Procédure de recueil d'alerte interne : les améliorations à retenir

15.11.2022

Gestion d'entreprise

La loi visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte impose la mise en place de nombreuses mesures depuis le 1ᵉʳ septembre 2022. Retour sur les principales avancées du texte, évoquées lors d’une conférence organisée le 18 octobre par l’IRC (Institut Risk et Compliance), en présence de Sylvain Waserman, auteur et rapporteur de la loi.

« Tout le monde peut être lanceur d’alerte », introduit Sylvain Waserman, ancien vice-président de l’Assemblée nationale, auteur et rapporteur de la loi Lanceurs d'alerte du 21 mars 2022. La définition plus large des lanceurs d’alerte, c'est la première avancée évoquée à l'occasion de la conférence organisée par l’IRC (Institut Risk et Compliance) le 18 octobre dernier. La recevabilité des alertes est également assouplie : auparavant, le lanceur d’alerte devait agir de manière désintéressée. Désormais, la loi prévoit que le lanceur d’alerte agit sans contrepartie financière. Mais attention, prévient Sylvain Waserman, « la dénonciation calomnieuse reste un délit pénal. On risque gros à usurper le statut de lanceurs d'alerte dans l'intention de nuire ».  En effet, l’article 226-10 du code pénal prévoit une peine de 5 ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende pour l’auteur de l’infraction. L’extension des personnes qui peuvent expressément être considérées comme lanceurs d'alerte est un réel progrès, approuve Pierrick Le Goff, associé chez De Gaulle Fleurance. « Les administrateurs, les actionnaires peuvent lancer une alerte », se réjouit-il. « Ces personnes ont des liens avec la société mais ne vivent pas dans la société au jour le jour. Le champ a été étendu aux tiers contractants, aux partenaires d’affaires : c'est une avancée majeure ».   

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Mettre de la concurrence entre les deux canaux

Parmi les autres améliorations mises en avant par l’ancien député, le libre choix du canal interne ou externe exercé par le lanceur d'alerte pour émettre son signalement.  « C’est un sujet majeur. En tant qu’ancien chef d’entreprise, cela change tout. J’ai fait le choix de mettre de la concurrence entre les deux canaux et de laisser les chefs d’entreprise le plus libres possible dans la mise en place du dispositif d’alerte ». 

Le décret relatif à la procédure de recueil et de traitement des signalements émis par les lanceurs d’alerte prévoit d’ailleurs l’obligation pour l’entreprise de traiter l’alerte dans un délai imparti, soulève Sylvain Waserman. Dans les 7 jours suivant le signalement, elle devra envoyer un accusé de réception au lanceur d’alerte. « Attention, si l'alerte n'est pas traitée, la sanction sera immédiate : les lanceurs d'alerte iront en externe, prévient Sylvain Waserman. Le dirigeant a donc tout intérêt à créer un canal interne efficace ».

« On a trouvé un équilibre avec les organisations patronales et les ONG, ce que j'appelle une "juste ligne de crête". C'est ce qui m'a permis d'obtenir l'unanimité en première lecture à l'Assemblée. D’une part, les entreprises ont la liberté d’organiser leur canal interne et doivent consulter les IRP mais uniquement pour avis. D’autre part, le statut de facilitateur [ndlr : qui offre une protection à l’entourage du lanceur d’alerte, y compris une personne morale comme une association par exemple] est défini », se félicite Sylvain Waserman.

« Nous sommes dans une nouvelle phase d’ébullition de la législation française. De nombreuses entreprises en dessous des seuils définis par la loi Sapin II pour les programmes de compliance pensaient ne pas avoir besoin de dispositif d'alerte », souligne Pierrick Le Goff. « On a fait le constat positif que de nombreuses sociétés se sont réveillées sur l'obligation d'avoir un dispositif grâce à la médiatisation de la nouvelle loi ». Aujourd’hui, avec l’entrée en vigueur de la loi et la parution de son décret d’application, « les acteurs se sentent obligés de se repencher sur leur dispositif. Les entreprises se reposent la question du champ d'application de leur dispositif d'alerte », se félicite-t-il.  

« Un salarié qui lance une alerte en interne, c’est un acte de loyauté »

Selon Natacha Lesellier, associée au sein du cabinet Flichy Grangé Avocats, les entreprises ne doivent pas « voir la loi comme une nouvelle contrainte mais en tirer des opportunités ». Au contraire, les entreprises ont « intérêt à rendre le dispositif attractif sinon les salariés exerceront leur signalement via le canal externe ». Pour ce faire, elle préconise de « s'assurer que les personnes vers qui les alertes sont dirigées sont vraiment reconnues comme indépendantes et ayant des moyens d'action ». Notamment, de ne « pas négliger l'accompagnement du middle management, qui doit être rassuré et outillé ».

« Les RH devront être impliqués dès le départ » dans la réflexion concernant la mise à jour du dispositif, ajoute l’avocate. « Ils sont les garants de l’éthique du quotidien. Ils ont un rôle important à jouer dans la culture de l’entreprise ».  

Enfin, « la compliance doit être portée par le dirigeant qui doit en voir les bénéfices. Les entreprises doivent passer le cap de se dire qu’une alerte constitue de la dénonciation. Un salarié qui lance une alerte en interne, c’est un acte de loyauté », conclut l’avocate.

 

Retrouvez en pièce jointe l'infographie sur la procédure de recueil et de traitement des signalements en interne sous format PDF (réalisée par Jérémy Martin)

Leslie Brassac
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