Un garagiste titulaire d'une cession de créance de l'assuré est recevable à agir contre l'assureur

11.08.2020

Gestion d'entreprise

Est cassé l'arrêt lui déniant toute qualité pour agir du fait que la cession de créance ne lui donne pas le droit de percevoir la différence entre l'indemnisation due par l'assureur et sa facture.

Un garagiste établit un devis de 8 258,73 € pour la réparation d’un véhicule endommagé dans un accident de la circulation, alors que l’expert mandaté par l’assureur du véhicule a chiffré le coût des réparations à la somme de 7 104,33 €. Le propriétaire assuré fait appel à son propre expert qui fixe les réparations à la somme de 8 258,72 €. Il fait réaliser les travaux sur cette base par le garagiste et cède à ce dernier sa créance envers l’assureur. Celui-ci ne règle au garagiste que 6 873,93 €, compte tenu d’une franchise de 300 €. Le garagiste assigne alors l’assureur en paiement du solde de la facture de réparation, soit 1 084,40 €.
Remarque : selon l’acte de cession de créance (art. 4), « les parties reconnaissent que le montant de la cession de créance sera déterminé en fonction de l’indemnité due par la société d’assurances dans le cadre de la prise en charge du sinistre et conformément à la police d’assurances souscrite entre le client et son assureur, que le montant de cette créance viendra en déduction du montant total de la facture du réparateur, et, qu’en cas de différence éventuelle entre le montant de la créance et le montant total de la facture du réparateur, le solde restant dû restera à la charge du client ».
La cour d’appel en déduit que le garagiste était seulement investi du droit de percevoir de l’assureur le montant de l’indemnisation en exécution de la police, mais non la différence entre cette indemnisation et sa facture. Puisque celui-ci avait reçu de l’assureur un chèque de 6 873,93 €, correspondant aux conclusions de l’expert mandaté par celui-ci, il n’a pas qualité à agir contre lui. Son arrêt est cassé pour violation de l’article 31 du code de procédure civile, aux termes duquel l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention. Selon la Cour de cassation, « l’existence du droit invoqué par le demandeur n’est pas une condition de recevabilité de son action, mais de son succès ».
Remarque : encore une décision qui confond l’irrecevabilité de l’action en justice pour défaut de qualité à agir avec le bien-fondé de l’action. En effet, l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action (Cass. 1re civ., 27 nov. 2019, n° 18-21.532, n° 1005 P + B + I). En l’espèce, l’action en justice du garagiste était bien recevable, en raison de la cession de créance dont il bénéficiait. Il appartenait donc au juge de se prononcer sur le bien-fondé de sa demande, soit en la rejetant (parce que la somme réglée par l’assureur correspondait à l’estimation de son expert), soit en l’admettant en tout ou partie (parce que cette estimation avait sous-évalué le montant réel des réparations).
James Landel, Conseiller scientifique du Dictionnaire Permanent Assurances

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