Privilège du Trésor : inconstitutionnalité du droit de suite pour recouvrer une taxe

29.06.2022

Gestion d'entreprise

Le droit de suite attaché au privilège du Trésor pour le recouvrement de la taxe foncière, dans sa rédaction résultant de la loi du 29 décembre 1984 tel qu'interprétée par la Cour de cassation, est contraire à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel relève que les dispositions légales créant le privilège du Trésor telles qu’interprétées par la jurisprudence de la Cour de cassation permettent que, en cas de transfert de propriété de l’immeuble, la créance de taxe foncière de l’ancien propriétaire puisse être recouvrée sur les loyers dus au nouveau propriétaire. Or en mettant cette créance à la charge de ce dernier, alors qu’il n’est ni le redevable légal de cet impôt ni tenu solidairement à son paiement, ces dispositions portent à son droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

Découvrir tous les contenus liés

En l’espèce, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), une société conteste l’interprétation faite par la Cour de cassation de l’article de l’article 1920, 2, 2° du code général des impôts (CGI) énonçant le privilège du Trésor (Cass. com. QPC, 9 mars 2022, n° 21-21.885, n° 267 D : v. bull. 258, « Question de la conformité du droit de suite du privilège du Trésor à la Constitution », p. 11). Ce texte prévoit, dans sa rédaction résultant de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 de finances pour 1985, que le privilège du Trésor s’exerce : « Pour la taxe foncière sur les récoltes, fruits, loyers et revenus des biens immeubles sujets à la contribution ». La société requérante estime que le fait pour la Haute juridiction civile de permettre au Trésor public, en cas de transfert de propriété de l’immeuble, de poursuivre le recouvrement d’une créance de taxe foncière auprès du nouveau propriétaire, alors qu’il n’en est pas le redevable légal, porteraient une atteinte disproportionnée à l’exercice du droit de propriété.

Remarque : la décision porte sur l’article 1920 du CGI dans sa rédaction issue de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 de finances pour 1985. La nouvelle rédaction de cet article, résultant de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, n’a pas modifié les dispositions figurant au 2, 2°, visées par la décision.

Le Conseil constitutionnel commence par affirmer qu’il est loisible au législateur d’apporter aux conditions d’exercice du droit de propriété des personnes privées, protégé par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi. En consacrant le privilège du Trésor, le législateur a entendu garantir le recouvrement des créances publiques. Il a ainsi poursuivi un objectif d’intérêt général. Cependant, et pour les raisons évoquées plus haut, l’atteinte au droit de propriété est considérée comme disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi lorsqu’il est possible de se prévaloir de ce privilège à l’encontre d’un nouveau propriétaire qui n’est pas tenu des dettes du précédent.

Le Conseil constitutionnel précise ensuite, en application de l’article 62 de la Constitution, que la déclaration d’inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de publication de la présente décision.

Il juge, enfin, que les dispositions déclarées contraires à la Constitution dans leur rédaction contestée ne sont plus en vigueur.

Olivier Gout, Professeur à l'Université de Lyon 3
Vous aimerez aussi