Référé liberté fondamentale : l'environnement intégré par le juge

21.09.2022

Environnement

Une décision du Conseil d'État confirme que le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de sa santé prévu par la charte de l'environnement constitue une liberté fondamentale permettant de bénéficier de cette procédure d'urgence.

Le référé liberté fondamentale (LF) permet au juge de suspendre un acte portant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Le juge doit se prononcer dans un délai de 48 heures (C. just. adm., art. L. 521-2).

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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Confirmation du bénéfice du référé LF au domaine de l'environnement

Depuis que la préservation de l’environnement est considérée comme liberté fondamentale, à la suite de son intégration dans la Constitution en 2005, le juge accepte de prononcer une telle suspension (TA Châlons-en-Champagne, ord. réf., 29 mai 2005, n° 0500828).

 

Dans une décision ultérieure, le juge a suspendu l’exécution de l’arrêté d’un maire interdisant une manifestation consistant en une animation naturaliste en bordure d’une zone humide, dans le cadre de la journée mondiale consacrée à ces espaces. En édictant une interdiction totale fondée sur la sécurité publique (risque de chute dans l’eau des bassins), alors que des mesures plus ciblées pouvaient être prises (limitation du nombre de participants, augmentation de celui des encadrants, délimitation du périmètre d’accès et interdiction d’accès aux bordures du bassin), le maire a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et de venir, à la liberté de réunion, à la liberté d’association et d’expression (TA Melun, ord. réf., 1er févr. 2019, n° 1900932).

 

Une nouvelle décision, cette fois rendue par le  Conseil d’État  confirme que l'environnement constitue une liberté fondamentale. Il estime ainsi que le droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé (art. 1er de la Charte de l’environnement), présente le caractère d’une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.

Conditions de bénéfice du référé LB

L'arrêt du Conseil d’État détaille également les conditions permettant de bénéficier de cette procédure d'urgence.

 

Toute personne justifiant, au regard de sa situation personnelle, notamment si ces conditions ou son cadre de vie sont gravement et directement affectés, ou des intérêts qu’elle entend défendre, qu’il y est porté une atteinte grave et manifestement illégale du fait de l’action ou de la carence de l’autorité publique, peut saisir le juge des référés sur le fondement de cet article.

 

Il lui appartient alors de faire état de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour elle de bénéficier, dans le très bref délai prévu, d’une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de cet article.

 

Dans tous les cas, l’intervention du juge est subordonné au constat que la situation litigieuse permette de prendre utilement et à très bref délai les mesures de sauvegarde nécessaires. Les mesures que le juge peut ordonner doivent s’apprécier en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité administrative et des mesures qu’elle a déjà prises.

Pas de suspension en l'espèce

En l'espèce, les requérants, qui possèdent un laboratoire limitrophe de l'endroit où se déroulent les travaux contestés - travaux de recalibrage d'une route départementale - et où ils mènent depuis plusieurs années un travail de recensement et d'études des espèces protégées s'y trouvant, font valoir que la poursuite de ces travaux portera atteinte de manière irréversible à ces espèces protégées et entraînera la destruction de leur habitat.

 

Le juge a refusé de suspendre ces travaux, estimant que ceux-ci avaient donné lieu à une déclaration IOTA et à une autorisation de défrichement que les requérants n'ont pas contesté. La condition d’urgence particulière n’était donc pas remplie.

 

En outre, la sensibilité du milieu naturel, notamment biologique, au projet est modéré et aucun enjeu de conservation notable n’a pu être identifié si bien que, compte tenu de la nature et de l'ampleur limitées des travaux, le préfet a dispensé d’étude d’impact le projet. Ainsi, l’atteinte grave n’est pas non plus caractérisée.

 

En conséquence, le juge refuse de faire droit à la suspension demandée.

Olivier CIZEL, Code permanent Environnement et nuisances
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