Qui sont les concurrents des experts-comptables ? (1°)

Qui sont les concurrents des experts-comptables ? (1°)

10.10.2017

Gestion d'entreprise

Les experts-comptables cherchent à étendre leur gamme de services y compris en formalisant leur offre de conseil. Ils s’attaquent ainsi à des marchés occupés par de nombreux acteurs tandis que leur domaine traditionnel est, lui aussi, de fait, de plus en plus concurrentiel. Voici le 1er volet de notre enquête — non exhaustive — dédiée aux principaux concurrents des experts-comptables : état des lieux.

En France, les chefs de TPE-PME auraient peu l’habitude de recourir à des conseils, contrairement à leurs homologues issus des pays anglo-saxons et d’Europe du Nord, et encore moins à payer pour y avoir accès. Le potentiel de ce marché attise pourtant les convoitises. Si les experts-comptables semblent bien placés pour se positionner, compte tenu des caractéristiques de leurs portefeuilles clients et de la connaissance stockée dans leurs bases de données, ils sont loin d’être les seuls. Concrètement, tous les acteurs qui apportent des prestations de services aux entreprises — appartenant ou non à une profession réglementée — apparaissent comme des concurrents des experts-comptables sur le terrain du conseil. Parallèlement, le cœur de métier des experts-comptables, la comptabilité et la fiscalité, est de plus en plus concurrentiel.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Diversité de la concurrence

• Les concurrents en matière de comptabilité : Autorisées à pratiquer l’activité d’expertise comptable, bien que n’étant pas considérées comme experts-comptables, les associations de gestion et de comptable (AGC) font partie du paysage concurrentiel des experts-comptables. Il faut y ajouter les comptables indépendants, qui, même s’ils ne sont ni des experts-comptables ni des AGC, gèrent la production comptable de certaines TPE de façon plus ou moins visible. Les cabinets étrangers sont également susceptibles d’entrer en concurrence avec leurs homologues en France. Et quid des éditeurs de logiciels qui proposent des solutions d’automatisation de la production comptable et que l’on peut donc considérer, de ce point de vue-là, comme des sous-traitants comptables ?

• Certaines professions juridiques se trouvent en concurrence avec les experts-comptables : les avocats d��affaires d’abord — et dans une moindre mesure les notaires — qui cherchent comme les experts-comptables des relais de croissance via de nouvelles activités. Les premiers se positionnent sur la création d’entreprise (rédaction des statuts par exemple), le droit fiscal, le risque juridique, etc. Les seconds peuvent jouer un rôle de conseil patrimonial.

• Les consultants de tout poil ciblent les TPE/PME. Leur champ d’action est vaste car ils accompagnent les dirigeants à des moments clés de la vie de l’entreprise (création, développement, croissance externe,  lancement de l’activité à l’international, cession, transmission). Auprès des TPE, ces missions relèvent de conseils indépendants, alors que les grands cabinets de conseil, qui ont aussi une activité d’audit légal des comptes, s’intéressent plutôt aux grands comptes et aux ETI. Entre les deux, des spécialistes ciblent les PME et les ETI. "Plus l’entreprise se développe plus elle a besoin de services pointus autour du dirigeant actionnaire. Nous travaillons notamment aux côtés du cabinet Fidal et des Banques Populaires Régionales auprès des PME lors de leurs opérations capitalistiques, car nous intervenons à un moment clé du développement de celles-ci", témoigne Bertrand Thimonier, président d’Adviso Partners, société d’ingénierie financière. Des services qui ne sont pas calibrés pour les TPE. Car tout est question de taille et d’objectifs stratégiques …

• Les chambres consulaires et les réseaux d’aides à la création d’entreprise : qu’il s’agisse des chargés de mission des CCI et CMA ou des réseaux privés d’aide et d’accompagnement (France Active, Réseau Entreprendre, ADIE, Initiative France, etc.), qui maillent le territoire, tous planchent sur les business plan des porteurs de projet.

• Les spécialistes de l’externalisation de la paye.

• Les banques, dont l’exploitation des bases de données clients ouvrent des perspectives… Sollicitées, BNP Paribas, Banque Populaire, LCL ou encore La Banque Postale n’ont pas souhaité donner suite. Raison invoquée : partenaires des experts-comptables, elles ne se considèrent pas en concurrence avec eux, ni légitimes pour évoquer l’évolution de la profession comptable… "Les banques sont déjà présentes dans le conseil, au sens large du terme, par leurs équipes spécialisées en cession transmission, fusion acquisition, patrimoine. En revanche, dans l’accompagnement des chefs d’entreprise au quotidien, les conseillers manquent de formation", observe Philippe Gattet, directeur d’études chez Precepta groupe Xerfi. Bpifrance, banque publique d’investissement, propose une offre d’accompagnement dument formalisée (check up transmission, accompagnement RSE, pass repreneur, etc.) et fédère un réseau de consultants indépendants. Fiducial s’apprête à racheter la banque Themis, "pour élargir sa gamme de services", commente Jean-Marc Jaumouillé, directeur des techniques professionnelles de Fiducial. Rappelons que le groupe de Christian Latouche dispose déjà de sa propre banque.

• L’administration : Plusieurs dispositifs simplifiant les démarches des TPE, le titre emploi service entreprises (Tese) par exemple, se substituent théoriquement à certaines tâches réalisées par les cabinets d’expertise comptable et les spécialistes de la paie. Il en est de même avec la DSN même si pour l’instant les gains espérés ne sont pas au rendez-vous… En outre, avec les rescrits, l’administration fiscale apporte de la sécurité juridique en répondant gratuitement aux questions.

• Les plateformes digitales : la transformation digitale n’échappe pas au secteur du conseil aux petites entreprises. D’une part, elle fait naître de nouveaux besoins en accompagnement (mise en œuvre de nouveaux outils, conduite du changement, etc.) de la part des intéressés. D’autre part, elle est susceptible, demain, de modifier le paysage avec l’apparition d’offres disruptives, comme celles de plateforme web dédiées, Myexperteam, par exemple, qui met en relation les chefs d’entreprise avec les organismes d’accompagnement pour une consultation par téléphone ou visio. Mais le phénomène reste encore anecdotique.

Vers l’inter-professionnalité

Dans ce contexte, les experts-comptables qui souhaitent élargir le champ de leurs activités et proposer des offres de conseil ont le choix entre deux stratégies : l’entrée en concurrence avec les spécialistes des différents secteurs, déjà positionnés, ou le rapprochement, en misant sur l’inter-professionnalité. Les grandes étapes de la vie d’une TPE et les questions qu’elles soulèvent en matière de gestion, juridique, fiscale, patrimoniale, nécessitent l’intervention de plusieurs acteurs, tour à tour partenaires et concurrents. C’est tout l’intérêt de l’inter-professionnalité qui ouvre la voie au lancement d’offres plus lisibles et apportant une réponse plus complète aux chefs de TPE. Médecin généraliste de la petite entreprise, l’expert-comptable semble à priori le mieux placé pour impulser ce mouvement et fédérer autour de lui. A condition de bien mesurer les enjeux et les forces en présence aux intérêts stratégiques parfois divergents.

Véronique Méot
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