Chez Industeel, l'activité réduite se poursuit après l'amélioration des mesures de prévention

Chez Industeel, l'activité réduite se poursuit après l'amélioration des mesures de prévention

27.03.2020

Représentants du personnel

Sur la pression des salariés, qui ont fait jouer leur droit de retrait, et des organisations syndicales, l'entreprise Industeel, au Creusot, a revu son plan de continuité de l'activité et amélioré le dispositif de prévention. Mais dans d'autres entreprises de la métallurgie, les syndicats remontent des situations inquiétantes...

Au cœur du bassin industriel du Creusot, en Saône-et-Loire, Industeel emploie 830 salariés. L’entreprise, qui fait partie du groupe ArcelorMitall, produit des aciers spéciaux pour le nucléaire notamment. Elle connaît du chômage partiel depuis septembre, donc bien avant la crise sanitaire. Ici les salariés craignent à la fois la fin de l’usine, ou plutôt son non redémarrage au cas où le site serait totalement arrêté, mais aussi les risques pour leur santé lié au covid-19, dit coronavirus.
La peur a redoublé avec l’annonce par le président de la République du confinement. L’entreprise a bien mis en place un plan de continuité de l’activité (PCA), avec trois scénarios, l’un dans lequel 20% de l’activité était arrêtée, un autre dans lequel ce serait 40% et un dernier où tout le site serait stoppé, le tout assorti de mesures de prévention. Mais les organisations syndicales, devant l’inquiétude grandissante des salariés, ont jugé le dispositif insuffisant et réclamé l’arrêt complet du site.
Un exercice collectif du droit de retrait
Invoquant un danger grave et imminent, la CGT et la CFDT ont incité les salariés à exercer collectivement leur droit de retrait, ce que la plupart ont fait. «L’entreprise a dû arrêter la production pendant plusieurs jours. Nous avons pu discuter d’une amélioration des mesures de prévention », raconte Mathieu Charbonnier, le délégué syndical CFDT. Industeel, qui avait fait don d’un lot de masques aux hôpitaux de la région, a renforcé l’aspect prévention de son plan de continuité de l’activité : dans les cabines où doivent se tenir deux lamineurs, une barrière plexiglas a été installée, le service R&D a fabriqué du désinfectant, les roulements ont été revus pour que les équipes ne se croisent pas et que la désinfection des locaux et installations se fasse à ce moment-là, l’entreprise a mis à disposition du cellophane à changer régulièrement pour recouvrir certains matériels, etc.
Des réunions du CSE et de la CSSCT
Le tout a donné lieu à des réunions du CSE, en physique puis en visioconférence, et à deux réunions de la commission santé, sécurité et conditions de travail, via skype. Si la CGT était plutôt hostile à un redémarrage du site car la production n’est pas vraiment indispensable à l’activité de la nation, la CFDT s’y est montrée favorable, « dès lors que la direction a répondu à tous les points qui justifiaient le droit d’alerte ». Le PCA a donc été actualisé et amélioré, sans que cela ne fasse l’objet d’un accord collectif.
Aujourd’hui, environ 30% seulement du personnel de production vient toujours travailler sur le site (tous sont volontaires, selon la CFDT), les autres sont au chômage partiel, tandis que les employés des services support télétravaillent. En tant que « technicien fiabiliste », Mathieu Charbonnier n’aurait pas besoin de venir travailler sur le site. Mais il est là chaque jour. « Il nous faut être davantage présent sur le terrain pour vérifier que les mesures de sécurité et de prévention sont bien appliquées, pour être présent auprès des salariés afin de les rassurer », répond le délégué quand on l’interroge sur ce que change cette crise sanitaire à sa mission de représentant du personnel. Comment voit-il la suite ? «Notre activité est fortement réduite, répond le délégué. C’est un peu au jour le jour ».
 

 

Des rince-doigts en guise de désinfectant !

Trois organisations syndicales (CFDT, CFE-CGC, FO) et une organisation patronale (l'UIMM) ont signé le 20 mars 2020 une déclaration commune qui évoque la nécessité d'arrêter, "dans le cadre d'un dialogue social adapté", des mesures de prévention, le document d'évaluation des risques devant être actualisé. Dans ce texte, les partenaires sociaux demandent aux entreprises "d'adapter scrupuleusement leur environnement de travail en mettant en place les mesures organisationnelles, collectives et individuelles, qui permettent d'assurer la sécurité sanitaire de tous : distances de sécurité, gestes barrières, mise à disposition de gants, maques, produits désinfectants, lavage de vêtements de travail".

Problème : les syndicats déplorent sur le terrain que certains employeurs se montrent "insensibles à cet appel".

La branche mines métaux de la CFDT reçoit ainsi des remontées inquiétantes de ses syndicats de Mayenne, Sarthe, Maine-et-Loire et Loire-Atlantique : certaines sociétés imposent aux salariés de travailler dans des conditions jugées peu sûres, un employeur multiplie les licenciements, déclenche une activité partielle puis redémarre sa fabrication, des salariés sont bien équipés pour se protéger tandis que d'autres, travaillant pour des sous-traitants, n'ont pas les mêmes équipements, une entreprise fournit des rince-doigts en guise de désinfectant...

La CFDT demande "instamment à toutes les entreprises de respecter les mesures sanitaires" préconisées par le gouvernement et avertit : "Là où la santé des travailleurs ne peut être assurée, la seule règle qui doit prévaloir est l'arrêt de l'activité, le temps de réorganiser le travail et d'assurer la sécurité des travailleurs".

Le secrétaire général de la CGT métallurgie, qui n'a pas signé le texte paritaire, estime que les salariés de la métallurgie sont "confrontés à des situations inacceptables" et il appelle les syndicats "qui ne produisent pas de matériels vitaux à mettre tout en oeuvre et utiliser tous les moyens (droit de retrait, télétravail, appel à la grève) pour permettre d'assurer et de préserver la santé des salariés et de leurs proches". Frédéric Sanchez juge en effet que "seules les activités considérées comme statégiques et vitales pour le pays doivent continuer à fonctionner, à savoir les transports, la santé, l'industrie alimentaire, énergétique et toutes celles qui contribuent à endiguer et éradiquer l'épidémie".

La lettre paritaire de l'UIMM, de la CFDT, CFE-CGC et FO dans la métallurgie, datée du 20 mars 2020

 

 

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue
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