Finalement aucune motion de censure n'a été déposée hier sur le projet de loi Travail. Le texte est alors considéré comme adopté, le gouvernement ayant fait jouer l'article 49 alinéa 3 de la Constitution. Mais il en a profité pour intégrer des dernières modifications au projet de loi que nous récapitulons.
L'examen du projet de loi Travail est entré dans sa dernière ligne droite ; hier les députés de la majorité qui souhaitaient déposer une nouvelle motion de censure n'ont pas pu recueillir les 58 voix nécessaires. Le texte va désormais être examiné en nouvelle lecture au Sénat le 18 juillet avant une adoption définitive le 20 juillet à l'Assemblée nationale. Reste toutefois un dernier obstacle non négligeable à sauter : passer sous les fourches caudines du Conseil constitutionnel, qui sera sans nul doute saisi. La publication du texte au Journal officiel ne devrait dès lors pas intervenir avant la mi-août.
Le texte considéré comme adopté hier, en l'absence de dépôt d'une motion de censure, en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale via la procédure du 49-3 contient encore des modifications par rapport à la version amendée par la commission des affaires sociales que nous avons détaillée dans notre édition du 5 juillet.
La philosophie du très contesté article 2 reste en l'état. En matière de durée du travail et de congés, la fusée à trois étage est préservée : dispositions d'ordre public public, champ conventionnel et normes supplétives. La proposition faite avant-hier par plus de 120 députés afin de maintenir en l'état la majoration des heures supplémentaires (majoration inférieur à 25% seulement si un accord de branche le permet) a été rejetée par le gouvernement.
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
C'est l'article 13 qui a fait l'objet de modifications pour apporter des garde-fous au niveau des branches. Ainsi, lors de l’examen du texte en nouvelle lecture, la commission des affaires sociales a réaffirmé le principe selon lequel, dans certaines matières (salaires minima, classifications, prévoyance, fonds de la formation professionnelle), un accord d’entreprise ne peut déroger aux garanties définies par l’accord de branche. La commission a étendu ce principe à deux nouvelles matières, la pénibilité et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Par ailleurs la commission a demandé aux branches de définir leur "ordre public conventionnel", c’est-à-dire les matières dans lesquelles les accords d’entreprise ne pourront pas être moins favorables que les accords de branche. Elles auront deux ans à compter de la promulgation de la loi pour engager une négociation sur la définition de leur ordre public conventionnel. Chaque branche devra établir un rapport sur l'état des négociations avant le 30 décembre 2018, précise le texte dans sa dernière version.
Le gouvernement a également rajouté l'obligation pour les entreprises de transmettre leurs accords sur la durée du travail aux commissions paritaires permanentes de négociation et d’interprétation créées par l’article 13 du projet de loi.
D'autres modifications concernent le régime des accords collectifs.
Le projet de loi comporte en effet un certain nombre de mesures visant à améliorer la méthode de négociation. Les accords de méthode sont ainsi favorisés. De nouvelles précisions sont apportées dans la dernière mouture du texte. Les accords sur le calendrier de la négociation pourront être conclus tant au niveau de la branche que de l'entreprise. Ces accords devront par ailleurs respecter les nouvelles règles de validation des accords d'entreprise, soit la règle de majorité de 50% et une possibilité de consultation des salariés à partir de 2019.
Il s'agit là d'une mesure qui a beaucoup évolué. Le gouvernement a introduit dans le projet de loi Travail l'obligation de publier l'ensemble des accords collectifs (de branche, d'entreprise,...). Initialement, seul l'employeur pouvait s'y opposer ; une opposition étendue ensuite à l'ensemble des signataires. La commission des affaires sociales, en nouvelle lecture, a introduit la possibilité d'anonymiser les accords dans le cas où un signataire s'opposerait à sa publication.
Dans la toute dernière version du texte, le gouvernement prévoit un autre dispositif : après la conclusion de la convention ou de l'accord, les parties pourront acter qu'une partie de le convention ou de l'accord ne devra pas faire l'objet d'une publication. Ce n'est qu'à défaut d'un tel acte, si un signataire le demande que la convention ou l'accord pourra être publié dans une version rendue anonyme.
Le gouvernement simplifie dans la dernière mouture du projet de loi le dispositif de négociation avec les élus du personnel prévu par la loi du 20 août 2008. Il met fin au mécanisme de validation par les commissions paritaires de branche. Le projet de loi remplace la procédure de validation par une procédure de transmission des accords à la commission pour information.
Le projet de loi prévoit qu’un accord peut déterminer le mode de répartition de la subvention patronale entre les comités d’établissement permettant notamment la prise en compte des effectifs des établissements. Un amendement ajouté mardi au texte encadre le contenu de cet accord en précisant que la répartition de la contribution peut être faite soit au prorata des effectifs des établissements, soit au prorata de leur masse salariale, soit en prenant en compte ces deux critères. A défaut d’accord, cette répartition est effectuée au prorata de la masse salariale de chaque établissement.
D'autres amendements concernent le compte personnel d'activité (CPA). Un amendement supprime la condition d’inscription au RNCP des diplômes pour déterminer l’éligibilité des salariés aux règles spécifiques d’acquisition des heures CPF instaurées pour les salariés pas ou peu qualifiés.
La commission des affaires sociales a réduit la portée des mesures sur la présence d'IRP dans les réseaux de franchise. Dans la dernière version du texte, le gouvernement restreint encore la portée de ces mesures en les limitant à certains réseaux de franchise seulement. Ainsi ne seront soumis à ces dispositions que les réseaux d'exploitants d'au moins 300 salariés en France liés par un contrat de franchise qui contient des clauses ayant un effet sur l'organisation du travail et les conditions de travail dans les entreprises franchisées.
La commission des affaires sociales a rétabli la distinction du motif économique selon la taille de l'entreprise que le Sénat avait supprimée, notamment par la crainte d'une censure constitutionnelle. En revanche, un amendement prévoit que les dispositions sur le motif économique entrent en vigueur au 1er décembre 2016, par souci de "sécurité juridique".
Les dispositions sur la contestation de l'avis d'inaptitude ont aussi fait l'objet de plusieurs modifications récentes. C'est finalement bien le conseil des prud'hommes en la forme des référés qui tranchera en cas de contestation, comme le prévoyait initalement le projet de loi. Le Sénat avait en effet remplacé cette procédure par une commission régionale composée de trois médecins. La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale avait maintenu ce changement.
Dans sa dernière mouture, le dispositif originel est toutefois complété. Ainsi, le coût de la procédure pourra être mis à la charge de l’employeur selon l’appréciation motivée du juge. "La formation de référé peut décider de ne pas mettre les frais d’expertise à la charge de la partie perdante, dès lors que l’action en justice n’est pas dilatoire ou abusive", prévoit ainsi le texte.
Un autre amendement harmonise le régime applicable en cas d’inaptitude d'origine professionnelle et non professionnelle. La commission des affaires sociales a prévu que le médecin du travail puisse formuler, quelle que soit la taille de l’entreprise, des recommandations sur les possibilités pour le travailleur de suivre une formation le préparant à occuper un poste adapté à son état de santé, par reclassement interne ou externe même lorsque l'origine de l'accident ou de la maladie n'est pas professionnelle. L’amendement introduit mardi propose de supprimer la référence à la taille de l’entreprise pour les AT-MP afin d'harmoniser les deux régimes.
S'agissant des salariés en contrats précaires, un amendement intégré à la dernière version prévoit de "réfléchir à la mise en place de nouveaux moyens d’hébergement de données et d’informations entre médecins du travail permettant d’éviter des visites médicales ou des entretiens infirmiers redondants, tout en respectant les droits des salariés".
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