Déclaration du refus d'un CDI : "une lourdeur administrative incontestable"

Déclaration du refus d'un CDI : "une lourdeur administrative incontestable"

15.01.2024

Gestion du personnel

Depuis le 1er janvier, les employeurs ont l'obligation de transmettre à France Travail les refus de CDI opposés par des salariés en CDD ou en contrat de mission. Cette nouvelle obligation déclarative, non sanctionnée, ne convainc pas les experts qui accompagnent les entreprises.

Avec la loi du 21 décembre 2022 et le décret du 28 décembre 2023, les employeurs ont depuis le 1er janvier une nouvelle obligation : celle de déclarer à France Travail les refus qui leur seront opposés à une proposition de CDI à un salarié en CDD ou en contrat de mission. A l'issue de deux refus de CDI, l'ancien salarié perdra ses droits à allocations chômage.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

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Le législateur n'a pas assortie cette nouvelle déclaration - pourtant obligatoire - de sanctions. Sur le papier, l'employeur ne risque donc rien à méconnaître son obligation et à proposer un emploi identique ou similaire en CDI sans respecter ce nouveau formalisme. Il n'est pas prévu que France Travail puisse contrôler et sanctionner l'employeur pour cette inexécution.

Les deux experts que nous avons interrogés sur ce nouveau dispositif se montrent dubitatifs et critiquent cette nouvelle obligation tant le dispositif lui-même que ses modalités.

Risque pour le recrutement

Elodie Tabel-Diffaza, directrice marché conseil social et paie au sein du groupe d'expertise comptable In Extenso, craint que cette nouvelle obligation aille à contre-courant du contexte économique et social actuel de tension sur l'emploi, surtout dans les TPE-PME qu'elle accompagne. "L'employeur doit proposer un CDI avant le terme du contrat. Or, les TPE-PME sont peu nombreuses à anticiper. Ensuite, l'exigence de formalisme - effectuer la proposition de CDI par lettre recommandée avec accusé de réception ou par remise en main propre contre décharge pour justifier d'une traçabilité - risque d'entacher une relation de travail qui a vocation à continuer et instaurer un processus de défiance".

Nouveau circuit déclaratif autonome

Abdelkader Berramdane, responsable de la veille juridique chez l'éditeur SDWorx, déplore pour sa part que le législateur ait fait le choix d'un nouveau circuit de traitement des données. "Pour nous éditeurs, modifier l'attestation Pôle emploi [désormais France Travail] relève de notre rôle d'adaptation. Mais là il s'agit d'un autre circuit déclaratif. L'ajouter à la DSN déchargerait l'employeur de cette obligation de déclaration".

► Il se pourrait qu'à terme, la transmission de l'information par voie dématérialisée se traduise par de nouvelles mentions sur l'attestation chômage via un changement de la DSN , mais pas avant 2025.

Il dénonce "une lourdeur administrative incontestable", incompatible avec "une mesure efficiente".  "Il y a une distorsion entre les objectifs et les modalités de mise en oeuvre".

Elodie Tabel-Diffaza s'interroge aussi sur le circuit choisi. "Avec le FCTU, [fin de contrat de travail unique] France Travail est destinataire de toutes ces données, dont le motif de fin de contrat. On fait peser sur l'entreprise une obligation qui ne présente aucun intérêt pour elle. On impose à l'employeur de transmettre des données, de joindre des documents et de justifier du respect d'une procédure". Alors que selon elle, "France Travail dispose d'informations qui lui permettraient d'être en démarche proactive auprès de l'employeur".

Non-versement de la prime de précarité

Sur l'absence de sanctions, d'autres règles du droit du travail pourrait-elle venir sanctionner l'employeur négligent ? "Pourrait-on considérer éventuellement que l'employeur apporte son concours à une tentative d'obtention frauduleuse d'allocations chômage (L.5429-1 du code du travail), se demande Abdelkader Berramdane. Il serait difficile toutefois de prouver l'intention frauduleuse de l'employeur".

Autre piste : un employeur qui ne verse pas la prime de précarité car le salarié a refusé un CDI (article L.1243-10 du code du travail) mais ne déclare pas le refus d'un CDI s'exposerait-il à un retour de bâton ? Non pour les deux experts d'une part "parce qu'il y a plusieurs situations où elle n'est pas versée. Ce pourrait être un indice, pas plus. Si France Travail soupçonne une fraude, il lui appartiendra d’engager une instruction plus approfondie", estime Abdelkader Berramdane. D'autre part, assure Elodie Tabel-Diffaza, "si la prime de précarité n'est pas versée car le salarié a refusé un CDI, ll n'y a pas de risque pour l'employeur quand bien même France Travail le saurait car il n'y aurait pas d'intention frauduleuse". 

Florence Mehrez
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