Congés, jours de repos et durée du travail : ce que permet l'ordonnance

Congés, jours de repos et durée du travail : ce que permet l'ordonnance

26.03.2020

Représentants du personnel

L'ordonnance traitant de la prise des congés, des RTT mais aussi de la durée du travail dans certains secteurs a été présentée mercredi 25 mars en conseil des ministres. L'employeur devra obtenir un accord collectif pour imposer à un salarié la prise de 6 jours de congés payés. En revanche, il pourra agir unilatéralement pour imposer 10 jours de repos (RTT et compte épargne temps). Dans certains secteurs, les employeurs pourront relever la durée de travail quotidienne et hebdomadaire .

A la suite de la loi d'urgence sanitaire votée ce week-end, plusieurs ordonnances traitant du droit du travail et de la sécurité sociale ont été adoptées hier en conseil des ministres, et ont été publiées dès ce jeudi 26 mars au Journal officiel. D'autres mesures consacrées à l'activité partielle devrait être connues en fin de semaine, tout comme le décret précisant les secteurs pouvant exceptionnellement déroger aux limites actuelles de durée du travail. Nous traitons ci-dessous l'ordonnance relative aux congés, jours de repos, RTT et à la durée du travail, sachant que vous trouverez dans cette édition les articles traitant des autres aspects : indemnités complémentaires, intéressement et participation, chômage.

Règles de gestion des congés : l'accord collectif est requis (art.1. et 2.)

Comme prévu, l'employeur doit négocier un accord d'entreprise ou de branche avec les organisations syndicales pour imposer ou modifier les dates des congés payés des salariés, dans la limite de 6 jours de congés ouvrables, y compris avant la période d'ouverture pendant laquelle les salariés partent en congés. Le fractionnement des jours de congés peut être décidé sans l'accord du salarié.

Par ailleurs, si deux salariés mariés ou partenaires d'un Pacs travaillent dans la même entreprise, l'employeur peut suspendre leur droit à congé simultané afin que l'un d'eux travaille si sa présence est indispensable. Ces mesures doivent cependant être prévues par un accord collectif. Les jours imposés ou modifiés ne pourront pas s'étendre au-delà du 31 décembre 2020. Toute décision de l'employeur est soumise au respect d'un délai de prévenance d'un jour franc à l'exception du fractionnement des congés et de la suspension des congés simultanés des époux ou partenaires d'un Pacs.

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Forfait jour, RTT : l'employeur peut imposer ses choix (art. 2. et 3.)

En revanche, l'accord collectif n'est pas nécessaire pour modifier unilatéralement ou imposer les dates des jours de RTT et de jours de repos conventionnels prévus dans le cadre d'un accord aménageant le temps de travail sur une période supérieure à une semaine (articles L. 3121-41 et suivants du code du travail). La modification et l'imposition de jours de congés par l'employeur est également prévue dans le cadre des conventions de forfait et ce sans l'accord du salarié. L'employeur doit informer les salariés dans le délai d'au moins un jour franc.

Compte épargne temps : de jours de repos imposables au salarié (art. 4. et 5.)

Par dérogation au code du travail et dispositions conventionnelles, l'employeur peut imposer à un salarié d'utiliser son compte épargne temps (CET) pour prendre des jours de repos, et ce jusqu'au 31 décembre 2020. L'employeur doit respecter un délai de prévenance...d'un jour franc. 

► Au total, en tenant compte des jours RTT et des jours de CET, l'employeur ne peut imposer au salarié de prendre plus de 10 jours de repos. S'ajoutent à ces 10 jours les 6 jours de congés que l'employeur peut faire prendre à un salarié à la condition d'avoir préalablement négocié un accord collectif. 

Durée du travail : un régime exceptionnel jusque fin 2020 (art. 6 )

Un décret va définir les secteurs d'activités "particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale" (Ndlr : le ministère du Travail évoque l'énergie, les transports, la logistique, l'agroalimentaire, etc.). Le décret précisera pour chacun de ces secteurs à quelles dérogations il peut prétendre s'agissant de la durée de travail. Ce texte réglementaire pourrait être publié en fin de semaine.

Ces dérogations au code du travail et aux dispositions conventionnelles, que les entreprises pourront mettre en oeuvre jusqu'au 31 décembre 2020 en fonction de ce que précisera le décret, sont listées par l'ordonnance. Il s'agit de :

  • porter jusqu'à 12 heures la durée quotidienne maximale de travail de jour, au lieu de 10 heures comme le prévoit l'art. L.3121-18;
  • porter jusqu'à 12 heures la durée quotidienne maximale de travail de nuit, au lieu de 8 heures comme le prévoit l'art. L. 3122-6, à la condition d'attribuer un repos compensateur d'une durée au moinss équivalente au dépassement de la durée habituelle;
  • réduire jusqu'à 9 heures consécutives la durée du repos quotidien, au lieu de 11 heures comme le prévoit l'art. L 3131-1, à la condition d'attribuer un repos compensateur égal à la durée du repos normal dont le salarié ne peut pas bénéficier;
  • porter jusqu'à 60 heures la durée maximale hebdomadaire de travail de jour, au lieu de 48 heures par semaine comme le prévoit l'art. L.3121-12
  • porter jusqu'à 44 heures la durée hebdomadaire de travail du travailleur de nuit, au lieu de 40 heures par semaine comme le prévoit l'art. L. 3122-7.

L'entreprise qui utilisera une ou plusieurs de ces dérogations (qui varieront selon les secteurs) devra en informer "sans délai et par tout moyen" le comité social et économique, ainsi que le Direccte. 

Repos dominical : une dérogation pour toutes les entreprises des secteurs indispensables (art. 7)

La dérogation à la règle du repos dominical devient de droit, jusqu'au 31 décembre 2020, pour toutes les entreprises relevant "de secteurs d'activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation". Ces entreprises pourront donc attribuer le repos hebdomadaire par roulement. 

Cette dérogation, précise l'ordonnance, s'applique également aux entreprises qui réalisent des prestations nécessaires à l'activité principale des entreprises des secteurs "particulièrement nécessaires". 

Ces dispositions sur le travail dominical valent également pour les entreprises des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.

Marie-Aude Grimont et Bernard Domergue
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