Réforme des contrats spéciaux : quelles sont les propositions en matière de responsabilité décennale?
28.09.2017
Gestion d'entreprise

Le r��gime de présomption de responsabilité décennale fait l'objet de simplifications textuelles et d'aménagements liés notamment à la prise en compte d'évolutions jurisprudentielles.
L’Association Henri Capitant a remis au mois de juin 2017 à la Chancellerie un avant-projet de réforme du droit des contrats spéciaux, librement consultable sur le site de l’association (www.henricapitant.org) et soumis actuellement à une consultation. La journée du 17 novembre prochain sera consacrée à l’étude de cet avant-projet et ouverte aux éventuelles remarques et observations.
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La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Fondamentalement, ce projet ne modifie pas le régime de la présomption de responsabilité décennale des actuels articles 1792 et suivants du code civil. Seules des précisions sont apportées au système pour tenir compte des avancées jurisprudentielles.
Notons cependant la disparition de l’article 1792-4 du code civil relatif à la responsabilité solidaire des fabricants d’EPERS, conformément à la recommandation de la Cour de cassation qui dans son rapport annuel de 2007 préconisait d’abroger cet article, en raison de son imprécision et de son faible intérêt.
Les articles 1788 et 1789 du code civil, répartissant la charge des risques de perte de l’ouvrage en cours de travaux, sont réunis au sein de l’article 82 de l’avant-projet. Le terme « ouvrier » est remplacé par le terme de « prestataire » et la notion de « manquements », concept plus favorable à la victime, se substitue à celle de « faute ».
On observe, par ailleurs, une modification textuelle en cas de fourniture de matériaux par l’entrepreneur (C. civ., art. 1788) : la notion de « livraison » est remplacée par celle de « réception ». Cette mesure s’adapte à l’évolution des marchés qui ne prévoit plus ces deux étapes : livraison puis réception.
L’article 90 de l’avant-projet de réforme modifie substantiellement le régime de la réception (C. civ., art. 1792-6, al. 1). Tout d’abord, il n’est pas fait référence à la notion d’acte unilatéral du maître de l’ouvrage qui déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Seul le caractère contradictoire de l’opération est mis en avant et le terme « maître de l’ouvrage » est remplacé par celui de « client ».
Cet article 90 prend en compte la réception tacite admise, dans certaines conditions, par la jurisprudence. Celle-ci découlerait de deux critères cumulatifs : la prise de possession et le paiement du prix. Ces éléments suffiraient à manifester la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage d’accepter l’ouvrage. Le contentieux de la réception s’en trouverait réduit.
La réception peut être prononcée judiciairement. Dans ce cas, l’ouvrage doit être « apte à sa destination », conformément à la jurisprudence actuelle.
Le champ, le domaine, l’étendue et le régime de la présomption de responsabilité décennale ne sont pas modifiés : les articles 1792 et 1792-2 du code civil sont rassemblés en une seule disposition (Avant-projet, art. 91).
Quelques modifications sont cependant à relever. Le terme « client » se substitue au terme de « maître de l’ouvrage » ; de même, au terme « acquéreur » est substituée l’expression « propriétaires successifs ».
La notion de durée de la garantie (« pendant dix ans à compter de la réception ») est incluse dans le texte.
Néanmoins, la question se posera de savoir si cette simplification ne remettra pas en cause la notion de forclusion qui s’entend comme un délai de prescription et un délai d’action.
L’article 92 de l’avant-projet, remplaçant l’article 1792-3 du code civil, aurait mérité une reformulation plus claire et plus radicale, notamment au regard des dernières évolutions prétoriennes. La jurisprudence spécifiant que la garantie de bon fonctionnement s’applique aux seuls éléments d’équipement qui fonctionnent n’est pas prise en compte directement (Cass. 3e civ., 18 févr. 2016, n° 15-10.750, n° 255 P + B).
L’article prévoit, en présence de dommages de nature décennale, que la présomption décennale prend le relais de la garantie de bon fonctionnement qui est mentionnée comme « une présomption de plein droit".
L’article 1792-1 du code civil, listant les personnes réputées constructeurs, est repris intégralement au sein de l’article 94 de l’avant-projet, auquel ont été ajoutés le vendeur d’immeuble à construire, le constructeur de maisons individuelles et le promoteur.
Les termes de l’article 1792-4-3 du code civil relatif à la prescription spéciale en cas de dommages engageant la responsabilité de droit commun du constructeur après réception (comme pour les dommages intermédiaires) sont repris à l’article 97 de l’avant-projet.
En revanche, après « les actions en responsabilités [ …] se prescrivent par dix ans », il est ajouté la précision suivante : « ce délai court à compter de la réception des travaux pour les dommages postérieurs à celle-ci et de la survenance du dommage pour ceux qui sont intervenus antérieurement ». Ainsi, l’avant-projet prévoit que les dommages survenus avant réception ne relèvent pas de la prescription de droit commun (C. civ., art. 2224) mais de cette prescription spéciale. Son point de départ du délai diffère cependant puisqu’il est fixé à la survenance du dommage.
En définitive, cet avant-projet de réforme du régime de responsabilité des constructeurs ne constitue pas un bouleversement complet du dispositif. Il s’agit d’une modification a minima.
Relevons que les difficultés quant à la notion d’ouvrage ou quant à l’application du régime en cas de travaux sur existants ne sont pas abordées (Cass. 3e civ., 15 juin 2017, n° 16-19.640, n° 695 P + B + R + I).
Reste à savoir comment le Ministère de la justice accueillera ces propositions et quelles suites il y donnera.
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