Versement de l’indemnité inflation : le compte à rebours est lancé

Versement de l’indemnité inflation : le compte à rebours est lancé

29.11.2021

Gestion du personnel

Annoncée par Jean Castex le 21 octobre, la prime inflation a été définitivement adoptée par le Parlement le 24 novembre. Destinée à limiter les effets de la hausse du carburant et de l’énergie, cette indemnité de 100 euros, versée à toute personne âgée d'au moins 16 ans sous condition de ressources, devra être versée aux salariés qui y ont droit par leurs employeurs avec la paie de décembre.

Inscrite dans le deuxième projet de loi de finances pour 2021, l’indemnité inflation a été vivement critiquée par le Sénat. Les sénateurs avaient d’ailleurs supprimé la mesure lors de l’examen du texte en première lecture au profit d’une majoration exceptionnelle de la prime d’activité de 150 euros, une mesure un peu plus conventionnelle.

Rétabli par les députés et adopté définitivement par les parlementaires, ce dispositif n’est pas à l’abri d’un recours devant le Conseil constitutionnel. 

Mais sans attendre l’éventuelle décision des Sages et la parution de la loi, le ministère du travail, l’Urssaf et le GIP-MDS ont rapidement apporté des précisions sur les conditions de versement, les modalités déclaratives et les bénéficiaires de ce dispositif. Une initiative opportune pour les employeurs dans la mesure où l’indemnité inflation doit être versée aux salariés éligibles dès décembre 2021.

Comme les pouvoirs publics, les éditeurs de logiciel de paie n’ont pas attendu la parution de la loi pour se mettre en ordre de marche.

Dans les jours suivants la publication de la loi, un décret et une instruction ministérielle devraient apporter la dernière touche à cette mesure exceptionnelle dont la "mise en musique" va tempo prestissimo.

Champ d’application territorial de l’indemnité inflation

Le dispositif s’appliquera en métropole et dans les départements et régions d’outre-mer de la Guyane, de la Guadeloupe, de la Martinique, de Mayotte et de La Réunion ainsi qu’à Saint-Pierre-et-Miquelon.

En revanche, il ne s’appliquera pas en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

► Dans le QR ministériel, Saint-Barthélemy et à Saint-Martin ne figurent pas dans la liste des départements et régions d’outre-mer concernés par le dispositif. La fiche DSN n’entre pas dans ce détail. Mais le bénéfice du dispositif aux personnes résidant dans ces collectivités d’outre-mer sera sans doute prévu dans le décret à paraître.

Conditions d’éligibilité de l’indemnité inflation

La condition d’âge et de résidence en France

L’indemnité inflation sera versée à toute personne âgée d’au moins 16 ans résidant régulièrement en France, que ses ressources, appréciées au regard de sa situation, rendent particulièrement vulnérables à la hausse du coût de la vie prévue pour le dernier trimestre 2021 (LFR 2021, article 13, alinéa 1).

Les salariés bénéficiaires doivent avoir au moins 16 ans avant le 1er novembre 2021, précise la fiche DSN relative aux modalités déclaratives de l’indemnité inflation publiée sur le site net-entreprises.fr.

L’âge minimum requis a été fixé à 16 ans afin de pouvoir inclure parmi les bénéficiaires tous les jeunes en activité ou inscrits dans une démarche de formation ou d’accompagnement vers l’insertion professionnelle, comme les jeunes en alternance (apprentis et salariés en contrat de professionnalisation), les stagiaires de la formation professionnelle, les jeunes en service civique ou engagés dans une démarche d’insertion dans l’emploi.

Ainsi, à s’en tenir à l’objectif de la loi, les stagiaires en entreprise devraient logiquement en bénéficier. Ce bénéfice était d’ailleurs initialement annoncé dans le dossier de presse du ministère du travail qui indiquait que c’était à l’entreprise d’accueil de verser l’indemnité aux jeunes effectuant un stage lorsqu’ils sont éligibles à l’indemnité. Mais l’administration a visiblement changé son fusil d’épaule, la fiche DSN précitée indiquant que les stagiaires sont exclus du bénéfice de l’indemnité.

► Si, pour des certitudes sur ce point, il faut attendre la parution du décret, en pratique, les éditeurs de logiciel ont certainement paramétré cette exclusion. Attention ! Si les employeurs ne sont visiblement pas tenus de verser l’indemnité à leurs stagiaires, il n’est pas exclu que ces derniers puissent l’obtenir à un autre titre.

Focus sur les salariés concernés et salariés exclus

S’agissant des salariés du secteur privé, l’indemnité inflation leur sera versée sous réserve :

  • qu’ils remplissent les conditions d’âge et de résidence précitées ;
  • qu’ils aient été employés au cours du moins d’octobre 2021 (même s’ils ont quitté l’entreprise depuis cette date et même si le contrat de travail ne couvre pas la totalité du mois d’octobre : attention tout de même à l’éventuelle condition minimale de durée du contrat de travail (voir ci-après) ;
  • et qu’ils ne dépassent pas le plafond de rémunération (voir ci-après).

► L’employeur n’a pas à verser l’indemnité inflation aux salariés embauchés après le 31 octobre 2021, même s’ils sont présents dans l’entreprise à la date de versement de l’indemnité.

Le tableau ci-dessous récapitule les travailleurs appartenant au secteur privé concernés par la mesure et ceux en étant exclus.

 

Salariés et travailleurs du secteur privé concernés

Salariés et autres travailleurs du secteur privé exclus

Salarié du secteur privé, quel que soit l’employeur *

Stagiaire en entreprise

Apprenti

Salarié de particulier employeur (indemnité versée directement par l’Urssaf)

Salarié sous contrat de professionnalisation

Salarié en congé parental d’éducation (indemnité versée par la CAF)

Titulaire d’un contrat d’engagement en ESAT

Salarié expatrié

Mandataire social rémunéré, au vu de la rémunération de son mandat et, le cas échéant, de son contrat de travail

Salarié non-résident en France dont la non-résidence est appréciée durant la totalité du moins d’octobre

*les salariés à temps partiel, les travailleurs frontaliers, les travailleurs intérimaires et les marins y ont droit également.

 

La condition de ressources : un plafond de rémunération fixé à 2 000 euros nets mensuels

Le bénéfice de l’indemnité inflation est également conditionné à un plafond de revenus.

Cette condition de ressources doit être précisé par le décret à paraître. Mais on sait d’ores et déjà que, pour les salariés, l’indemnité sera versée à ceux ayant perçu une rémunération brute (rémunération soumise à cotisations) ne dépassant pas 26 000 euros au titre des périodes d’emploi du 1er janvier au 31 octobre 2021. Une somme correspondant à une rémunération mensuelle brute inférieure à 2 600 euros, soit 2 000 euros nets mensuels avant impôt sur le revenu.

Selon la fiche DSN établie par le GIP-MDS, le plafond de rémunération est réduit en fonction de la durée du contrat sur la période de référence (1er janvier-31 octobre), appréciée au prorata du calendrier selon la formule suivante :

26 000 € x (nb de jours de la relation de travail/nb de jours calendaires de la période de référence)

Selon nos calculs, le nombre de jours calendaires de la période de référence s’élève à 304.

L’éligibilité à l’indemnité reste appréciée sur la base de ce calcul figé au moment du versement de la prime.

L’ensemble de la rémunération versée au titre des mois de janvier à octobre 2021 doit être prise en compte. Les primes de fin d’année et de 13e mois intervenant généralement en décembre ne seraient donc pas retenues dans le calcul de la rémunération moyenne sur la période considérée. Selon le rapport parlementaire, cette exclusion éviterait d’exclure certains salariés du champ de la mesure (Rapport AN, n° 4659 p. 190). En revanche, les primes et 13e mois lissés sur l’année seront pris en compte dans le calcul pour les mois de janvier à octobre.

Les pouvoirs publics expliquent, dans le QR ministériel, que cette prise en compte permet de lisser les effets des primes et 13e mois qui seraient retenus dans la rémunération. Puis, ils ajoutent que "la plupart des primes de fin d’année intervenant en décembre, elles ne seront pas prises en compte dans le calcul de la rémunération moyenne sur la période considérée". N’y a-t-il pas rupture d’égalité de traitement, le plafond de rémunération étant calculé sur une période supérieure au mois ?

En cas de congé maladie ou maternité du salarié, le salaire pris en compte sera celui versé par l’employeur. La condition de ressources n’est pas réduite dans ce cas, précise le QR ministériel.

En outre, la prime inflation est une aide individualisée. Cela signifie que l’on doit prendre en compte seulement les ressources personnelles du bénéficiaire et non celles de son foyer.

Exemple : si un couple de salariés perçoit moins de 26 000 euros chacun sur la période janvier-octobre 2021, la prime inflation sera versée à chacun des membres du couple.

Une condition minimale de durée du contrat de travail ?

La fiche DSN précitée annonce l’exigence d’une condition supplémentaire pour les contrats courts :  une condition minimale du contrat de travail de 20 heures.

Concrètement, pour les salariés en contrats courts (à savoir les CDD inférieurs à un mois, hors intérim) qui cumulent souvent plusieurs contrats de travail au cours d’un même mois, le déclenchement de l’indemnité ne serait pas automatique si le temps de travail cumulé chez le même employeur est inférieur à 20 heures. Le salarié devrait se signaler expressément auprès d’un de ses employeurs, préférentiellement celui avec lequel la relation de travail est en cours ou, à défaut, celui pour lequel il a effectué le plus d’heures durant le mois d’octobre. L’employeur ne pourrait pas s’y opposer.

Ce serait donc au salarié de faire ces démarches. A défaut, il ne percevrait pas la prime. Mais comment sera-t-il informé de la nécessité de cette démarche ? L’employeur sera-t-il tenu d’une obligation d’information à cet égard, tant vis-à-vis des salariés encore dans l’entreprise que des ceux qui ont quitté l’entreprise depuis octobre ? Pour le savoir, il faut attendre le décret.

Montant de l’indemnité inflation : 100 euros forfaitaire

Le montant de la prime inflation est forfaitaire : il s’élèvera à 100 euros exonérés de charges sociales et d’impôt sur le revenu. Ce montant sera versé en une fois, en décembre pour les salariés.

Selon le QR ministériel et la fiche DSN précités, l’employeur doit verser cette somme aux salariés qui y ont droit, y compris s’ils sont en période de congé (ex. : congé maladie ou maternité). En outre, l’aide n’est pas proratisée en fonction de la durée du contrat de travail ni en fonction de la durée du travail.

Quid des salariés présents dans l’entreprise en octobre mais partis depuis ? Les pouvoirs publics n’ont apporté aucune précision sur ce point mais en pratique, l’employeur risque de devoir faire un rappel de l’indemnité dès lors que le salarié avait un contrat supérieur à 20 heures.

► Le bénéfice de la prime inflation n’est pas pris en compte pour le calcul des revenus et ressources ouvrant droit aux allocations, prestations et avantages contributifs ou non contributifs, ni pour déterminer leur montant lorsque le droit est ouvert.

Modalités de versement et de remboursement de l’indemnité inflation

Modalités de versement

L’employeur versera l’indemnité inflation aux salariés y ouvrant droit en décembre 2021 dans la plupart des cas, et au plus tard en janvier 2022.

► L’indemnité inflation sera versée aux intérimaires par l’entreprise de travail temporaire (ETT) et non par l’entreprise utilisatrice.

Cette prime devra figurer sur une ligne dédiée du bulletin de paie de décembre 2021, sous le libellé "aide exceptionnelle indemnité inflation".

L’indemnité suit les règles de rattachement de la paie (période d’emploi) avec laquelle elle est versée. Elle pourra donc être déclarée en DSN au plus tard le 5 ou le 15 janvier 2022 pour un versement avec la paie de décembre 2021.

La fiche DSN précise que, pour un salarié ne faisant plus partie des effectifs mais qui est éligible au versement de l’indemnité, cette dernière doit être rattachée à la dernière période d’activité connue : octobre si l’individu est sorti des effectifs en octobre ou novembre s’il en est sorti en novembre.

Les modalités déclaratives de l’indemnité inflation en DSN sont précisées dans la fiche DSN établie par le GIP-MDS. Ainsi, l’indemnité inflation est à déclarer en DSN à la maille individuelle en utilisant la valeur de réserve "913 - Potentielle nouvelle cotisation D" présente au niveau du bloc "Cotisation individuelle - S21.G00.81". Cette cotisation est à rattacher à un bloc "Base assujettie - S21.G00.78" dont la rubrique "Code de base assujettie - S21.G00.78.001" sera renseignée avec la valeur "03 - Assiette brute déplafonnée". Pour l’Urssaf, en plus de la maille nominative (bloc "Cotisation individuelle - S21.G00.81"), le montant agrégé de l’indemnité inflation sera à indiquer en bloc "Cotisation agrégée - S21.G00.23" via le CTP 390 qui donnera l'information sur le montant d’indemnités versées dans l'établissement. Remplir l'information sous ce CTP sera sans incidence sur le montant des cotisations car l’indemnité inflation n'est pas soumise à cotisation. Le CTP devra être rattaché à la période d’emploi de la paie avec laquelle l’indemnité inflation a été versée. 

Modalités de remboursement : une imputation sur les cotisations sociales sauf exception

Les employeurs seront intégralement remboursés par l’Etat du montant des indemnités versées.

Pour cela, il leur suffira de déclarer le versement des indemnités (voir ci-avant) et de les déduire du montant des cotisations sociales dues au titre de la même paie à l’Urssaf dont ils relèvent, dès l’échéance de paiement la plus proche.

Un petit décalage est donc à prévoir entre le paiement de l’indemnité (à la fin du mois de décembre) et les déductions de cotisations sociales qui interviennent entre le 5 et le 15 du mois d’après.

Si le montant des indemnités excède le montant des cotisations dues, le réseau des Urssaf précise qu’il sera procédé à un remboursement

Le cas particulier des salariés multi-employeurs

Pour éviter les risques de cumul en situation de multi-employeurs, des règles seront prévues dans le décret à paraître.

Les personnes ayant travaillé, au cours du mois d’octobre, pour plusieurs employeurs devraient recevoir l’indemnité auprès de leur employeur principal, à savoir celui avec lequel la relation de travail est toujours en cours ou, à défaut, celui pour lequel ils ont effectué le plus d’heures en octobre.

Les salariés multi-employeurs seraient ainsi tenus d’informer les autres employeurs qui seraient susceptibles de leur verser l’indemnité, afin de ne pas percevoir de double ou triple versement. Les employeurs occupant des salariés travaillant pour plusieurs sociétés devront stopper le versement de la prime en fonction de l’information délivrée par le salarié ou ex-salarié.

Mais encore faut-il que le salarié multi-employeurs sache qu’il a un choix à faire. S’il ne stoppe pas le versement des primes inflation (de bonne ou mauvaise foi), seul un contrôle a posteriori, via la déclaration en DSN, semble possible. Quelles sanctions encourront les salariés qui, par désinformation, n’auront pas stoppé le versement de l’indemnité par leurs autres employeurs ? Et les fraudeurs ?

Le décret devra éclaircir ce point.

 

(*) Article mis à jour le 30 novembre à 11h15. 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Géraldine Anstett, avec la participation de Véronique Gasnier et Valérie Balland
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