Conciliation vie pro, vie perso : y'a du boulot !

Conciliation vie pro, vie perso : y'a du boulot !

26.09.2019

Représentants du personnel

Cette enquête devrait nourrir les réflexions des entreprises comme des représentants du personnel au sujet de la qualité de vie au travail. Elle montre que les caractéristiques du travail (autonomie, contraintes, éloignement du domicile) sont déterminantes dans la recherche d'une bonne conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle, les femmes vivant beaucoup plus douloureusement que les hommes les reproches liés à leur manque de disponibilité à la maison. Le soutien social s'avère aussi déterminant...

Pour la première fois a été posée à un échantillon représentatif de près de 20 000 salariés du public et du privé la question suivante : "Vos proches se plaignent-ils que vos horaires de travail vous rendent trop peu disponible pour eux ?" Précisons que la question ne définit pas les proches, qui peuvent donc être le conjoint, les enfants, etc.

Les résultats de ce questionnaire, qui a été ajouté en 2016 à l'occasion de l'enquête conditions de travail et risques psychosociaux, ont été présentés hier à la presse par la Dares (direction de l'animation de la recherche, des études et de l'emploi). Ils permettent de mesurer le sentiment des salariés quant à leur possibilité de bien articuler leur travail et leur vie personnelle, un domaine où traditionnellement la France est en retard par rapport aux autres pays européens, notamment nordiques.

Disons-le tout de suite : ce sentiment de manque de disponibilité est lié à la représentation du rôle dévolu aux femmes dans le couple, représentation qui elle-même varie selon les catégories socio-professionnelles, mais il dépend surtout fortement du type d'emploi occupé et de la distance entre le domicile et le travail.

La présence des enfants change la donne

Au global, 13% des femmes et 14% des hommes disent subir ce reproche familial de n'être pas assez disponible. Cette  homogénéité masque de fortes différences. La présence d'enfants de moins de 18 ans fait ainsi passer cette proportion à 16% des femmes et 17% des hommes, comme on le voit ci-dessous :

Lecture : 16% des femmes étant en couple avec un enfant de moins de 18 ans déclarent recevoir des reproches de leurs proches concernant leur manque de disponibilité

Chez les cadres, dont le temps de travail en France est plus fort qu'en Europe, 18% des hommes et 17% des femmes rapportent ce type de reproches, contre seulement 13% des ouvriers et ouvrières. Mais quand le questionnaire est traité en comparant des "conditions de travail et contrainte psychosociales équivalentes", ce sont les employées de commerce et les ouvrières qui déclarent le plus des reproches de la part de leur entourage. Explication donnée par la Dares : d'une part, les rémunérations des cadres permettent aux femmes de confier le ménage ou la garde des enfants à des tiers, d'autre part, c'est dans les catégories populaires que la traditionnelle répartition des tâches domestiques continue de peser le plus sur les femmes, qui se verraient donc reprocher par leurs proches un manque de disponibilité, manque qui s'explique par un travail contraint à la fois au bureau ou à l'usine et à la maison. "Les femmes ont la charge du travail domestique, et leur implication au travail est moins acceptée par leur entourage", analyse Marilyne Bèque, de la Dares.

Sur ce sujet, l'enquête confirme le maintien d'un déséquilibre dans la réalisation des tâches ménagères (repas, courses, lessive) au sein des couples. L'écart se réduit, mais ce sont très majoritairement les femmes qui effectuent les tâches ménagères, comme on le voit ci-dessous :

Lecture : 45% des femmes et 72% des hommes travaillant à temps plein déclarent effectuer entre 7 à 12 heures de tâches domestiques par semaine.

L'autonomie au travail est déterminante

On s'en doutait, l'enquête le confirme : les conditions de travail sont déterminantes dans la capacité des individus à concilier travail et vie personnelle. Les salariés déclarant recevoir le plus de reproches de la part de leurs proches sont ceux, et surtout celles, qui font les 3x8 ou 2x8, ceux qui ont des horaires variables d'un jour à l'autre ou dont les horaires dépassent la fin prévue, qui travaillent de nuit ou le week end, comme on le voit dans le schéma ci-dessous :

Lecture : 10% des femmes ayant les mêmes horaires chaque jour rapportent des reproches de leurs proches sur leur manque de disponibilité, contre 29% des femmes travaillant en 3x8

Il en va de même pour les caractéristiques du travail. Ainsi 24% des hommes déclarant devoir penser trop de choses à la fois et 21% des salariés déclarant un travail intensif disent éprouver des difficultés avec leurs proches, un chiffre équivalent pour ceux qui ont peu d'autonomie au travail.

La durée du trajet entre le domicile et le travail expose aussi à ce manque de disponibilité : au-delà d'une heure de transport, 23% des hommes et 18% des femmes se voient reprocher par leurs proches leur manque de disponibilité à la maison, contre respectivement 12% lorsque le trajet prend un quart d'heure. De quoi nourrir les échanges lors de la future négociation obligatoire sur les déplacements domicile-travail, que prévoit le projet de loi Mobilité actuellement examiné au Parlement...

Le soutien social au travail est important !

La Dares a également cherché à savoir dans quelle mesure les reproches entendus à la maison sur leur manque de disponibilité affectaient les salariés. Ce résultat a été obtenu en corrélant les 5 questions du questionnaire sur le bien être de l'Organisation mondiale de la santé (*) au questionnaire sur la disponibilité ressentie. La réponse est édifiante : les femmes sont davantage affectées. Ainsi, 26% des femmes déclarant des reproches présentent des caractéristiques dépressives, contre seulement 11% des hommes. Autrement dit, subir des reproches sur son manque de disponibilité aux autres accroît davantage chez la femme que chez l'homme le risque d'une dépression. Culpabilité, quand tu nous tiens !

Terminons la synthèse de cette étude par un aspect réconfortant : le soutien social. L'aide des collègues et/oui de son supérieur hiérarchique au travail et la possibilité de coopérer contribuent à améliorer l'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Seuls 9% des hommes disant bénéficier d'un fort soutien social disent éprouver des difficultés avec leurs proches, contre 26% des hommes ayant un faible soutien social.  

(*) Ces 5 éléments sont les suivants : se sentir bien et de bonne humeur, se sentir calme et tranquille, se sentir plein d'énergie et vigoureux, se réveiller frais et dispo, avoir une vie quotidienne remplie de choses intéressantes.

 

Le temps dégagé par le temps partiel atténue les reproches
faits aux femmes pour leur manque de disponibilité !
Les femmes à temps partiel semblent subir moins de reproches, de la part de leurs proches, sur leur manque de disponibilité que les femmes ayant un travail à temps plein (9% contre 15%). Plus qu'une apologie du temps partiel, ce dont la Dares se défend bien sûr, il faut sans doute voir dans ces résultats la permanence de l'inégale répartition des tâches relative au ménage et à l'éducation dans le couple. En effet, 23% des femmes à temps partiel ayant au moins un enfant de moins de 18 ans à charge disent avoir choisi le temps partiel pour s'occuper de son éducation.

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue
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