Tableaux de maladies professionnelles : deux cancers supplémentaires inscrits

Tableaux de maladies professionnelles : deux cancers supplémentaires inscrits

30.06.2017

HSE

Le carcinome hépatocellulaire, couplé à une exposition professionnelle au chlorure de vinyle monomère, notamment pour fabriquer le PVC, bénéficiera de la présomption d'imputabilité. Avec ce nouveau tableau n° 52 bis, le n° 99 est aussi créé, pour une leucémie imputable au 1,3 butadiène.

Hors tableau, aucun "des gars" ne s'est lancé dans une procédure de reconnaissance, raconte Valérie Skrzypczak, infirmière de santé au travail dans une usine de fabrication de PVC. Trop long, trop compliqué. Surtout pour des personnes malades alors qu'elles sont à la retraite, la maladie pouvant survenir jusqu'à 30 ans après la fin de l'exposition. Sans compter le phénomène de déni, bien connu de l'assurance-maladie, qui fait qu'une fois retraités, les victimes peuvent avoir du mal à mettre en cause leur travail, après avoir passé parfois plusieurs dizaine d'années dans une même entreprise. Certes, le cancer, le carcinome hépatocellulaire, est là, mais c'est comme ça. "Ils n'ont pas non plus envie d'entendre que c'est parce qu'ils boivent de l'alcool et devoir se justifier là-dessus", souligne l'infirmière. Alors dans l'usine, quand elle leur rappelle l'importance de porter leurs masques pour se protéger du chlorure de vinyle monomère (CVM), "c'est bon, lui répondent-ils en souriant et en faisant les durs, j'y vais en apnée."

Cancer du foie le plus répandu

Valérie Skrzypczak espère que le tableau de maladie professionnelle, le 52 bis, pour le "carcinome hépatocellulaire provoqué par l'exposition au chlorure de vinyle monomère", va faire évoluer les mentalités et va aider à la prise de conscience. Paru au Journal officiel du 7 mai 2017, ce nouveau tableau vient compléter le n°52, qui concerne les affections provoquées par le chlorure de vinyle monomère, et inclut notamment l'angiosarcome du foie, un type de cancer très rare dans la population générale, pour lequel le lien entre l'exposition au CVM et la maladie est clair depuis longtemps. Tout le contraire du carcinome hépatocellulaire, le cancer du foie le plus répandu, qui survient souvent sur un organe déjà atteint de cirrhose, même s'il est aussi scientifiquement acquis depuis longtemps que l'exposition professionnelle au CVM est aussi un des facteurs de risques les plus importants.

Les exigences du tableau

Le tableau 52 bis doit faciliter la reconnaissance en maladie professionnelle de ce cancer. Il prévoit une présomption d'imputabilité, lorsque le carcinome hépatocellulaire, est associé à au moins deux des cinq lésions listées par le décret, justement afin de le différencier d'un carcinome hépatocellulaire d'origine non professionnelle.

Sous réserve d'une exposition d'au moins 6 mois, le délai de prise en charge – c'est-à-dire le temps écoulé entre la cessation de l'exposition au CVM et la constatation de la maladie – est fixé à 30 ans.

Quant à la liste des travaux, elle englobe tous les travaux dans les ateliers de polymérisation, remontant la chaîne du CVM jusqu'à sa fabrication, en passant par son chargement / déchargement. Le conditionnement et l'utilisation de bombes aérosols utilisant le CVM comme gaz propulseur est aussi dans la liste. Laques en coiffure, bombes insecticides, de peinture… le chlorure de vinyle monomère était en effet très largement utilisé jusqu'aux années 1970, avant d'être interdit, en France, en 1976.

"Braquer les spots sur les enjeux de prévention"

Créer un tableau pour un cancer professionnel, "c'est aussi envoyer un message aux entreprises, leur dire qu'on a bien pris en compte que telle substance est cancérogène", fait remarquer Odile Vandenberghe, médecin-conseil à la CnamTS et directrice adjointe du département des services aux assurés. "Le tableau affiche clairement le lien entre la maladie et l'exposition à l'agent chimique dangereux, cela doit les inciter à faire de la prévention." Valérie Skrzypczak, l'infirmière en santé au travail, informera les salariés de la création du tableau, et elle espère que "cette reconnaissance peut faire accélérer l'évolution des mentalités, et braquer les spots sur les enjeux de prévention".

 

Un autre cancer professionnel fait son entrée dans les tableaux : la leucémie provoquée par le 1,3-butadiène

L'assurance-maladie s'attend à "1 ou 2 cas par an", indique Odile Vandenberghe, médecin-conseil à la CnamTS, directrice adjointe du département des services aux assurés. Autant dire qu'en faisant entrer la leucémie myéloïde chronique aux tableaux des maladies professionnelles, le Coct, puis le ministère du travail, n'ont pas pris de gros risques.

En ajoutant ce tableau n° 99, tout à la fin de la liste, dénommé "hémopathies provoquées par le 1,3 butadiène et tous les produits en renfermant", ils tiennent néanmoins compte de l'évolution des connaissances scientifiques sur les pathologies associées à l’exposition à des monomères de matières plastiques, et ouvrent la possibilité d'une mise à jour qui permettrait la présomption d'imputabilité à d'autres cancers du sang.

Le délai de prise en charge, de 20 ans, n'est pas couplé à une durée minimale d'exposition, et les travaux susceptibles de provoquer les maladies sont tous ceux qui exposent ou ont exposé au 1,3-butadiène, quel que soit le niveau de cette exposition.

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Élodie Touret
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