Précisions sur la procédure de traitement de sortie de crise des difficultés des entreprises
15.07.2021
Gestion d'entreprise

La mise en œuvre de la procédure de traitement de sortie de crise pose d’une part de nombreuses questions pratiques notamment autour de l’élaboration du plan et d’autre part tout en étant une procédure autonome elle emprunte ou exclut des dispositions du redressement judiciaire.
La nouvelle procédure de sortie de crise a été créée par l’article 13 de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 (JO, 1er juin). Il s’agit une procédure temporaire et rapide destinée aux entreprises qui ne dépassent pas certains seuils et pour leur permettre de rebondir rapidement grâce à une restructuration de leur dette. Bien que sa mise en œuvre soit pour l’heure reportée puisque conditionnée à la publication d’un décret qui devrait intervenir à la fin de l’été, il nous a semblé nécessaire de réfléchir à la portée pratique des seules dispositions légales de cette nouvelle procédure. Nous reproduisons les principales réponses aux questions posées lors d’un webinar qui a eu lieu à son sujet. Nous vous présentons également la synthèse des textes applicables sous la forme d’un tableau présentant l’articulation des dispositions dudit article avec les renvois aux diverses dispositions du Livre VI du code de commerce. Enfin, nous complétons le texte de l’article 13 avec les dispositions du Livre VI précisées par des NDLR pour une lecture plus fluide.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Questions/Réponses
À l’occasion du webinar du 5 juillet 2021 « Création d’une procédure de traitement des difficultés de sortie de crise » animé par le Professeur Philippe Roussel Galle et Maître Philippe Basse, Président du CNAJMJ, l’essentiel des questions a porté sur le plan et le sort des créanciers, voici une synthèse des réponses apportées.
Créanciers
Quelle est l’importance des créanciers dans le choix du plan et le devenir de l’entreprise ?
Les créanciers doivent être consultés sur le plan. Il est nécessaire qu’ils adhèrent. À défaut, le tribunal aura tendance à ne pas accorder de plan.
Le plan concerne-t-il tous les créanciers ?
Oui. Il s’agit d’une procédure collective, donc tous les créanciers sont concernés. Le plan ne peut affecter que les créanciers mentionnés sur la liste des créances établie par le débiteur à partir de ses documents comptables. Ce n’est pas comme dans une procédure de conciliation.
Y compris les cautions personnes physiques ?
Oui elles devraient pouvoir bénéficier du plan.
Plan de continuation
La consultation des créanciers est-elle obligatoire ?
Même si le délai est court, avec une période d’observation de 3 mois maximum, les créanciers doivent être consultés (art. IV, A, élaboration du plan).
Des créanciers peuvent abandonner les créances.
Quid en cas d’oubli d’un créancier sur la liste des créances établie par le débiteur ?
Dans cette nouvelle procédure, il n’y a pas d’intérêt pour le débiteur d’oublier un créancier. La stratégie du fournisseur que l’on paierait à la marge n’a pas d’intérêt car il s’agit d’une procédure qui repose sur la confiance.
Les créances sociales et fiscales sont-elles concernées par le plan ?
Oui, si elles figurent sur la liste (art. 13, IV, B).
Si des créances ne sont pas inscrites sur la liste établie par le débiteur et sur le plan, n’y a-t-il pas rupture d’égalité entre les créanciers ?
La liste établie par le débiteur sera déposée au greffe du tribunal et le mandataire informe chaque créancier (art. 13, II, C). La problématique est la même que dans une procédure classique.-
- Quid du délai de 3 mois pour établir le plan quand on est en période de vacances judiciaires ?
Le décret d’application est attendu pour septembre. La question des vacances judiciaires ne devrait donc pas se poser cet été. Il faudra effectivement que les tribunaux de commerce s’adaptent pour 2022.
S’agissant d’une procédure simplifiée, un commissaire à l’exécution du plan est-il nommé ?
Oui
Mise en œuvre et coût de la procédure
Est-il possible de passer par la conciliation pour préparer cette procédure ?
S’il n’y a pas d’accord trouvé entre les créanciers et le débiteur en conciliation, la procédure de traitement de sortie de crise peut être une possibilité. Mais dans ce cas le caractère confidentiel de la procédure disparaît.
La procédure de traitement de sortie de crise est une procédure adaptée pour restructurer la dette. Elle ne peut cependant concerner que les entreprises qui n’ont pas de problème d’emploi et de salaires.
Est-ce qu’un plan de cession est envisageable ?
Non. Si un plan de cession est adopté, on bascule en procédure classique de redressement judiciaire.
Quelles sont les issues en cas d’échec du plan ?
C’est la résolution du plan
S’il y a cessation des paiements, la procédure sera convertie en liquidation judiciaire. On revient aux principes classiques (art. 13, IV, D).
Quelle est la rémunération prévue pour le mandataire ? Sur quel barème ?
Tout dépendra du mandataire désigné : soit administrateur soit mandataire judiciaire. En tout état de cause, il devrait s’agit d’une procédure peu chère avec un seul barème.
Le décret à venir le précisera. Ce sera sans doute celui des administrateurs judiciaires fixé sur le chiffre d’affaires.
Articulation des textes applicables entre la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 et les renvois au Livre VI du code de commerce
La procédure de sortie de crise s’appliquera aux procédures ouvertes et aux demandes formées avant le 2 juin 2023.
Procédure de sortie de crise | Loi 31 mai 2021- Article 13 | LIVRE VI-Dispositions applicables | LIVRE VI- Dispositions exclues expressément |
Conditions d’ouverture de la procédure | Art. I- A | Art. L. 620-2 | |
Désignation d‘un administrateur ou d’un mandataire judiciaire | Art. I-B, al. 1er | Art. L. 811-2 Art. L. 812-2 Art. L. 621-4 al. 1er, 2, 5, 6, 7 a contrario | Art. L. 624-4, al. 3 et 4 Art. L. 621-4-1 |
Exercice des fonctions du mandataire désigné | Art. I-B, al. 2 | Art. L. 622-1 Art. L. 622-20 | Art. L. 622-1, III : sauf mission d’assistance |
Désignation des contrôleurs | Art. I-C | Art. L. 621-10 | Art. L. 621-10, al. 2 |
Durée de la période d’observation et poursuite de la période d’observation | Art. I-D | ||
Fin de la procédure Saisine du tribunal par le ministère public | Art. I-E Voir aussi Art. I-D et Art. IV-D | ||
Inventaire Contenu et procédure Etablissement par le débiteur | Art. II- A | Art. L. 622-6 Art. L. 622-6-1 | |
Etablissement de la liste des créances Montant de la créance | Art. II-B | Art. L. 622-25, al. 1er et 2 | |
Dépôt de la liste des créances au greffe | Art. II-C | ||
Consultation des créanciers à partir de la liste des créances | Art. II-D Voir aussi Art. II-B | Art. L. 626-10 | |
Redressement judiciaire simplifié | Art. III-A | Titre III Redressement judiciaire | Art. L. 622-13, III et IV Chapitre IV Sauvegarde : Sections 1 patrimoine du débiteur, Section 3 revendications , restitutions Section 4 EIRL Chapitre V Créances du contrat de travail |
Vérification des créances | Art. III-B | Art. L. 624-2 | |
Elaboration du plan Financement des mesures sur l’emploi Fonctions du mandataire | Art. IV-A | Titre II, chapitre VI Plan de sauvegarde | |
Contenu du plan Créances affectées par le plan Montant des annuités | Art. IV-B Voir aussi Art. II-B Art. IV-C | ||
Fin de la procédure Ouverture d'un redressement judiciaire Ouverture d'une liquidation judiciaire Période suspecte | Art. IV-D | Art. L. 631-1
Art. L. 640-1
L. 631-8 | |
Dispositions générales de procédure Voies de recours Autres dispositions Frais de procédures | Art. V | Art. L. 661-1 à L. 661-12 Art. L. 662-1 à L. 662-8 Art. L. 663-1 à L. 663-4 | |
EIRL | Art. V | Art. L. 680-1 à L. 680-7 |
Décryptage de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021
Voici l'article 13 de la loi n°2021-689 relative à la gestion de sortie de la crise sanitaire qui institue la procédure de traitement de sortie de crise.
Conditions d’ouverture de la procédure de sortie de crise
I. - A. - Il est institué une procédure de traitement de sortie de crise ouverte sur demande d'un débiteur mentionné à l'article L. 620-2 du code de commerce qui, étant en cessation des paiements, dispose cependant des fonds disponibles pour payer ses créances salariales et justifie être en mesure, dans les délais prévus au présent article, d'élaborer un projet de plan tendant à assurer la pérennité de l'entreprise.
La procédure ne peut être ouverte qu'à l'égard d'un débiteur dont le nombre de salariés et le total de bilan sont inférieurs à des seuils fixés par décret et dont les comptes apparaissent réguliers, sincères et aptes à donner une image fidèle de la situation financière de l'entreprise.
L'ouverture de la procédure est examinée en présence du ministère public.
Désignation et fonctions des organes de la procédure
I-B. - Le tribunal désigne un mandataire inscrit sur la liste prévue à l'article L. 811-2 (NDLR : Administrateur judiciaire) du code de commerce ou sur celle prévue à l'article L. 812-2 (NDRL : Mandataire judiciaire) du même code. Par décision spécialement motivée, il peut désigner une autre personne dans les conditions prévues aux mêmes articles L. 811-2 et L. 812-2. Les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 621-4 et l'article L. 621-4-1 dudit code ne sont pas applicables (NDRL : Exclusion , Art. L. 621-4 al. 3, possibilité de nommer un expert, Art. L. 621-4 al. 4, absence d’obligation de nommer un administrateur judiciaire en dessous des seuils fixés à l’article R. 621-11 et Art. L. 621-4-1, relatif à la désignation d’un deuxième administrateur et mandataire judiciaire).
Le mandataire ainsi désigné exerce les fonctions prévues aux articles L. 622-1(NDLR : Administration de l’entreprise), à l'exception de toute mission d'assistance, et L. 622-20 (NDLR : Monopole du mandataire et actions en justice) du même code.
I-C. - Les contrôleurs sont désignés dans les conditions prévues à l'article L. 621-10 du code de commerce. Le deuxième alinéa du même article L. 621-10 n'est pas applicable (NDLR : Art. L. 621-10, alinéa 2, relatif à la désignation des organismes publics en tant que contrôleurs).
Période d’observation
I-D. - Le jugement ouvre une période d'observation d'une durée de trois mois. Au plus tard au terme d'un délai de deux mois à compter du jugement d'ouverture, le tribunal ordonne la poursuite de la période d'observation s'il lui apparaît que le débiteur dispose à cette fin de capacités de financement suffisantes.
Fin de la procédure
I-E. - Le ministère public saisit le tribunal à l'effet de mettre fin à la procédure de traitement de sortie de crise s'il apparaît que le débiteur ne sera pas en mesure de proposer un plan, avec l'assistance du mandataire désigné, dans le délai de trois mois mentionné au D du I (durée de la période d’observation) du présent article. Le tribunal peut également être saisi aux mêmes fins par le mandataire désigné ou le débiteur. Il est alors fait application, le cas échéant, du D du IV (NDLR : Fin de la procédure).
Inventaire
II. - A. - L'inventaire du patrimoine du débiteur ainsi que des garanties qui le grèvent est établi dans les conditions prévues aux articles L. 622-6 (conditions et contenu) et L. 622-6-1(établissement par le débiteur) du code de commerce. Le tribunal peut dispenser le débiteur, à sa demande, de procéder à l'inventaire.
Liste des créances
II-B. - Le débiteur établit la liste des créances de chaque créancier identifié dans ses documents comptables ou avec lequel il est lié par un engagement dont il peut justifier l'existence. Cette liste comporte les indications prévues aux deux premiers alinéas de l'article L. 622-25 du code de commerce (NDLR : Déclaration du montant de la créance). Elle fait l'objet d'un contrôle dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
Dépôt au greffe de la liste des créances et contestation
II-C. - La liste est déposée au greffe du tribunal par le débiteur. Le mandataire désigné transmet à chaque créancier figurant sur la liste l'extrait de cette liste déposée concernant sa créance. Dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat, les créanciers peuvent faire connaître au mandataire leur demande d'actualisation des créances mentionnées ou toute contestation sur le montant et l'existence de ces créances.
Consultation des créanciers à partir de la liste des créances
II-D. - Les engagements pour le règlement du passif, mentionnés à l'article L. 626-10 du code de commerce, peuvent être établis sur la base de la liste prévue au B du présent II, actualisée le cas échéant, dès lors que ces créances ne sont pas contestées.
Redressement judiciaire simplifié
III. - A. - La procédure de traitement de sortie de crise est soumise aux règles prévues au titre III du livre VI du code de commerce, sous réserve du présent article. Les III et IV de l'article L. 622-13 (NDLR : Art. L. 622-13, III et IV relatif à la résiliation de plein droit des contrats en cours et sur la demande de l’administrateur), les sections 1, 3 et 4 du chapitre IV ( NDLR : Chapitre IV sur la sauvegarde, section 1, détermination du patrimoine du débiteur, section 3 revendications et restitutions, et section 4, EIRL) et le chapitre V ( NDLR : Sur le règlement des créances résultant du contrat de travail) du titre II du livre VI du même code ne sont pas applicables.
Vérification des créances
III-B. - En cas de contestation par un créancier de l'existence ou du montant de sa créance portée sur la liste établie par le débiteur, le juge-commissaire, saisi par le mandataire désigné, le débiteur ou le créancier, statue sur la créance dans les conditions fixées à l'article L. 624-2 (NDLR : Admission des créances) du code de commerce. La décision du juge-commissaire n'a d'autorité qu'à l'égard des parties entendues ou convoquées. Les conditions et formes du recours contre sa décision sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
Elaboration du plan
IV. - A. - Le tribunal arrête le plan dans les conditions prévues au chapitre VI du titre II (NDLR : Plan de sauvegarde) du livre VI du code de commerce, sous réserve du présent article. Toutefois, le plan ne peut comporter de dispositions relatives à l'emploi que le débiteur ne pourrait financer immédiatement. Le mandataire désigné exerce les fonctions confiées au mandataire judiciaire par le même chapitre VI.
Contenu du plan
IV- B. - Le plan ne peut affecter que les créances mentionnées sur la liste prévue au B du II du présent article, nées antérieurement à l'ouverture de la procédure. Il ne peut affecter les créances nées d'un contrat de travail, les créances alimentaires, les créances d'origine délictuelle, ni celles d'un montant inférieur à une somme fixée par décret en Conseil d'Etat.
IV- C. - Le montant des annuités prévues par le plan à compter de la troisième ne peut être inférieur à 8 % du passif établi par le débiteur.
Fin de la procédure
IV-D. - A défaut de plan arrêté dans le délai de trois mois prévu au D du I, le tribunal, à la demande du débiteur, du mandataire désigné ou du ministère public, ouvre une procédure de redressement judiciaire, si les conditions prévues à l'article L. 631-1 du code de commerce sont réunies, ou prononce la liquidation judiciaire, si les conditions prévues à l'article L. 640-1 du même code sont réunies. Cette décision met fin à la procédure. La durée de la période d'observation de la procédure de traitement de sortie de crise s'ajoute à celle de la période définie à l'article L. 631-8 dudit code.
Autres dispositions du livre VI applicables
V. - Les titres VI (NDLR : Dispositions générales de procédure) et VIII (NDLR : EIRL) du livre VI du code de commerce sont applicables à la procédure de traitement de sortie de crise prévue au présent article.
VI. - Le présent article est applicable à Wallis-et-Futuna.
Entrée en vigueur
VII. - Le présent article s'applique aux procédures ouvertes à compter du premier jour suivant la publication de la présente loi et aux demandes formées avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de cette même date.
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