Une SAS non engagée par un contrat conclu en son nom par une préposée

31.03.2025

Gestion d'entreprise

Un contrat conclu par une assistante administrative salariée d'une SAS n'a pas engagé celle-ci, la remise du RIB et d'une ancienne facture de la société ainsi que l'apposition du tampon de la société sur plusieurs documents n'ayant pas suffi à établir l'existence d'un mandat apparent.

Une employée d’une SAS, assistante administrative des ventes en période d’essai, signe au profit de la société un contrat de prestation de télécommunication. Après la résiliation du contrat par la SAS, la société prestataire assigne celle-ci au titre des factures impayées et sollicite des indemnités de résiliation.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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La SAS reproche à la cour d’appel de faire droit à ces demandes. Elle estime que la théorie du mandat apparent ne pouvait pas être appliquée en l’espèce.

Elle observe d’abord que le cocontractant de la SAS était également une SAS et savait donc que seul le président peut, sauf délégation de pouvoir, inexistante en l’espèce, représenter la société à l’égard des tiers, de sorte qu’il aurait dû vérifier les pouvoirs de l’intéressée. Argument rejeté par la Cour de cassation : « le fait qu’une société par actions simplifiée ne soit, sauf délégation de pouvoir, représentée à l'égard des tiers que par son président n'est pas de nature à priver le tiers de la possibilité d'invoquer l'existence d'un mandat apparent ».

La SAS fait ensuite valoir que la signature d’une autorisation de prélèvement, la communication d’un RIB et d’une ancienne facture au nom de la SAS et l’apposition d’un tampon humide de la société sur les documents présentés n’étaient pas de nature à caractériser les circonstances autorisant à dispenser le cocontractant de toute vérification des pouvoirs. La Cour de cassation valide cette fois cet argument, après avoir rappelé que, selon l’article 1985 du code civil, « une personne ne peut être engagée sur le fondement d'un mandat apparent que lorsque la croyance du tiers aux pouvoirs du prétendu mandataire a été légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient ce tiers à ne pas vérifier lesdits pouvoirs ».

Faute d’avoir été régulièrement engagée et en l’absence de mandat apparent, la SAS est dispensée d’acquitter les factures litigieuses.

Rappel de la possibilité de recourir au mandat apparent en matière sociétaire

Même si les fonctions d’un dirigeant sont soumises à une publicité légale, accessible en consultant le K bis, cela ne suffit pas à exclure que la société puisse être engagée sur le fondement d’un mandat apparent (Cass. com., 9 mars 2022, n° 19-25.704 : Elnet, 22 avr. 2022, K. Rodriguez). Il ressort de l’arrêt commenté que ce principe, affirmée à propos d’une SARL, vaut pour une SAS, peu important, par ailleurs, que le cocontractant lésé soit présumé avoir connaissance des modalités légales de représentation de la SAS du fait qu’il en est une lui-même.

Absence de circonstances autorisant le tiers à se dispenser de vérifications

La théorie de l’apparence, appliquée de longue date, est désormais consacrée à l’article 1156 du code civil qui prévoit qu’elle ne peut jouer que « si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté. », ce qui fait écho à la formule rappelée par la Cour et jusqu’à présent appliquée. L’existence de circonstances autorisant le tiers à se dispenser de la vérification des pouvoirs est appréciée souverainement par les juges. Si la jurisprudence peut ponctuellement faire preuve de souplesse dans cette appréciation, notamment lorsque le tampon de la société est utilisé pour signer un contrat habituel de faible montant (Com. 14 mars 2006, n° 04-10.718), la tendance est plutôt à la sévérité (Cass. com., 26 nov. 1996, n° 94-19.171 ; Cass. com., 19 janv. 2016, n° 14-11.604), ce qu’illustre la solution commentée, les sommes en jeu atteignant à peine 3 000 euros.

Adeline Thobie, Maître de conférences en droit privé à l’Institut d’Études Politiques de Rennes, Membre du Centre de droit des affaires de la Faculté de droit de Rennes
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