Trois DRH face au défi de la crise sanitaire

Trois DRH face au défi de la crise sanitaire

26.03.2020

Gestion du personnel

Passée l’urgence, la priorité de ces professionnels RH est désormais d’assurer coûte que coûte la continuité de service et de gérer le moral des salariés en télétravail. L’épidémie de coronavirus a bouleversé le quotidien des entreprises. Un tournant historique dans la gestion des RH. Trois DRH témoignent à distance.

Sites désertés, bureaux vidés, projets reportés, réunions régulières annulées… "C’est un moment très, très étrange", confiait Valérie Sclavon-Perronnet, directrice des ressources humaines du groupe Macif (11 000 salariés), à l’issue de la première semaine de confinement. Mais cette inertie n’est qu'une apparence. Car pour les professionnels RH, il n’y a jamais eu autant de réunions : cellule de crise francophone voire internationale, Codir, Comex, comités RH pour réunir l’ensemble des DRH métiers… "Nous sommes dans une gestion de crise absolue et fortement mobilisés". Des décisions "vitales" sont prises au jour le jour, en fonction de l’urgence et des instructions gouvernementales. Avec un maître-mot :  assurer coûte que coûte la continuité de service.

Télétravail déployé à grande échelle

Dès le lundi 16 décembre, jour de fermeture des écoles, la Macif a décidé d'arrêter l'activité de l'ensemble de ses sites à partir de 18h. Ici, chez l'assureur comme chez Altaprofits (épargne en ligne) et chez NetApp (services de données dans le cloud), les salariés sont en télétravail. "Le mot d’ordre a été passé, on ne veut plus voir personne, indique Cécile Poisson, DRH d'Altaprofits (60 salariés). Les salariés sont partis chez eux avec un téléphone portable et pour certains un second écran". La DRH, de son côté, a pris "l’imprimante, une ramette de papier et le tampon de la société".

Tous ont eu un avant-goût de ce mode de travail pendant les grèves de décembre. "Mais pour une petite partie des effectifs, observe Cécile Poisson. Cette fois, le télétravail a été déployé à grande échelle et dans un temps record pour pallier l’interdiction de se déplacer". Un véritable challenge. Il a fallu mettre les services informatiques en ordre de marche pour assurer les bonnes connexions à distance. Avec plus ou moins de succès. Le CSE a été consulté en urgence. Seuls quelques salariés considérés comme indispensables dans les plans de continuité d’activité sont autorisés à venir travailler au siège de l’entreprise.

Avec des consignes strictes, celles de respecter les "gestes barrières". Chez Altaprofits, quatre personnes, deux informaticiens et deux assistants "middle office" chargés de récupérer les courriers doivent se rendre chaque jour sur leur lieu de travail. "On a souhaité qu’ils se déplacent en binôme pour que ce soit moins anxiogène", poursuit la DRH.

Des autorisations de déplacements dérogatoires ont été préparées rapidement.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Jongler avec les différentes contraintes

Contrairement à la Macif, aucun accord de télétravail n’a été négocié chez Altaprofits et chez NetApp. "Les grèves de décembre nous ont permis de roder cette organisation, assure Atika Salaf, la DRH de l’entreprise informatique (155 salariés en France, 11 000 dans le monde). Nous mettons en avant la flexibilité".

"Le sujet était en réflexion. Mais nous avons communiqué sur les bonnes pratiques à adopter", renchérit Cécile Poisson. Car outre les bugs informatiques, le télétravail à la maison, aux côtés des enfants, s’avère parfois périlleux. D’où la nécessité d’accorder une certaine souplesse. "Par exemple, ceux qui ont des enfants peuvent travailler de manière décalée, le matin ou le soir. L’idée est de faire au mieux en jonglant avec les différentes contraintes".

Dispenses d’activité

Tous les salariés ne répondent pas à l’appel. Certains gardent leurs enfants, d’autres sont en arrêt maladie voire en dispense d’activité. "Il s’agit de personnes fragiles, de salariés aidants ou encore de collaborateurs qui ne peuvent pas télétravailler", indique Valérie Sclavon-Perronnet. Ils sont donc dispensés de travailler "jusqu’à nouvel ordre" mais "conservent leur rémunération". Leur nombre n’a pas été communiqué. A la Macif, une permanence RH, via un numéro vert, a été constituée dès le début de la crise pour répondre aux sollicitations des salariés.

Conserver une dynamique de travail

Mais passé le rush, il s’agit désormais de tenir. Car après deux semaines de confinement, la priorité est de gérer le moral des troupes. Les DRH le savent, la grande difficulté va être de conserver une dynamique de travail sur le long terme. "C’est un peu comme un marathon. Le plus dur sera de passer le trentième kilomètre, il y aura des caps très difficiles à franchir avec des chutes de tension, prévient Atika Salaf. D’autant que le contexte est anxiogène et que les salariés travaillent parfois dans des environnements nerveusement difficiles". La DRH a décidé de mettre en place des "cafés virtuels" plusieurs fois par semaine en visio-conférence. Un rituel qui permet de rythmer la journée et humaniser cette relation à distance. "Le travail nous aide à penser à autre chose. Car sans parler de psychose, ce climat est angoissant. Il faut garder le lien avec les collaborateurs, mobiliser. Ces moments nous permettent de parler des objectifs de la journée, de donner des nouvelles… Il faut recréer un collectif de travail".

Consigne a également été donnée aux managers "de créer du liant, en étant à l’écoute. On sait tous que ça va être durer". Avec à la clef, "des feed-backs réguliers".

Détecter les signaux faibles

Objectifs ? Détecter les signaux faibles. Car sans lien avec l’extérieur, le télétravail est, de fait, porteur de risques psychosociaux à prendre très au sérieux. "C’est un point de vigilance, abonde Cécile Poisson. Il faut s’assurer que personne ne reste isolée. Nous faisons des points réguliers. On utilise une messagerie instantanée, ça permet de recréer une ambiance de travail .

Valérie Sclavon-Perronnet salue, de son côté, le niveau d’engagement des équipes. "Malgré ce contexte insolite, la plupart des collaborateurs mettent tout en œuvre pour assurer la continuité de service".

Cette nouvelle façon de travailler va aussi être l’occasion pour les DRH d’avancer sur des "des sujets de fond". Cécile Poisson va profiter de son confinement pour mettre à plat les régimes de santé et plancher sur des accords d’entreprise dont un sur le télétravail.

Si le recours à l’activité partielle semble pas d’actualité, personne n’écarte cette éventualité. Cette période est inédite et marque un tournant historique dans la gestion RH.

Anne Bariet
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