Télétravail : l’ANDRH appelle les pouvoirs publics à adapter le code du travail

Télétravail : l’ANDRH appelle les pouvoirs publics à adapter le code du travail

19.10.2021

Gestion du personnel

Selon une enquête dévoilée hier par l’ANDRH, 15% des DRH indiquent rencontrer certaines difficultés dans la mise en œuvre de leur accord télétravail. L’association demande une adaptation du code du travail pour prendre en compte ces problématiques. Au risque sinon d’ouvrir la voie à de nouveaux contentieux juridiques.

Pour les DRH, le retour au bureau des salariés ne rime pas avec tranquillité. Car, en réactivant les accords de télétravail classique, ils doivent aujourd’hui faire face à des obstacles imprévus : 15 % d’entre eux indiquent rencontrer certaines difficultés dans l'application de leur accord, selon une enquête de l’ANDRH présentée hier et réalisée, du 22 septembre au 13 octobre, auprès de 359 répondants. Ce qui fâche? "Il y a des refus de revenir au bureau, pointe Laurence Breton Kueny, vice-présidente de l’ANDRH et DRH du groupe Afnor. Certains salariés souhaitent plus de jours de télétravail que ne prévoit l’accord et inventent n’importe quel motif pour rester chez eux". Trois points de discussion reviennent en boucle parmi les revendications : l’éligibilité des postes, le nombre de jours télétravaillables et l’indemnisation financière.

Une situation confirmée par Karine Goemaere, DRH par intérim de Swiss Life France : "le retour au bureau est un défi majeur : certains salariés ont trouvé leurs repères, apprécient le confort du travail à domicile et appréhendent de revenir sur site. Quelques irréductibles considèrent même le télétravail comme un acquis social".

Le problème des trajets domicile-travail

Et ce n’est pas le seul problème auquel ils doivent faire face : la crise a accentué les mobilités géographiques et l’employeur est désormais sommé de rembourser les frais de transports publics à hauteur de 50 %, que l’on soit à Marseille, Lille ou Paris. "Or, nous n’avions pas prévu ces déménagements dans nos budgets, alerte Audrey Richard, la présidente de l’ANDRH, DRH du groupe Up. Ces salariés nous mettent en difficulté et ce phénomène ne peut que s’accentuer". L’employeur ne pouvant intégrer dans les contrats de travail une clause de résidence, jugée illégale car préjudiciable à leur vie privée et familiale.

De quoi mettre à mal l’organisation hybride que les DRH peaufinent depuis plusieurs mois : "En tant que RH, nous ne pouvons pas gérer une somme de situations individuelles, poursuit Audrey Richard. Nous nous sommes donc fixés des règles claires : l’application des accords de télétravail en vigueur. La plupart propose deux à trois jours de présentiel par semaine. Ce qui parait peu compatible avec un lieu de résidence trop éloigné de l’entreprise sauf à enchaîner de longs trajets plutôt épuisants".

"Notre priorité est de maintenir les collectifs de travail, complète Laurence Breton Kueny. Il y a un impératif organisationnel à respecter".

Pas question, en effet, pour l’ANDRH de favoriser le développement du "full remote", ou télétravail à 100 % qui pourrait, selon Benoît Serre, vice-président délégué de l'ANDRH et DRH de L’Oréal France, "ouvrir la porte à la délocalisation des emplois dans le cadre de la mondialisation des compétences". Le fait de travailler à distance fait peser, selon lui, un risque de suppression de poste.

Zones grises

D’où la nécessité pour l’ANDRH d’adapter le code du travail pour tenir compte des spécificités du télétravail. Des ajustements sont nécessaires. De fait, selon l’association, le droit actuel ne pare à toutes les problématiques générées par le travail à distance.

Primo, elle demande au législateur de se positionner en matière de prise en charge des trajets travail-domicile. Secundo, "nous souhaitons que le code du travail soit plus adapté aux nouvelles responsabilités de l’employeur par rapport au lieu d’exercice du télétravail, poursuit Laurence Breton Kueny. Car comment s’assurer de la conformité du lieu de travail du salarié lorsqu’il s’agit de son domicile ? Nous n’avons aucune vision de son environnement de travail". Et quid des accidents du travail ? "La responsabilité de l’employeur est là encore mise en jeu". Tertio, le calcul de la durée du travail pose également problème quand le salarié n’est pas dans les murs dans l’entreprise. L’employeur doit-il placer ses collaborateurs sous surveillance ? "Nous demandons l’extension du forfait jours pour permettre aux salariés d’organiser le travail à distance comme ils le souhaitent", indique Benoît Serre. Le travail à domicile faisant voler en éclat les horaires de travail.

Vers un droit du télétravail ?

Face à ces zones grises, l’ANDRH, opposée à l’ANI télétravail de novembre dernier, appelle donc les pouvoirs publics à se saisir au plus vite du télétravail pour adapter le code du travail. "Il y a une vraie réflexion à mener, au risque sinon d’être confronté à une grande instabilité juridique", alerte Benoît Serre qui rappelle "le code du travail a été conçu à une époque où le télétravail n’existait pas".

Des revendications déjà portées par Jean-Emmanuel Ray, professeur à Paris I-Sorbonne et directeur du master 2 en apprentissage "DRH et Droit social", de Michel Morand, avocat associé au cabinet HDV Avocats ou encore par Dominique Laurent, DRH de Schneider Electric…

 

NAO : des augmentations mais pas pour tous

Avec l’ouverture des négociations annuelles obligatoires, les DRH sont sous pression : car avec la reprise économique, syndicats et salariés revendiquent le partage des fruits de la croissance. Mais les augmentations de salaire parviendront-elles à compenser l’inflation (1,9 % sur un an en août) et l’envolée des prix sur l’énergie ? C’est là que le bât blesse. Car les marges de manœuvre sont étroites. D’autant que "toutes les entreprises ne sont pas en grand forme après la crise et que certaines doivent faire face à des difficultés d’approvisionnement", rappelle Benoît Serre, vice-président délégué de l’ANDRH qui souligne que "cette question va avoir un impact sur les négociations".

Résultat ? Tous les salariés ne seront pas logés à la même enseigne. La priorité sera donnée aux augmentations individuelles, via notamment des primes sur objectifs pour récompenser la performance, des revalorisations salariales pour les métiers pénuriques ainsi que des augmentations de salaire pour les salariés peu ou pas qualifiés. Toutefois, pour l’ANDRH, d’autres leviers financiers existent pour sortir de "ce cadre trop restreint des augmentations collectives et individuelles". A commencer par l’intéressement, la participation et l’épargne salariale, qui peuvent faciliter une redistribution plus large de la valeur ajoutée. "Le gouvernement pourrait d’ailleurs nous y aider, en supprimant le forfait-social (pour toutes les entreprises et non uniquement pour sociétés de moins de 250 salariés comme le prévoit la loi Pacte) ou encore la TVA sur certains produits", suggère Audrey Richard, la présidente de l’association. Un coup de pouce qui serait, à ses yeux, le bienvenu : près de la moitié des répondants envisage de faire évoluer leur politique de rémunération dans les prochains mois, selon l’enquête de l’association.

 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Anne Bariet
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