Publication de l’ordonnance modifiant et codifiant le droit de la publicité foncière

20.06.2024

Immobilier

Harmoniser et simplifier les formalités de publicité foncière, rationnaliser les contrôles, accélérer le traitement des demandes, telles sont les ambitions de l’ordonnance du 19 juin 2024. Ainsi, les règles de la publicité foncière sont rassemblées au sein du code civil, et le fichier immobilier se concentre sur les informations relatives à la propriété des biens et aux sûretés dont ils sont grevés. Ces nouvelles règles entreront en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'État et au plus tard le 31 décembre 2028.

Présentée au Conseil des ministres du 19 juin 2024 et publiée le lendemain au Journal officiel, l'ordonnance modifiant et codifiant le droit de la publicité foncière a été prise en application de l’habilitation à légiférer par ordonnance conférée par l’article 51 de la loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027.

Immobilier

La gestion immobilière regroupe un ensemble de concepts juridiques et financiers appliqués aux immeubles (au sens juridique du terme). La gestion immobilière se rapproche de la gestion d’entreprise dans la mesure où les investissements réalisés vont générer des revenus, différents lois et règlements issus de domaines variés du droit venant s’appliquer selon les opérations envisagées.

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Publier un acte juridique c’est le rendre public, le porter à la connaissance de tous, par son inscription sur un registre public. Tel est le rôle de la publicité foncière qui recouvre l’ensemble des règles destinées à faire connaître aux tiers intéressés la situation juridique des immeubles et la publicité des privilèges, des hypothèques et des autres droits portant sur ces immeubles, par le moyen d’un fichier immobilier.

Contexte de la réforme

Le fichier immobilier français a été créé par le décret-loi n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière et le décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 pris pour son application. Ce corpus fondateur a été complété par diverses dispositions contenues dans différents codes, tels que le code des procédures civiles d’exécution et surtout le code civil, notamment dans ses articles 2421 à 2449 qui fixent le régime de l’inscription au fichier immobilier.

Le régime de la publicité foncière poursuit un objectif d’information des usagers et garantit la pleine efficacité de l’acte publié en le rendant opposable aux tiers. Elle est obligatoire, à peine d’inopposabilité, pour tous les actes portant ou constatant entre vifs, mutation ou constitution de droits réels immobiliers, et donc au premier chef, pour les actes authentiques de vente immobilière. L’étendue des actes et documents publiés au fichier immobilier permet ainsi d’obtenir une photographie de la situation juridique de tout immeuble.

Malgré plusieurs évolutions techniques et organisationnelles, le droit de la publicité foncière reste essentiellement régi par les décrets de 1955 qui sont très techniques et ont été très peu remaniés depuis 60 ans. Les délais de traitement des publications restent longs, 35 jours en moyenne actuellement. Cela est notamment dû à la croissance du marché immobilier et à la baisse des effectifs, malgré la dématérialisation croissante des échanges. Or, le délai de traitement des publications n’est pas sans conséquence sur la sécurité juridique des transactions immobilières et sur la confiance des créanciers hypothécaires, et corrélativement, sur l’attractivité de la France, les délais de réalisation de la publicité foncière ayant une incidence sur le rang de la France dans certains classements internationaux comme le « Doing Business » de la Banque Mondiale (32e en 2019/2020).

Partant de ces constats et face à la nécessité de maintenir les processus de publication, d’inscription et de délivrance des renseignements hypothécaires dans des délais satisfaisants et ce, quel que soit le niveau conjoncturel de dynamisme du marché immobilier, l’idée d’une nécessaire modernisation du régime de la publicité foncière s’est imposée au gouvernement.

Présentation générale de la réforme

La présente réforme de la publicité foncière intervient dans la continuité des travaux de la Commission Aynès, dont le rapport pour une modernisation de la publicité foncière avait été remis à la Chancellerie fin 2018.

Elle ne remet pas en cause les principes fondateurs de l’actuel système de publicité foncière et n’en bouleverse pas non plus le fonctionnement. Son objectif est la simplification et la modernisation du droit de la publicité foncière, par la création de principes généraux de la publicité foncière codifiés dans le code civil, afin d’améliorer l’accessibilité de la matière et de renforcer son efficacité juridique. Les dispositions de l’ordonnance entreront en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard, le 31 décembre 2028.

Sur la forme

Le décret du 4 janvier 1955 est abrogé par l'ordonnance et ses règles importantes sont regroupées dans la partie sur la publicité foncière du code civil, sous le titre V du livre II. Les grandes lignes des règles communes sont présentées de manière chronologique, ainsi que chaque étape des formalités susceptibles d’engager la responsabilité de l’État. De plus, les articles du code civil relatifs aux hypothèques, notamment la section sur l'inscription des hypothèques (section 6 du chapitre III du titre II du livre IV), sont partiellement réécrits pour énoncer plus clairement les principes, tout en prenant en compte les acquis de la jurisprudence. Des termes moins techniques et plus compréhensibles remplacent certaines expressions hermétiques aux juristes profanes pour rendre ces règles plus accessibles à tous.

Le principe de la forme authentique de l’acte à publier est réaffirmé par l’ordonnance, ce qui conforte la place centrale dans le dispositif des notaires, auteurs de la grande majorité des actes publiés au fichier immobilier.

De même, l’exigence de publicité préalable des titres antérieurs à ceux dont la publicité est requise est renforcé.

Les règles de l’opposabilité née de la publicité foncière sont rassemblées.

Sur le fond

La liste des actes publiés à fin d’opposabilité est identifiée. Le fichier immobilier est recentré sur les seules informations relatives à la propriété des biens et aux sûretés dont ils sont grevés.

Le principe du « primo-publiant » reposant sur la priorité accordée au droit résultant d’un acte rendu opposable par sa publication au fichier immobilier est réaffirmé.

En matière d’inscription d’hypothèque, les règles relatives au périmètre des sommes garanties par l’inscription au fichier immobilier sont complétées par des précisions quant aux intérêts et arrérages. Ceux qui ne sont pas mentionnés par le créancier dans les bordereaux d’inscription, et ne sont donc pas couverts par l'inscription initiale, doivent faire l'objet d'une inscription complémentaire qui prend effet à sa propre date.

Sur le plan procédural

Les demandes de formalités de publicité foncière qui ne satisfont pas aux conditions nécessaires pour être exécutées font l’objet d’une sanction unifiée par type de manquement, qu’elles soient relatives à la publication d’un document ou à l’inscription d’une hypothèque.

Les règles de refus d’admission d’un document au dépôt par le service de la publicité foncière (SPF), de suspension des opérations de publicité dans l’attente de la régularisation de la requête et d’arrêt de la formalité faute d’une telle régularisation, font l’objet d’une présentation modernisée et sont rationnalisées, afin de dégager les gains de productivité attendus des SPF.

Dans la même optique, les mentions en marge de documents précédemment publiés sont dotées d’un régime reposant sur le dépôt d’un bordereau complété des mentions nécessaires par le professionnel du droit, sans présentation de pièces justificatives ni contrôle de fond opéré par le SPF.

Toujours pour concourir à la fluidité et à l’abaissement des délais des opérations de publicité foncière, la procédure de radiation « simplifiée » est approfondie, puisque la mention en marge opérant la radiation sera requise sur simple dépôt de ce bordereau, sans présentation ni contrôle par le SPF des pièces justificatives.

Laurence DARTIGEAS-REYNARD, Dictionnaire Permanent Transactions immobilières
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