Fondé en 2015, Ça compte pour moi a été, en France, l'un des premiers cabinets comptables positionnés 100 % en ligne. Dix ans après, quel bilan tirer de ce modèle ? Les réponses de Mathieu Chauveau, CEO de cette structure.
Le bilan est que la cible était la bonne puisque c'est toujours la même aujourd'hui. Nos clients sont effectivement des TPE, plutôt des indépendants, qui tiennent une comptabilité de trésorerie. Mais cela a évolué vers d'autres types d'entreprises qui étaient des TPE au départ et qui sont devenus des PME qu'on continue d'accompagner. On a donc dû s'adapter durant ces 10 ans pour pouvoir proposer des solutions à une autre typologie de clientèle.
En 2015, nous sommes partis de zéro même si on était incubé par le groupe CF. Aujourd’hui, nous sommes un peu plus de 90 collaborateurs et on accompagne 4 500 clients dans toute la France, y compris dans les Dom-Tom, avec une relation à 100 % dématérialisée. L’épisode de la Covid a accéléré notre croissance sur les 4 ou 5 dernières années.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

Oui. C’est quelque chose qu'on ne faisait pas au départ mais qu’on réalise désormais. Cela reste minime car cela concerne à peu près 200 clients sur 4500. Par contre, en termes d'honoraires et de marges, cela pèse davantage car les missions sont différentes. Et c’est réalisé avec une équipe, un logiciel et des process différents. On prend aussi des nouveaux clients en comptabilité d’engagements.
Pas dans les grandes lignes. La promesse et l’offre restent les mêmes dans leur ensemble. Mais au plan commercial, cela a évolué. Aujourd’hui, notre approche en matière de prix et de services se positionne plutôt, parmi les cabinets en ligne, en tant que premium.
C'est-à-dire que la plupart des cabinets en ligne, en tous cas parmi nos concurrents les plus importants, ont aujourd'hui une approche très centrée sur le prix et sur le volume. Notre choix est un peu différent. Nos prix sont un petit peu plus élevés que nos concurrents parce que notre accompagnement est un peu plus complet. On ne se contente pas de faire des liasses fiscales. Un collaborateur est dédié au client. Et des experts-comptables interviennent aussi sur les dossiers pour réaliser des montages structurés.

On accompagne vraiment nos clients. C’est ce qui nous différencie des autres cabinets en ligne. Notre approche se situe à mi-chemin entre le cabinet en ligne et le cabinet de proximité physique. On est à la jonction des deux mondes. On apporte au client les bienfaits de la dématérialisation tout en ayant quand même un accompagnement humain et du conseil pour qu’il mène à bien son activité.
C'est vrai que c'est variable. Les principaux arguments qui ressortent sont effectivement les bienfaits du en ligne. Même si la profession se digitalise de plus en plus, il y a quand même encore des clients qui ne trouvent pas chaussures à leurs pieds sur ce point-là avec les cabinets de proximité physique autour d'eux.

Ensuite — cela concerne aussi le point digital — c’est la relation dans le sens où on a beaucoup de clients plutôt urbains qui ne veulent pas se déplacer. Cela s’est accéléré avec la Covid. Tout le monde s'est rendu compte que finalement, en visio, on peut faire plein de choses à distance. On a des clients qui veulent aussi une relation à distance parce qu'elle sera plus fluide et plus simple.
Et puis, on intervient beaucoup sur recommandation. 40% de nos nouveaux clients sont recommandés par d'autres clients. Cela signifie qu'on a des clients qui sont satisfaits de notre accompagnement et qui, du coup, en parlent à d'autres qui n'auraient pas forcément choisi un cabinet en ligne mais qui, par cette recommandation, viennent chez nous.

Il y a effectivement aussi l'aspect tarif. Notamment par rapport à certains cabinets de proximité qui, peut-être en raison de la taille des clients, soit ne les prendraient pas soit leur proposeraient un ticket d'entrée un peu élevé. Nous avons des tout petits clients qui s'y retrouvent. On a un tarif adapté à leur budget même pour ceux qui réalisent 50 000 euros de chiffre d'affaires.
Dans notre schéma, on ne va pas se cannibaliser au sein de la profession et prendre des clients dans des cabinets de proximité physique. On va plutôt aller chercher des clients qui n'auraient pas eu peut-être d'experts-comptables et qui auraient soit utilisé un logiciel soit se seraient débrouillés par eux-mêmes et n'auraient pas forcément fait des choses très carrées.
On en a quelques-uns mais c’est à la marge. C’est une cible qu'on a essayé plusieurs fois d’atteindre mais qui est très particulière. Elle est très sensible au prix. C'est quasiment impossible sur des tarifs aussi bas de proposer un accompagnement humain. Il leur faut plutôt un logiciel avec peut-être aujourd'hui l’aide de l'intelligence artificielle pour répondre à leurs besoins.
On était assez contents que les seuils baissent. Ça nous permettait de potentiellement viser plus large. Souvent, les micro-entreprises basculent quand elles passent les seuils de la TVA. Ce qui nous intéresse, c’est de capter des entreprises qui ont vocation à faire grandir leur activité pour ensuite passer au régime réel. Cette réforme irait dans le bon sens pour la profession en général.
Un peu plus de 60% de nos clients sont en Île-de-France alors que nous sommes basés à Toulouse ! Et le trajet entre Paris et Toulouse est encore compliqué en train. Cela rejoint le fait que notre clientèle est plutôt urbaine.

Pour autant, la deuxième grosse région de notre clientèle est toulousaine. Cela tient à notre petite notoriété locale qui nous permet d'avoir aussi des clients du coin même si c’est extrêmement rare qu’un client vienne [à notre cabinet].
On a un peu de clients de la région bordelaise. Et, à l’inverse de la clientèle urbaine, on a une part importante de clients qui est très éloignée des centres villes. Ce sont des clients qui n’ont pas d'expert-comptable à proximité de chez eux à la campagne.
Comme on a fait partie du groupe CF nos comptes sont obligatoirement publics. On clôture au 30 juin. Au 30 juin 2025, on devrait réaliser pas loin de 8 millions d’euros de chiffres d'affaires. On s'est donné l'objectif de faire 10 millions d’euros d'ici le 30 juin 2027, soit une progression d'à peu près 1 million d'euros par an sachant que ce n'est que de la croissance organique. On n'a jamais fait de rachat de cabinet ou de clientèle. Ce n'est pas dans l'objectif tant qu'on arrive à avoir la croissance organique de cette manière-là. Pour autant on investit.
Non car c'est un peu compliqué. Le résultat est public mais ne reflète pas vraiment la rentabilité du cabinet du fait de l’organisation interne au groupe.
Il l’est. Depuis 2017, nous sommes positifs malgré un investissement assez important sur les aspects marketing et commercial. Notre rentabilité est proche de celle des cabinets de notre taille.
Vous avez tout à fait raison. Aujourd’hui, c'est encore largement une force car on a une avance là-dessus. Et elle va le rester encore pendant quelques années. Il y a une certaine inertie face à nous car il y a soit des gros groupes qui mettent du temps à mettre en place des process soit des petits cabinets pour qui c'est coûteux et compliqué de mettre en place ce type d'outils.
Par contre, il ne faut pas nous reposer sur nos lauriers. On réfléchit à mettre en place certaines choses, notamment avec l’arrivée de la facture électronique, pour garder notre avantage concurrentiel. Je suis optimiste sur ce point-là.
Totalement. C’est ce que nous disent des collaborateurs comptables quelques mois après leur recrutement. Ils sont étonnés d’avoir davantage de relation avec les clients que lorsqu’ils travaillaient dans un cabinet de proximité. Parce que la relation avec les clients est plus fluide et plus fréquente. Il n'y a pas de rendez-vous à prendre, il n’y a pas à se déplacer, etc. Et du temps est gagné sur les tâches administratives automatisées par les aspects digitaux.
Cela dépend des situations. Mais c'est principalement par mail. C'est le moyen que privilégient les clients parce que c'est un échange asynchrone. Le client peut envoyer son mail quand ça lui va bien et lire notre réponse quand il est disponible.
Il y a aussi le téléphone. Et la visio quand il faut faire un rendez-vous qui nécessite un peu plus de temps. Ces trois modes fonctionnent aujourd’hui.
La visio, c'est déjà pour les rendez-vous bilan traditionnels que l’on fait même si on est un cabinet en ligne. Il y a aussi des visio pour des rendez-vous plutôt de conseil sur des sujets tels que la création d’entreprise, la fermeture d’entreprise, la vente d’entreprise ou l’usage d’une trésorerie excédentaire. Bref, pour tout ce qui est un peu plus exceptionnel.

Et chez nous, on part du principe que, quel que soit le mode de communication, c’est le collaborateur qui répond au client. A moins qu’il ne soit en limite de compétence auquel cas c'est son manager qui prend le relais. Et si le manager est en limite de compétence, c'est l'expert-comptable qui intervient.
C'est un sujet de réflexion pour Ça compte pour moi et plus largement pour le groupe CF. Je me doute que l’interopérabilité ne va pas bien fonctionner du premier coup. D'expérience, on connaît bien ce genre de choses.

Il y a plus de 80 PDP [avec une immatriculation provisoire] — c'est toujours mieux que ce soit des opérateurs privés plutôt que l'État — avec des horizons très différents, des logiciels de comptabilité, des banques, des distributeurs. Notre stratégie, c'est de limiter au maximum les PDP différentes utilisées par nos clients et d'être en mesure de pouvoir leur proposer une PDP de manière anticipée. C'est pour ça qu'on y réfléchit dès maintenant. L'avantage qu'on a, avec notre typologie de clients, c’est d’avoir un fort pouvoir de persuasion sur ce type de choix. Les TPE ne vont pas trop chercher à se creuser la tête sur le sujet.
(*) cette interview a été réalisée le 4 juin, c’est-à-dire 2 jours après que l’Assemblée nationale ait adopté une proposition de loi destinée à rétablir les anciens seuils de franchise de TVA (lire notre article)
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