Pratiques commerciales déloyales en agriculture : la directive PCD bientôt entièrement transposée
11.01.2021
Gestion d'entreprise

Une ordonnance sera prise dans les 7 prochains mois, notamment pour modifier des délais de paiement et compléter l'arsenal de lutte contre les pratiques commerciales déloyales.
Le législateur prend ses dispositions pour garantir la future transposition des directives européennes, notamment celles intéressant le monde de l’agriculture. Par une loi d’adaptation au droit de l’UE, il habilite en effet le gouvernement à agir par ordonnance pour modifier les régimes actuellement en vigueur sur le territoire national.
La transposition de la directive dite « PCD » du 17 avril 2019 sur les pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire (Dir. (UE) 2019/633 du Parlement européen et du Conseil, 17 avr. 2019) est donc en préparation.
Le gouvernement a 7 mois pour rendre sa copie, soit jusqu’au 5 juillet 2021. Une marge suffisante pour que le nouveau régime entre en vigueur dans les délais prescrits par la directive européenne. Les Etats-membres ne doivent en effet pas dépasser la date limite du 1er novembre 2021 (Dir., art. 13).
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La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Le nouveau dispositif aura vocation à s’appliquer aux relations entre fournisseurs et acheteurs dans la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire. La directive vise en effet à corriger l’asymétrie dans la relation commerciale entre le fournisseur agricole ou alimentaire, en particulier le premier producteur, et son acheteur. Les pratiques commerciales déloyales, liées notamment au déséquilibre de taille et donc de puissance économique entre les parties au contrat, seront mieux encadrées.
La France a un dispositif assez protecteur en la matière. Une partie de la directive y est déjà en vigueur. Ainsi, l’ordonnance du 24 avril 2019 (Ord. n° 2019 359, 24 avr. 2019), prise sur le fondement de la loi EGAlim, a clarifié le droit des relations commerciales en matière de vente de produits agricoles et alimentaires. Depuis le 26 avril 2019, l’article L. 442-1 du code de commerce instaure une responsabilité dans les négociations commerciales fondée sur les notions-clés de la directive : déséquilibre significatif, avantage sans contrepartie et rupture brutale de la relation commerciale établie.
Afin de remédier à ce qu’elle qualifie d’asymétrie des relations contractuelles, l’UE a mis en place un mécanisme de seuil de chiffre d’affaires accompagné d’un barème. Le champ d’application de la directive est ainsi strictement encadré. Il vise par exemple, en bas de l’échelle, les relations entre un fournisseur dont le CA est inférieur à 2 millions d’euros et un acheteur au CA supérieur à ce seuil. Tout en haut du barème, on retrouve la même logique mais avec des seuils respectifs de 50 à 150 millions d’euros pour les fournisseurs et 350 millions d’euros pour les acheteurs (Dir., art. 1er).
Selon les travaux parlementaires, ce dispositif de seuil ne sera pas retenu en droit national. Cet aménagement, autorisé par la directive européenne qui accorde beaucoup de latitude pour la transposition (Dir., art. 9), a été introduit par les sénateurs. Ils ont estimé que le critère produirait un effet de seuil en excluant du régime les entreprises réalisant un chiffre d’affaires de plus de 350 millions d’euros. Le critère du chiffre d’affaires conduit par ailleurs à exclure certaines relations asymétriques telles les centrales d’achat qui ont un pouvoir conséquent alors que leur activité de référencement de produits, sans acte d’achat, produit un chiffre d’affaires assez faible, voire parfois inférieur à celui du fournisseur. Les sénateurs ont en outre relevé que le droit français des pratiques commerciales déloyales s’appliquait aujourd’hui sans condition de chiffre d’affaires.
Bien que l’arsenal juridique français de lutte contre les pratiques déloyales soit déjà conséquent, certaines des dispositions de la directive restent encore à transposer, notamment :
- l’annulation d’une commande de produits périssables à brève échéance (Dir., art. 3, 1, b) ;
- le refus de confirmer par écrit les conditions d’un accord de fourniture de produits lorsque le fournisseur l’a demandé (Dir., art. 3, 1, f) ;
- l’obtention, l’utilisation ou la divulgation illicite des secrets d’affaires du fournisseur (Dir., art. 3, 1, g) ;
- l’obligation de mentionner la quantité prévisionnelle des produits pour lesquels le fournisseur s’engage à accorder au consommateur des avantages promotionnels lorsque le fournisseur supporte tout ou partie des coûts liés aux remises effectuées par l’acheteur (Dir., art. 3 in fine). Un encadrement des ventes promotionnelles a d’ores et déjà été mis en place depuis le 1er janvier 2019. Toutefois la transposition est imparfaite, comme l’a signalé la DGCCRF. La mention de la quantité réservée aux ventes promotionnelles, qui est une formalité impérative dans la directive, ne figure ni dans la première ordonnance (Ord. n° 2018-1128, 12 déc. 2018, art. 3) ni dans la loi ASAP qui l’a abrogé pour réinstaurer un dispositif quasi similaire depuis le 9 décembre. (L. n°2020-1525, 7 déc. 2020, art. 125 : JO, 8 déc.: v. bull. 547 p. 14).
Par ailleurs, dans un souci d’harmonisation des pratiques européennes, plusieurs délais de paiement figurant dans le code de commerce devraient être réduits au profit du fournisseur :
– l’achat de denrées alimentaires non périssables destinées à être exportées en l’état en dehors de l’UE, fixé à 90 jours en droit français (C. com., art. L. 411-12) et à 60 jours par la directive (Dir., art. 3, 1, a) ;
– l’achat de denrées alimentaires périssables en l’absence d’accord d’approvisionnement régulier pour lesquels le délai de 30 jours s’applique fin de décade de livraison en droit français (C. com., art. L. 411-11, II, 4°) et à compter de la date de livraison dans la directive (Dir., art. 3, 1, a) ;
– l’achat de vin devrait en principe être soumis à un délai de 60 jours en tant que produit non périssable (Dir., art. 3, 1, a). Un régime spécial est cependant prévu en France. Pour le vin, mais aussi le moût et le raisin, le délai de principe est de 45 jours fin de mois ou 60 jours après la date d’émission de la facture (C. com., art. L. 411-11, II, 4°). Toutefois, des accords interprofessionnels peuvent déroger à ce délai à la hausse, parfois en pratique jusqu’à la vendange suivante. Or, si ce régime est autorisé par les dispositions européennes pour le moût et le raisin (Dir., art. 3, 1 in fine), il ne l’est pas pour le vin. Le délai de paiement de 60 jours devra donc être mis en place, à moins que la France ne négocie le maintien du régime dérogatoire lors des négociations de la future PAC. L’enjeu est de taille car les trois quarts des interprofessions viticoles ont fait le choix de définir par dérogation des délais de paiement supérieurs
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