Réciprocité des distances imposées pour implanter les bâtiments agricoles

11.07.2016

Gestion d'entreprise

L'application différée des règles de distance bénéficie aux seuls exploitants.

Le Conseil d'Etat conforte, dans une décision du 8 juin 2016,  l'application très stricte de l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime retenue par les juges d’appel. 
Le rejet du pourvoi du ministre chargé du logement constitue l'épilogue d'un contentieux déclenché par la délivrance, en 2008, de 2 permis de construire des habitations à 50 mètres de stabulations. L'éleveur avait aussitôt exercé un recours en annulation contre les autorisations en se prévalant de la méconnaissance des règles de distance. La loi d'orientation agricole n° 99-574 du 9 juillet 1999 a, en effet, prescrit l'application réciproque des règles d'éloignement imposées aux exploitants pour construire : l'obligation d'observer une distance minimale par rapport aux habitations et autres immeubles habituellement occupés par des tiers pour implanter les bâtiments d'élevage et leurs annexes est également opposable aux tiers envisageant de construire à proximité des bâtiments agricoles existants. En l'occurrence, une distance de 100 mètres minimum par rapport aux habitations était effectivement prescrite par l'arrêté du 7 février 2005 pour implanter  les bâtiments d'élevage hors-sol de bovins, de volailles et de porcs relevant de la déclaration au titre de la législation des installations classées (Arr. 7 févr.2005 : NOR: DEVP0540077,  JO 1er juin). Le maire avait cependant considéré que cette même distance ne pouvait pas être opposable aux tiers, en 2008, car le texte de 2005 avait prévu l'application différée du dispositif, au plus tard le 31 décembre 2010, s'agissant des installations d'élevage existantes (art. 2). Le dernier arrêt de juin 2016 met un terme aux hésitations ministérielles (le litige ayant été l'occasion d'une divergence entre le ministre chargé de l'écologie et le ministre chargé du logement) mais aussi jurisprudentielles. L'éloignement imposé aux bâtiments d'élevage est immédiatement opposable aux tiers, quels que soient les aménagements dont ont pu bénéficier les exploitants pour s'y soumettre. L'asymétrie ainsi retenue est justifiée, de manière succincte,  par la primauté législative du principe de réciprocité sur des modalités particulières d'entrée en vigueur, de nature réglementaire.
Remarque : les distances d'implantation, objets du litige, sont actuellement prescrites par l'arrêté du 27 décembre 2013 ( Arr. 27 déc. 2013, NOR: DEVP1329742 : , JO 31 déc.).
Véronique Inserguet-Brisset, Maître de conférence en droit public - Faculté de droit de l'université de Rennes

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