Retraite : les partenaires sociaux redéfinissent leur feuille de route autour de quatre priorités

Retraite : les partenaires sociaux redéfinissent leur feuille de route autour de quatre priorités

27.03.2025

Gestion du personnel

Les partenaires sociaux (CFDT, CFTC, CFE-CGC, Medef et CPME) ont poursuivi hier leurs discussions sur la réforme des retraites. Loin d'être entrés "dans le dur" des sujets, ils ont échangé sur leur nouvelle feuille de route et sur leurs priorités. Des pistes de réforme sur la pénibilité ont tout de même été esquissées, mais il n'est pas sûr que le "conclave" suffira à en faire le tour.

La négociation sur les retraites prend semaine après semaine une étrange tournure. Elle n'en finit pas de commencer. La semaine dernière, les partenaires sociaux s'étaient donnés une à deux séances pour finaliser une nouvelle feuille de route remplaçant celle élaborée par Matignon. La séance d'hier n'aura effectivement pas suffi à la boucler. Les partenaires sociaux ont tout juste réussi à se mettre d'accord sur les quatre points qui seront à l'ordre du jour et qui en constitueront le squelette. 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

Découvrir tous les contenus liés
Les priorités de la négociation redéfinies

Le premier point est la consolidation du système par répartition indissociable de l'équilibre financier. Le deuxième, le pilotage et la gouvernance du système de retraite "avec une volonté affichée" que les partenaires sociaux y aient "un rôle renforcé", indique le chef de file de la CFDT, Yvan Ricordeau. Troisième item, l'amélioration des mécanismes de solidarité "dans un objectif de justice et de progrès social". Enfin, le dernier consiste à trouver les ressources qui concrétisent des "efforts partagés" entre les salariés et les entreprises en matière de financement de la retraite et de la protection sociale. Le document sera finalisé lors de la prochaine séance, jeudi 3 avril.

Le principal point de discorde entre les organisations syndicales et patronales sera sans conteste la définition des "efforts partagés". Pour Eric Chevée, chef de file de la CPME", il n'est pas question d'augmenter le coût du travail. Même son de cloche du côté du Medef, Diane Milleron-Deperrois rappelant fermement qu'aucune hausse de cotisation ne pourra être envisagée. En somme, le patronat compte sur l'amélioration du taux d'emploi pour dégager de nouvelles recettes.

Les propositions mises sur la table en matière de pénibilité

Les partenaires sociaux ont ensuite poursuivi leurs discussions sur la pénibilité et l'usure professionnelle. Pour l'heure, les discussions restent très techniques, chacun déposant sur la table ses propositions. Si un consensus semble se dessiner pour réintégrer les trois critères ergonomiques dans le compte professionnel de prévention (C2P), les moyens de les évaluer diffèrent, oscillant entre évaluation collective et/ou appréciation individuelle. 

Pour la CFDT, cette question est une priorité. Ses propositions s'articulent autour de cartographies nationales réalisées soit par la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CATMP), soit par les branches professionnelles à partir du travail qu'elles font au sein du Fonds d'investissement pour la prévention de l'usure professionnelle (Fipu), permettant ainsi d'identifier les métiers et secteurs susceptibles d'être automatiquement intégrés au C2P.

Afin de valider la fiabilité de leur dispositif, la CFDT a transmis son document à la Direction de la sécurité sociale (DSS) et à la Direction générale du travail (DGT) qui devront déterminer si leur proposition est "opérationnelle".

Pour Yvan Ricordeau le seul fait d'avoir eu "un temps aussi long pour approfondir la question de la pénibilité" est en soi un premier succès alors que cela fait 20 ans que la CFDT "bataille avec le patronat sur la prise en charge de la pénibilité". Il faut dire que Diane Milleron-Deperrois s'est dit disposée à étudier "comment on peut trouver des dispositions simples et opérationnelles".

La CPME défend quant à elle une approche plus individualisée. Si la confédération ne voit rien à redire à l'établissement d'une cartographie en mobilisant les branches professionnelles, elle souhaite que ce dispositif soit complété par l'entretien professionnel à 45 ans, assorti d'une visite médicale, prioritairement pour les salariés travaillant dans les métiers et les secteurs exposés. Ceux qui souhaiteraient continuer à exercer le même métier bénéficieraient ensuite d'un suivi adapté. A 59/60 ans, ils passeraient une visite médicale de fin de carrière afin de dresser un bilan de la prévention réalisée au cours de leur vie professionnelle. Si cette dernière s'avérait insuffisante, alors ces salariés pourraient bénéficier de dispositifs de réparation (reconversion professionnelle, temps partiel, départ à la retraite anticipé). 

La CFTC adopte une position médiane, défendant une cartographie branche par branche dans le cadre des activités du Fipu, permettant de définir les métiers et activités qui ouvriraient droit automatiquement au bénéfice du C2P pour les risques ergonomiques. "Le dispositif pourrait être complété par un entretien de mi-carrière afin d'améliorer l'individualisation de la reconnaissance de la pénibilité", explique Léonard Guillemot, en charge du financement de la protection sociale au sein de la confédération.

Christelle Thieffinne, chef de file pour la CFE-CGC, a joué les trouble-fêtes estimant irréaliste de vouloir traiter ce sujet en trois mois. "C'est un vrai sujet, celui du travail, de la responsabilité des entreprises, des conditions de travail, des fins de carrière, des seniors, qui demande plus qu'une ou deux séances de travail". Selon elle, s'il est possible de fixer les principes et les objectifs à atteindre - notamment celui de la réintégration dans le compte professionnel de prévention des trois critères ergonomiques - dans le cadre du "conclave", il faudra poursuivre les discussions bien au-delà du temps imparti.

Il n'y a pas que la pénibilité qui risque de sortir du cadre des discussions devant s'achever fin mai. Le pilotage et le financement de la protection sociale devraient subir le même sort. L'urgence étant de trouver un accord sur les points qui seront intégrés dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale : "l'amélioration des droits des femmes, l'âge de départ en retraite, l'équilibre à cinq ans, une hausse des cotisations", énumère Christelle Thieffinne.

En somme, une négociation qui n'en finira pas de finir...

Florence Mehrez
Vous aimerez aussi