Procès France Télécom : le tribunal rendra son jugement  le 20 décembre

Procès France Télécom : le tribunal rendra son jugement le 20 décembre

12.07.2019

Gestion du personnel

Les avocats, Jean Veil, Bérénice de Warren et François Esclatine, ont demandé, hier, la relaxe de leur client, Didier Lombard, ex PDG de France Télécom, accusé de harcèlement moral. Le tribunal correctionnel de Paris rendra son jugement le 20 décembre.

Dernier chapitre de l’affaire France Télécom. Le procès, qui s’est ouvert le 6 mai, s’est achevé, hier, par la plaidoirie de Jean Veil, de Bérénice de Warren et de François Esclatine du cabinet Veil/Jourde. Les trois avocats ont demandé la relaxe de leur client, Didier Lombard, ex PDG de l’entreprise, accusé de harcèlement moral alors que les deux procureures avaient requis, le 2 juillet, la peine maximale, 15 000 euros d'amende ainsi qu'un an de prison.

"Quand on subit un drame on a besoin d’un responsable, a souligné Maître de Warren. C’est le dirigeant de l’entreprise qu’on veut voir souffrir consciemment ou inconsciemment". "La société n’a pas besoin d’une condamnation symbolique, elle n’apaisera pas la souffrance des familles. Je vous demande de relaxer Monsieur Didier Lombard".

39 cas de salariés retenus

Il faudra, toutefois, attendre l'épilogue, le 20 décembre pour clore définitivement ce procès inédit dans lequel l’ancien PDG et six autres ex-dirigeants (dont l’ex-DRH, Olivier Barberot) comparaissent pour harcèlement moral ou complicité de ce délit. C’est en effet, à cette date, que le tribunal correctionnel de Paris rendra son jugement. "C’est un lourd fardeau que le tribunal emporte avec lui, a déclaré la présidente Cécile Louis-Loyant, à l’issue de la dernière journée. Le tribunal espère que ces instants de partage de douleurs les auront rendus plus supportables".

Les juges ont retenu 39 cas de salariés, dont 19 se sont suicidés.

"Si on ne l’avait pas privatisée, France Télécom serait morte"

Au cours de cette dernière plaidoirie, Maître Veil a tout d’abord rappelé que Didier Lombard a succédé à Thiery Breton, alors nommé au gouvernement, à une époque, en 2005, où "il est inexacte de dire que la crise était presque résolue". "Elle ne l’était pas du tout". "Elle était moins mauvaise mais il restait des dettes et (même) beaucoup de dettes à gérer". "Si on ne l’avait pas privatisée, France Télécom serait morte", a poursuit Maître Veil, en rapportant ici les propos de Dominique Strauss-Kahn tenus en 2008.

Des propos "maladroits"

Il a aussi été question des expressions sans filtre tenues par l’ancien dirigeant. En octobre 2006, huit mois après avoir annoncé un plan de transformation de l'entreprise et 22 000 départs sur trois ans, Didier Lombard avait dit vouloir les faire sortir "par la fenêtre ou par la porte". Son conseil Jean Veil a plaidé "une maladresse". Quant à la phrase sur "la mode des suicides", prononcée par l'ex-PDG devant les médias en septembre 2009, elle était due au "stress, il était interrogé tous les jours", a assuré Maître Veil.

"Un stratège, un visionnaire"

Maître de Warren s’est employée, ensuite, à décrire la personnalité de l’ex-dirigeant. "Monsieur Lombard est un stratège, un visionnaire. Il sait emmener ses troupes d’un point A à un point B. Il a mené à bien des projets industriels". De plus, "c’est un serviteur de l’État il a travaillé sans relâche pour l’industrie française il incarne l’intérêt général".

Le plan Next ? "Une stratégie industrielle, indique-t-elle. Next n’a rien à voir avec une baisse d’effectifs. La transformation est perturbante et Didier Lombard en a conscience, c’est la raison pour laquelle le volet social du plan Next (ACT) a été ajouté". "Il était peut être insuffisant, mais il n’a pas été créé pour être insuffisant". Pour l’avocate, "il y avait une vraie volonté de proposer aux agents de France Télécom une solution s’ils ne souhaitent pas rester".

L’absence de mesures de prévention, dénoncée par les avocats des parties civiles ? "Monsieur Lombard dit qu’il n’a jamais pu constater une déstabilisation ou un mal-être général. Il n’y a pas eu de remontée que ce soit au conseil d’administration, au comité de direction".

La question du harcèlement moral managérial 

Maître François Esclatine s’est, lui livré à une démonstration juridique. "La vraie question juridique posée dans ce procès est la suivante : le harcèlement moral institutionnel peut-il être condamné sur la base du texte originel du harcèlement moral ?", a-t-il demandé. C’est selon l’avocat une question juridique fondamentale. Or, "le parquet n’y a consacré que 14 minutes". "Le législateur n’a pas choisi d’intégrer le harcèlement managérial dans la définition du harcèlement moral. Ils ont exclu le harcèlement moral managérial". D’ailleurs, au regard des sanctions encourues - qui sont faibles - , le législateur "n’a pas souhaité viser plusieurs victimes".

Reprenant les différents éléments constitutifs de l’infraction de harcèlement moral, il démonte l’accusation. D’une part, "parce qu’il n’y a pas de faits positifs pouvant caractériser les agissements nécessaires à la qualification pénale de harcèlement moral" ; le plan de suppression de poste n’étant un "acte positif de harcèlement moral". D’autre part, parce qu’aucune intention de harceler n’est avérée; aucuns liens interpersonnels n’existant entre Didier Lombard et les victimes. Selon l’avocat, "l’élément intentionnel a été confondu avec l’objet du plan dont il est à l’origine".

Maître François Esclatine appuie ici sa démonstration par une décision de la Cour d’appel de Versailles de 2014 qui avait refusé la reconnaissance de harcèlement moral institutionnel. "L’acte de harcèlement devant être contre une personne déterminée".

 

 

Vers une  une procédure d’indemnisation du préjudice individuel ?  

Si Nicolas Guérin, secrétaire général d'Orange, qui représente France Télécom au procès, a contesté "l’idée d’un harcèlement organisé, généralisé et passible de sanctions pénales et selon les termes de l’ordonnance de renvoi d’une politique d’entreprise visant à déstabiliser nos collaborateurs", il a reconnu que les transformations de France Télécom ont pu "générer des cas de souffrance individuelle que l’entreprise n’a hélas pas toujours su prévenir". "Dans certains cas ces souffrances peuvent constituer des préjudices susceptibles d’être réparés". A ce titre, sur le modèle de la commission de la médiation évoquée tout au long de ce procès, "nous engagerons une discussion avec nos partenaires sociaux pour constituer une commission qui se penchera sur cette question de l’indemnisation quelle que soit la décision que le tribunal rendra".

Par ailleurs, l’entreprise s’engage à "travailler avec les organisations syndicales à des modalités concrètes d’accompagnement psychologiques des salariés et des parties civiles". "Ce procès a eu un écho retentissant et il y a un risque de déception de certains".

Enfin, une rencontre avec les partenaires sociaux sera organisée, dès la rentrée, pour discuter de "nouvelles dispositions de prévention".

"Il est indéniable  qu’il y a eu de la souffrance chez certains de nos collaborateurs. En se focalisant sur la préservation de l’entreprise et son personnel dans son ensemble, il est évident que nous n’avons pas su protéger certaines personnes", a-t-il conclu.

 

 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Anne Bariet, Justine Gruet-Zougar et Juliette Renard
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