport sur le gouvernement d'entreprise, un ratio permettant de mesurer les écarts de rémunération entre chaque dirigeant et les salariés de la société (ANI, art. 2).

Remarque : les signataires insistent sur l'intérêt d'adopter une méthode de calcul du ratio qui en facilite la lecture et la compréhension.

Les signataires en appellent à une extension rapide des accords de branche par les pouvoirs publics, notamment des accords relatifs aux salaires.

Remarque : rien d'étonnant à cela lorsque l'on connaît les risques encourus par les branches ne relevant pas rapidement leurs minima en cas de hausse du Smic. Notons toutefois qu'un délai maximal de la procédure d'examen accélérée des avenants salariaux a été imposé par la loi « pouvoir d'achat »  lorsqu'au moins deux revalorisations du Smic sont intervenues dans les 12 derniers mois (pour des informations sur ces points, voir notre article du 20 février 2023).

Négociations sur les classifications : une relance des discussions

L'accord indique que les classifications sont un levier important dans la valorisation des parcours des salariés et de reconnaissance des qualifications, en favorisant une meilleure lisibilité des possibilités d'évolution dans l'entreprise. Il rappelle l'obligation légale pour les organisations liées à une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels, de se réunir au moins une fois tous les 5 ans pour examiner la nécessité de réviser ces classifications, en prenant en compte l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la mixité des emplois.

Les signataires demandent aux partenaires sociaux concernés dans les branches n'ayant pas procédé à cet examen depuis plus de 5 ans d'engager une discussion sur l'opportunité de réviser leur classification avant la fin de l'année 2023 (ANI, art. 3).

Egalité femmes/hommes : des travaux sur la mixité des emplois dans chaque branche

L'accord rappelle les dispositifs légaux permettant de lutter contre ces différences de traitement : négociations obligatoires dans les entreprises (C. trav., art. L. 2242-1 et s.) et dans les branches (C. trav., art. L. 2241-1 et s.), index égalité (C. trav., art. L. 1142-8 et s.), index des écarts de représentation dans les instances dirigeantes et futur quota de femmes dans cette représentation à partir de mars 2026 (C. trav., art. L. 1142-11 et L. 1142-13).

Les branches professionnelles lanceront, en lien avec leurs observatoires prospectifs des métiers et de qualifications de branche ou inter-branches, des travaux sur la mixité de leurs métiers pour favoriser une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans l'ensemble des métiers de leur champ, afin d'accompagner les entreprises du secteur pour mieux prendre en compte ces enjeux (ANI, art. 4).

Enrichissement de la BDESE

Pour répondre à une demande de la CFE-CGC, la BDESE s’enrichit d’informations sur la stratégie fiscale de l’entreprise, notamment la déclaration publique « pays par pays » telle que prévue par la directive (UE) n°2021/2101 du Parlement et du Conseil du 24 novembre 2021 sur la communication d’informations relatives à l’impôt sur les revenus des sociétés, pour certaines entreprises et succursales. Ces informations peuvent être transmises au comité de groupe et au comité d’entreprise européen.

Géraldine ANSTETT
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