Recours contre l'état des créances : respect impératif des délais

25.11.2016

Gestion d'entreprise

L'état de créances litigieux ne peut être remis en question en contestant l'ordonnance de fin de mission du représentant des cr��anciers

Une société en nom collectif (SNC) est mise en redressement judiciaire, le 23 février 1998 et cette procédure est étendue à une autre société. Le tribunal arrête un plan de redressement des deux sociétés. Par une ordonnance du 26 novembre 2004, le juge-commissaire met fin à la mission du représentant des créanciers et, en 2006, le commissaire à l’exécution du plan dépose un rapport constatant l’exécution du plan. Mais, en 2007, la SNC est condamnée à payer à l’AGS une certaine somme au titre des créances de remboursement de ses avances déclarées au passif des sociétés entre avril 1998 et juin 2004.
 
La société prétend qu’elle n’avait pas été appelée à vérifier ces créances. Elle engage une action en responsabilité personnelle à l’encontre du représentant des créanciers et elle fait appel de l’ordonnance du 26 novembre 2004 ayant mis fin à la mission de ce dernier. Elle est déboutée de ses demandes.
 
Il apparaît que le débiteur n’avait pas été appelé aux opérations de vérification des créances et que les déclarations de créances de l’AGS étaient sinon tardives du moins contestables.
 
La SNC soulevait la nécessaire remise en cause préalable de l’ordonnance du juge-commissaire ayant mis fin aux fonctions du représentant des créanciers puisqu’elle n’avait pas été appelée aux opérations de vérification des créances par le représentant des créanciers, et entendait contester l’état des créances signé par le juge-commissaire. De surcroît, la société estimait que le juge-commissaire ne pouvait mettre fin aux fonctions du représentant des créanciers lorsque ce dernier n’a pas procédé régulièrement à la vérification des créances, notamment, lorsqu’il n’a pas respecté son obligation de convocation du débiteur aux opérations de vérification des créances.
 
Dans cette logique, la contestation de cette ordonnance constituait donc un préalable essentiel qui lui ouvrirait, pensait-elle, un recours contre l’état des créances.
 
A cet argument, les juges d’appel ont opposé le caractère définitif de l’état des créances. Le débiteur ne peut pas en contestant la fin de mission du représentant des créanciers remettre en question l’état des créances admettant des créances pourtant irrégulièrement déclarées par l’AGS, puisqu'il était devenu définitif. C’est ce que confirme la Cour de cassation en faisant prévaloir, notamment, la suprématie des délais légaux qui organisent le recours contre l’état des créances.
 
La Cour de cassation rappelle qu’aux termes de l’article 88, alinéa 2 du décret no 85-1388 du 27 décembre 1985, le juge-commissaire met fin à la mission du représentant des créanciers après avoir constaté l’achèvement de la vérification des créances. En ayant constaté que les états de créances avaient été déposés en 1998 et les 12 et 26 avril 2004 et publiés respectivement au BODACC les 20 octobre 1998, 19 mars et 20 avril 2004, la cour d’appel, n’était pas tenue d’apprécier la régularité des déclarations des créances inscrites sur les états de créances et des opérations de vérification. Elle en a exactement déduit que les opérations de vérification étaient achevées et qu’il pouvait être mis fin à la mission du représentant des créanciers.
 
Ensuite, si le débiteur peut faire appel de l’état des créances comportant les décisions d’admission ou de rejet du juge-commissaire à condition qu’il démontre n’avoir pas été mis en mesure de participer à la vérification des créances, le délai de 10 jours dans lequel il doit former ce recours a pour point de départ la publication au BODACC de l’insertion indiquant que l’état des créances est constitué et déposé au greffe. Or, en l’occurrence les états de créances ont été déposés et publiés et la société n’en a pas fait appel, ne serait-ce que pour soulever l’absence de contradiction à son égard des opérations de vérification. Par conséquent, les états de créances litigieux ne peuvent plus être remis en question en contestant la fin de mission du représentant des créanciers.
Martine Dizel, Maître de conférences, université Toulouse I

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