Mercredi soir, l’AFJE a organisé une table ronde réunissant les représentants des candidats à la présidentielle. Justice, confidentialité des avis des juristes, code européen des affaires... Plusieurs propositions intéressant les directions juridiques leur ont été soumises.
Ils ont presque tous répondu présent. Zemmour, Pécresse, Macron, Le Pen… Avant-hier, leurs représentants ont joué le jeu du grand oral, organisé par l’AFJE, à l’issue de sa 52e Assemblée générale. Tous les candidats avaient reçu l’invitation : certains ont manqué à l’appel - tandis que d’autres n’ont pas pu faire entendre leur voix, comme Caroline Mécary, avocate et représentante de Jean-Luc Mélenchon, souffrant d’une aphonie mais présente tout de même pour l’occasion.
La soirée a commencé par un discours émouvant en souvenir d’Olivier Cousi, avocat associé chez Gide Loyrette Nouel et ex-bâtonnier du Barreau de Paris. Il est décédé le 2 mars dernier. « J’ai aimé travailler avec lui, parfois sur des sujets de controverse. J’ai apprécié son sens de l’ouverture et de la conciliation. Le plus important, c’est l’humanité d’Olivier. C’est cela que je veux garder à l’esprit », a déclaré Marc Mossé, président de l'AFJE. Salve d’applaudissements dans la salle. S’en est suivi un hommage aux homologues juristes ukrainiens, porté par Jean-Philippe Gille, président désigné de l’AFJE. Des mots de soutien suivis d’actes concrets, puisque l’association a décidé de mettre en œuvre une première mesure d’aide immédiate en débloquant 5000 €, reversés à la Croix-Rouge pour la cause ukrainienne.
Puis, chaque représentant politique a pris place derrière un pupitre afin de répondre aux questions de Marc Mossé.
« Le service public de la justice est profondément dégradé depuis longtemps. Il entraîne une insécurité générale », a déclaré Jean-Paul Garraud, député européen et représentant de la candidate Marine Le Pen (Rassemblement National). Pour le restaurer, la candidate prévoit « une grande réforme sur les moyens » alloués à la Justice. « Amplifier les recrutements, ouvrir les concours »... Jean-Paul Garraud plaide également pour le retour d’une justice de proximité et des tribunaux d’instance. « Au-delà des moyens, l’objectif est de réconcilier les français avec leur justice ».

« Aujourd’hui, notre justice est dans l’incapacité d’accomplir ses missions », poursuit Hervé Lehman, avocat, ancien magistrat et représentant de Valérie Pécresse (Les Républicains). « La situation est devenue dramatique au terme de ce quinquennat ». Lenteur des procédures, besoin de sécurité juridique… La candidate souhaite également recruter plus de juges et de greffiers. « Donner les moyens de juger vite et bien, c’est l’engagement quoiqu’il en coûte, de Valérie Pécresse ». Autre engagement, celui de réduire drastiquement les normes. « Parfois contradictoires, incompréhensibles... ». Des textes adoptés « en réaction au Journal de 20 heures ». La candidate souhaite mettre fin à la « surpénalisation ».

« Nous ne mettrons pas fin à l’état de droit quand nous serons élus », lance Jérémie Michel, avocat représentant le candidat Eric Zemmour (Reconquête). « Pour nous, l’Etat de droit, c’est ce système qui implique que tous les membres de la société sont soumis à la loi. Nous récusons l’interprétation extensive de certains qui voudraient faire de l’Etat de droit non pas un système juridique, mais un système de valeurs. Les valeurs sont fluctuantes. Il appartient à la démocratie et non à l’Etat de droit de définir les valeurs qui sont censées présider ». Parmi les propositions évoquées, Eric Zemmour souhaite « instaurer la supériorité des lois nationales sur les lois extra nationales » et « permettre au Parlement d’avoir le dernier mot en cas d’inconstitutionnalité d’une loi ».

« Préserver l’Etat de droit, c’est préserver la compétitivité de notre économie, qui est la condition de notre puissance et de notre souveraineté ». Eric Zemmour « souhaite baisser massivement les impôts » et « permettre aux PME de payer 15 % d’impôts sur les sociétés ». Sur l’Europe, il souhaite « mettre fin à la surtransposition des règles européennes et lutter contre l’extraterritorialité du droit américain ». « Partout où l’UE pourra servir les intérêts de la France, nous saurons être européens ».
« Je suis très attentive à ne pas nourrir encore l’obésité législative », assure Elisabeth Guigou, ministre de la justice de 1997 à 2000 et représentant le candidat et président sortant Emmanuel Macron (LREM). « Chaque fois qu’il y a des faits de société, qui frappent l’opinion publique, la tentation est là et il faudra y résister ».

« Attention à la surenchère démagogique », prévient-elle enfin. Avant de rappeler que « la justice a été la priorité de ce quinquennat » et que les efforts ont été « sans précédent, par rapport à ce qui s’est fait depuis au moins 20 ans ». La volonté d’Emmanuel Macron est de « poursuivre cet effort et de l’amplifier afin de réduire les délais et de maintenir une justice de qualité ».
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Et que pensent nos candidats de la confidentialité des avis ? Pour Hervé Lehman (ndlr : représentant de Valérie Pécresse), la situation est de plus en plus compliquée et les magistrats n’en veulent pas. « Je le regrette mais ce n’est pas pour demain ».
« Le rapport Gauvain est le 7e », rappelle Elisabeth Guigou (ndlr : représentant de Macron). « Le président a indiqué qu’il était favorable à ce qu’on place les juristes d’entreprise dans la même situation que leurs collègues étrangers ». Elle rappelle « l’obstacle des magistrats et des enquêteurs », qui a tendance à s’atténuer, mais aussi la résistance de certains avocats ». « Je ne suis pas au gouvernement mais je peux dire que je comprends, ô combien, qu’après toutes ces années vous continuiez à creuser votre sillon ».
« On est sur une situation qui peut paraitre ubuesque car nos concurrents européens bénéficient de cette confidentialité, estime Jérémie Michel (ndlr : représentant de Zemmour). « Nous ne serions pas contre le fait de réfléchir à une réforme allant en ce sens ».
Pour le représentant de Marine Le Pen, « il faudrait que les acteurs principaux se mettent d’accord entre eux. Il faut un vrai débat et qu’on se mette tous autour de la table ».
Sur la création d’un code européen des affaires, Elisabeth Guigou se montre favorable tandis que le représentant d’Éric Zemmour souhaite plutôt aller « vers plus de souveraineté nationale. Il faut éviter une forme d’hystérie. Les règles juridiques sont très complexes et s’adaptent à des réalités différentes ». Quant au représentant de Marine Le Pen, il rappelle son opposition à la primauté du droit européen, estimant que le droit de l’UE est entre les mains des lobbies et des ONG.
Le débat s’est enfin clôturé par un cocktail, sur lequel tout le monde s’est mis d’accord.
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