Le tribunal judiciaire de Paris vient de rendre une décision contraire à celle prononcée le 10 mars dernier par les juges de Nanterre. Il estime que les télétravailleurs, comme les salariés continuant à travailler sur site pendant l'épidémie, doivent continuer à bénéficier des titres-restaurant.
Le 10 mars dernier, le tribunal judiciaire de Nanterre a écarté le bénéfice des titres-restaurant pour les salariés placés en télétravail à la suite de l'épidémie de Covid-19. Les juges ont ainsi validé la possibilité d'attribuer des tickets-restaurant aux seuls salariés affectés sur un site non doté d’un restaurant d’entreprise. Le tribunal judiciaire de Paris, dans un jugement rendu hier, adopte une position contraire.
Dans l'affaire en cause, les salariés de la société Schlumberger bénéficiaient de tickets-restaurant papier jusqu'à leur placement en télétravail - pour la majeure partie d'entre eux - à compter du 17 mars 2020 en raison de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19. Par courriel du 20 avril 2020, ils sont informés de la décision de la société de réserver l'attribution des titres restaurant aux seuls employés travaillant sur site et non à ceux exerçant leur activité en télétravail. Le CSE a fait part de son désaccord quant à cette position qui méconnaitrait l’égalité de traitement entre les salariés et a saisi le tribunal judiciaire.
La société invoquait plusieurs arguments pour justifier sa décision et la différence de traitement qui en découlait. D'une part, soutenait-elle, "le titre-restaurant a pour objectif de permettre au salarié de se restaurer lorsque celui-ci ne dispose pas d’un espace pour préparer son repas, ce qui s’accorde peu avec le salarié en télétravail qui dispose de sa cuisine personnelle et qui n’a donc pas à se limiter à des plats immédiatement consommables". D'autre part, "si le télétravailleur fait le choix de ne pas travailler depuis son domicile mais depuis un autre lieu, par exemple un espace de co-working, cela ne résulte que de ses convenances personnelles et ne saurait lui créer le moindre droit vis-à-vis de son employeur". Enfin, l'employeur estimait que "le salarié ne peut pas utiliser un titre-restaurant pour acheter autre chose qu’un repas en restaurant, ou un repas directement consommable (même si celui-ci doit être décongelé) ou des fruits et légumes même non directement consommables, ce qui exclut que le salarié s'en serve pour financer ses courses de la semaine".
Gestion du personnel
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- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
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Autant d'arguments balayés par le tribunal judiciaire de Paris qui ne permettent pas de fonder cette atteinte au principe d'égalité de traitement entre les salariés.
"D'une part, aux termes mêmes de l'article L.1222-9 du code du travail, le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail effectué par un salarié hors des locaux de l'employeur qui utilise les technologies de l'information et de la communication, ce qui n'implique pas pour le salarié de se trouver à son domicile ni de disposer d'un espace personnel pour préparer son repas. En outre, d'autre part, l'objet du titre-restaurant est de permettre au salarié de se restaurer lorsqu'il accomplit son horaire de travail journalier comprenant un repas, mais non sous condition qu'il ne dispose pas d'un espace personnel pour préparer celui-ci".
Les juges rappellent en outre les dispositions de l'article L.3262-1 du code du travail selon lesquelles "le titre-restaurant est un titre spécial de paiement remis par l'employeur aux salariés pour leur permettre d'acquitter en tout ou en partie le prix du repas consommé au restaurant ou acheté auprès d'une personne ou d'un organisme mentionné au deuxième alinéa de l'article L.3262-3. Ce repas peut être composé de fruits et légumes, qu'ils soient ou non directement consommables. (...)" et de l'article R.3262-7 qui dispose que : "Un même salarié ne peut recevoir qu'un titre-restaurant par repas compris dans son horaire de travail journalier".
Ces dispositions "s'appliquent aux entreprises qui ont fait le choix de distribuer des titres restaurant aux salariés, ce qui est bien le cas en l'espèce (...) et dans cette hypothèse, le texte réglementaire prévoit qu'un même salarié « ne peut » recevoir qu'un titre-restaurant par repas compris dans son horaire de travail journalier, ce qui n'autorise pas l'employeur, faute pour le gouvernement d'avoir utilisé le verbe « devoir », de déterminer librement parmi les salariés lesquels peuvent bénéficier de cet avantage en nature".
Enfin, les juges rejettent le dernier argument opposé par l'employeur. "Au contraire de ce qui est soutenu par l'employeur, les conditions d'utilisation des titres restaurant sont tout à fait compatibles avec l'exécution des fonctions en télétravail puisqu'elles ont pour principe directeur de permettre au salarié de se restaurer lorsque son temps de travail comprend un repas, et qu'à ce titre les télétravailleurs se trouvent dans une situation équivalente à celle des salariés sur site".
Au passage, les juges ajoutent deux autres éléments plus récents en faveur de leur démonstration. D'une part, l'ANI du 26 novembre 2020 qui "ne comporte aucune mention expresse quant à la restauration des salariés en télétravail" et "ne saurait permettre de conclure que l'employeur ne dispose d'aucune obligation d'attribuer des tickets restaurant aux salariés en télétravail". D'autre part, le questions-réponses du ministère du travail sur le télétravail du 20 mars 2020 dans lequel "il a été indiqué que « dès lors que les salariés exerçant leur activité dans les locaux de l’entreprise bénéficient des titres-restaurant, les télétravailleurs doivent aussi en recevoir si leurs conditions de travail sont équivalentes »".
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