"Je souhaite que les nouveaux diplômes soient accessibles dès la rentrée 2018"

"Je souhaite que les nouveaux diplômes soient accessibles dès la rentrée 2018"

13.10.2016

Action sociale

La réingénierie des diplômes du travail social entre dans une phase active. Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat chargée de la lutte contre l’exclusion, souhaite que la réforme se mette en oeuvre dès la rentrée 2018. Elle espère également que les salariés du privé bénéficieront d'une revalorisation équivalente à celle des personnels sociaux de la fonction publique. Interview.

Au lendemain de la remise par la Commission professionnelle consultative du travail social et de l’intervention sociale (CPC) d'un rapport dégageant les lignes directrices de la refonte des diplômes de travail social, Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat aux personnes handicapées et à la lutte contre l’exclusion, nous a accordé une interview pour faire le point sur ce vaste chantier dont elle a la charge et rassurer ceux qui craignent une remise en cause des métiers.

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Ségolène Neuville : La CPC a fait un bon travail qui permet de poser un cadre et une méthode et qui, je pense, va contribuer à rassurer et apaiser les inquiétudes. Des inquiétudes qui n’ont d’ailleurs pas lieu d’être puisque la réforme des diplômes découle du plan pauvreté et des Etats généraux du travail social (EGTS), avec pour objectif une meilleure reconnaissance du travail social.

Je peux comprendre que la question des passerelles avec les universités inquiète certaines personnes qui peuvent se dire que les titulaires de licences universitaires vont pouvoir exercer le même métier qu’elles. Or, c’est l’inverse, on va permettre une reconnaissance universitaire du diplôme social. Les travailleurs sociaux auront ainsi l’opportunité de compléter leur cursus par un master par exemple, alors qu’aujourd’hui pour évoluer ils ne disposent que du Caferuis ou du Cafdes. Nous voulons également à travers cette réforme développer une culture de la recherche en travail social.

Une frange des travailleurs sociaux se mobilise contre cette réingénierie des diplômes car ils craignent que les agents de niveau 3 soient amenés à accomplir des fonctions de coordination au détriment de fonctions d’accompagnement, cœur de leur métier. Cette crainte est-elle fondée ?

Absolument pas ! Je comprends leurs inquiétudes mais l’objectif n’est pas là du tout. Il faut resituer les choses. De quoi est-on parti ? Pour construire le plan d’action du travail social, nous avons écouté les travailleurs sociaux mais aussi les personnes accompagnées. Celles-ci nous ont dit qu’elles étaient souvent un peu perdues en raison du trop grand nombre d’intervenants, et qu’elles avaient même l’impression que ces intervenants ne se parlaient pas entre eux.

L’idée n’est donc pas du tout que les travailleurs sociaux de niveau 3 - qui vont devenir de niveau 2 - ne fassent plus que de la coordination ; ils continueront évidemment à faire de l’accompagnement.

Simplement, nous souhaitons que les agents fassent davantage de transmissions et de partages d’informations et qu’ils aient une meilleure connaissance des métiers des autres, tout simplement pour un meilleur fonctionnement.

Quels seront les métiers sociaux de la fonction publique revalorisés en catégorie A ?

Nous avions dit dès le départ que ce serait en fonction des missions accomplies. C’est le travail qui va s’ouvrir, maintenant que le rapport de la CPC m’a été remis. Des groupes de travail vont se mettre en place. Il faut aller vite parce que je souhaite que les nouveaux diplômes soient accessibles dès la rentrée 2018. L’année qui vient va donc être utilisée pour mener la réflexion sur les référentiels. Nous allons créer un groupe de travail pour chaque métier (assistant social, éducateur spécialisé, éducateur de jeunes enfants, éducateur technique et CESF) avec des représentants de chaque organisation syndicale, des associations de professionnels, des représentants des employeurs, etc.

Je veux que les référentiels d’activité soient prêts pour la fin janvier 2017. Les groupes de travail devront avoir fini leurs travaux d’ici la fin de l’année scolaire, c’est-à-dire avant l’été 2017. Même si les décrets ne sont pas prêts avant l’élection présidentielle, le plus gros du travail sera fait et il sera difficile de revenir en arrière.

Les établissements de formation auront toute l’année 2017-2018 pour s’approprier les référentiels, préparer la réforme et la mettre en œuvre dès la rentrée 2018.

A qui profitera la revalorisation ?

Il faut distinguer deux choses : il y a le passage du diplôme niveau 3 au diplôme niveau 2 (licence), et le passage de la catégorie B à la catégorie A dans la fonction publique ; c’est dans ce dernier cas qu’on parle de revalorisation. Le dossier est entre les mains du ministère de la fonction publique. Le passage en catégorie A se fera avant qu’on ait fini de travailler puisque comme je vous l’ai dit les nouveaux diplômes sont prévus pour la rentrée 2018 alors que la négociation pour le passage en catégorie A s’ouvre en novembre 2016.

Ces deux chantiers sont liés mais pas conditionnés. Je souhaite simplement que tout le monde continue à s’investir dans la réingénierie des diplômes indépendamment du passage en cadre A.

Et les salariés du privé sont-ils concernés par la revalorisation ?

Je vous rappelle que dans toutes les discussions qui ont permis de construire le plan d’action en travail social, les grandes fédérations d’employeurs ont été associées. Depuis le début, les employeurs privés associatifs sont avec nous dans ce plan d’action, donc ils savent à quoi s’attendre et ils doivent l’avoir anticipé.

Y aura-t-il une enveloppe dédiée ?

Non, mais n’oubliez pas que le gouvernement vient d’annoncer le CICE association, et qu’il y a toujours l’abattement de la taxe sur les salaires. Par ailleurs, de nombreux établissements concluent actuellement des CPOM, ce qui veut dire que les financeurs pourront tenir compte de la revalorisation des travailleurs sociaux. 10 000 associations ont par ailleurs bénéficié de l’aide à l’embauche du premier salarié. Les gestionnaires doivent s’organiser avec ce qu’ils ont.

En 2017, lorsque les fonctionnaires travailleurs sociaux seront revalorisés en catégorie A, je souhaite qu’il y ait un alignement entre les salariés du secteur privé et les agents du public. A charge pour les partenaires sociaux du secteur privé associatif de négocier entre eux pour transposer cette revalorisation dans le privé.

Il a été reproché au gouvernement lors des manifestations contre la réforme des diplômes d’entreprendre la "casse" des métiers du social, de vouloir faire des économies sur le dos des professionnels. Que répondez-vous ?

J’aimerais que l’on m’explique où se situent les économies ? C’est tout à fait l’inverse puisqu’il y aura à la fois des revalorisations salariales mais aussi une reconnaissance du métier lui-même.

Avec cette réforme, je souhaite que les jeunes qui sont actuellement à l’école et qui se demandent ce qu’ils vont faire, soient attirés par les métiers du social, qu’ils aient envie de devenir éducateur ou assistant social. Ce ne sont pas des professions comme les autres, il s’agit de métiers militants. Le problème, c’est qu’ils sont aujourd’hui moins valorisés. Ce que j’essaie de faire avec cette réforme, c’est justement qu’il y ait une plus grande reconnaissance des travailleurs sociaux dans la société !

Propos recueillis par Linda Daovannary
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