Validation des tarifs des professions réglementées

19.06.2017

Gestion d'entreprise

Les tarifs issus des textes de 2016 sont validés par le Conseil d'état. Toutefois, leur révision prévue à échéance de 2 ans pourrait être retardée.

Les représentants des professions juridiques et judiciaires, des greffiers, notaires, huissiers de justice, administrateurs et mandataires judiciaires ont demandé au Conseil d’Etat l’annulation du décret n° 2016-230 du 26 février 2016 ainsi que des différents arrêtés du 26 février 2016 fixant les tarifs réglementés à la suite de la loi « Macron » n° 2015-990 du 6 août 2015. Le Conseil d’état rejette l’ensemble des critiques présentées dans les différentes requêtes. En revanche, il annule l’article R. 444-21 du code de commerce relatif aux modalités de transmission des informations statistiques nécessaires à la fixation de la prochaine réglementation tarifaire.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Fixation des tarifs
La péréquation n’est pas incompatible avec les coûts pertinents et la rémunération raisonnable

En vue de favoriser l’accès aux prestations et l’installation sur l’ensemble du territoire des professionnels, la méthode de fixation des tarifs repose sur une péréquation de l’ensemble des prestations plutôt qu’une fixation des tarifs par acte. Le décret n° 2016-230 du 26 février 2016 donne la définition des coûts pertinents, des caractéristiques de la péréquation et de la rémunération raisonnable (C. com., art. R. 444-5, R. 444-6 et R. 444-7).

Pour les requérants, ces dispositions méconnaissent l'article L. 444-2 du code de commerce dans la mesure où elles permettent que les tarifs des prestations ne couvrent pas systématiquement le coût du service rendu et qu’elles n'assurent pas une rémunération raisonnable.

Hors, ce même article L. 444-2, alinéa 2 précise bien que, par dérogation, les tarifs peuvent être fixés en tenant compte d'une péréquation entre les différentes prestations en cause. Le Conseil d’état écarte donc ce moyen (point 5). Il résulte des travaux parlementaires que le législateur a entendu permettre la fixation du tarif de certaines prestations en deçà du prix nécessaire à la couverture des coûts pertinents et d'une rémunération raisonnable. Cette possibilité n’est envisageable qu’à partir du moment où une rémunération globale raisonnable est garantie aux professionnels concernés. Celle-ci résulte de la péréquation entre les actes d'un même professionnel et de  la redistribution entre professionnels par le fonds interprofessionnel d'accès au droit et à la justice.

La limitation des taux de remise n’est pas entachée d’erreur manifeste

La possibilité pour les professionnels de consentir des remises sur leurs émoluments proportionnels est une nouveauté de la réforme « Macron » (C. com. art. L. 444-2). Elle est, toutefois, très encadrée par l’article R. 444-10 du code de commerce. Il prévoit un taux de remise ne pouvant excéder 10 % porté à 40% pour certaines prestations afférentes à une transaction relative à un bien ou à un droit portant sur un immeuble.

Le Conseil d'état décide que les contestations relatives aux dispositions de l'article L. 444-2 du code de commerce ne lui être soumises, en dehors de la procédure de la QPC prévue à l'article 61-1 de la Constitution (point 13). Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que les limites aux taux de ces remises prévues par l'article R. 444-10 du code de commerce seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation (point 14).

La limitation de la majoration pour urgence ne méconnaît pas les principes de coûts pertinents et de rémunération raisonnable

Le décret du 26 février 2017 autorise la mise en place de majorations des émoluments dus au titre de prestations déterminées dans l’hypothèse où, à la demande du client et pour des raisons justifiées par la nécessité de la sauvegarde d’un droit, d’un bien ou d’une preuve (C. com., art. L. 444-3), le professionnel réalise la prestation dans un délai inférieur à un délai de référence défini par arrêté.

L'article R. 444-11 du code de commerce précise que cette majoration ne peut excéder 150 euros ou, si le montant de l'émolument dépasse 500 euros, 30 % de cet émolument, En limitant le surcoût entraîné par une prestation exécutée en urgence et la rémunération raisonnable supplémentaire correspondante, le décret attaqué n'a pas méconnu pour le Conseil d’état, le principe d'une tarification fondée sur les coûts pertinents du service rendu et une rémunération raisonnable prévu au premier alinéa de l'article L. 444-2 du même code (point 15).

Révision des tarifs
L’allongement de la période de tarifs transitoires par décret est légal

La fixation des tarifs conjointement par les ministres de la justice et de l'économie doivent être établis sur le fondement de données et informations statistiques portant sur la comptabilité des offices et des études recueillies en application des articles L. 444-3 et L. 444-5 du code de commerce. En outre, le IV de l'article 50 de la loi du 6 août 2015 avait prévu que l'article 1er  de la loi du 29 mars 1944 relative aux tarifs des émoluments alloués aux officiers publics ou ministériels, sur la base duquel étaient pris jusqu'alors les décrets fixant les tarifs de ces émoluments, serait abrogé à une date fixée par décret et au plus tard à l'expiration du sixième mois suivant sa promulgation.

Toutefois, il ressort, notamment, de l'avis de l'Autorité de la concurrence du 22 février 2016 (avis n° 2016-A-06) que la collecte des informations statistiques nécessaires à l'élaboration des tarifs n'était matériellement pas possible dans ce délai. Dès lors, le décret attaqué a pu légalement prévoir que puissent être arrêtés des tarifs transitoires pendant la période nécessaire à la collecte de ces données. Cette période a été fixée à une durée maximale de deux années pendant laquelle les tarifs sont établis par référence aux tarifs précédemment en vigueur dans une limite de variation de plus ou moins 5 %. Le moyen contestant ces dispositions est également écarté (point 25).

Le recueil des données par les instances professionnelles porte atteinte au secret industriel et commercial

Le dernier point de contestation portait sur le recueil de données statistiques à partir de la comptabilité des offices et études des professions réglementées. Le recueil des données doit être réalisé par les instances représentatives nationales de professions réglementées concernées, les professionnels en exercice devant leur transmettre les informations nécessaires (C. com., R. 444-17 à R. 444-20). L'article R. 444-21 mis en cause, prévoit que ces données peuvent être recueillies, selon des modalités et à la date fixées par arrêté conjoint, par l'intermédiaire, le cas échéant, des instances professionnelles régionales ou départementales.

Le Conseil d’état juge qu’au regard de l'intérêt à prendre en compte pour la fixation des tarifs, la réalité des coûts engendrés par les prestations et le fonctionnement économique des offices et études, la liste des informations recueillies prévue par les articles R. 444-17 à R. 444-20 du code de commerce ne porte pas au secret industriel et commercial une atteinte disproportionnée.

En revanche, le recueil de ces informations par les instances professionnelles est de nature à porter une atteinte disproportionnée au secret industriel et commercial (point 17). En particulier, les instances professionnelles représentatives réunissent, notamment, au niveau départemental et régional, des membres de ces professions en activité dans le même ressort géographique que celui des offices et études qui font l'objet du recueil de statistiques. En outre, les informations recueillies portent sur la situation économique et financière des offices et études, tant en ce qui concerne les prestations réglementées que les actes concurrentiels et elles sont susceptibles de révéler tant leur santé financière que leur stratégie commerciale.

Par conséquent, l'article R. 444-21 du code de commerce porte une atteinte disproportionnée au secret industriel et commercial de ces professions en prévoyant que ces informations peuvent être transmises aux autorités par l'intermédiaire de ces instances professionnelles et en se bornant à renvoyer à un « arrêté conjoint » pour la définition des modalités de cette transmission sans l'assortir de garanties. L’article R. 444-21 du code de commerce est donc annulé par le Conseil d’état.

Il reste donc à déterminer la nouvelle forme de transmission qui ne portera pas atteinte au secret professionnel et dans quel délai, elle pourra être organisée. En principe la révision des tarifs doit intervenir au 1er trimestre 2018, la décision du Conseil d’état risque de contrarier le respect de cette échéance.

 

Catherine Cadic, Dictionnaire Permanent Difficultés des entreprises
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