Des professeurs de droit proposent de créer un comité du personnel aux droits renforcés

Des professeurs de droit proposent de créer un comité du personnel aux droits renforcés

16.03.2017

Représentants du personnel

Regrouper DP et CE au sein d’un comité du personnel constitué au niveau de la communauté de travail, doté de prérogatives économiques renforcées et d’une dotation minimale de 1% de la masse salariale brute pour la gestion des activités sociales et culturelles. C’est ce que préconise le Groupe de recherche pour un autre code du travail (GR-Pact). Le CHSCT bénéficierait quant à lui d’un droit de veto.

Lors d’une rencontre avec la presse, le Groupe de recherche pour un autre code du travail (GR-Pact) a présenté hier matin à Paris sa "Proposition de code du travail" (*). Cet ouvrage de 400 pages, fruit du travail commun de 23 professeurs de droit du travail et disponible en librairie à compter du 22 mars, prône sans ambiguïté un renforcement des droits des travailleurs et de leurs représentants.

"Nous avons entièrement réécrit le code du travail"

Emmanuel Dockès, professeur à l’université Paris Ouest Nanterre et chef de file du GR-Pact, présente ce code du travail alternatif non sans fierté : "Voici le fruit d’un an et demi de travail. Il en résulte aujourd’hui un texte quatre fois plus court que l’actuel code du travail. Ce dernier en est à un tel niveau de complexité que certaines règles se contredisent elles-mêmes, affirme le juriste. Nous avons entièrement réécrit le code, sans avoir commis aucun copier/coller ou presque. De nombreuses idées défendues par notre groupe sont favorables au droit des salariés mais même ces textes mériteraient d'être simplifiés", concède-t-il.

Le GR-Pact plaide ainsi pour un code du travail à nouveau pleinement protecteur des salariés : "Le droit du travail s'effrite depuis 30 ans, date à laquelle on a commencé à penser que la protection des salariés est un frein �� l'emploi. Il s’agit ici de revenir sur cette évolution du droit", résume Julien Icard, professeur de droit à l’université de Valenciennes.

Cette proposition de code du travail vient d’être envoyée à Benoît Hamon, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon, candidats à l’élection présidentielle. Côté syndical, "aucune confédération ne soutient à 100% nos travaux, reconnaît volontiers Emmanuel Dockès. Nous avons discuté du début à la fin avec la CFE-CGC, la CGT et Solidaires. Les contacts ont été plus distants avec la CFDT".

 

Réunir CE et DP au sein d’un comité du personnel

S’agissant d’abord du droit de la représentation du personnel, le GR-Pact prévoit une absorption du comité d’entreprise par les délégués du personnel dans le cadre d’une nouvelle instance : le comité du personnel. "Concrètement nous fusionnons davantage les instances représentatives que ne le fait aujourd’hui la loi puisque le comité du personnel serait généralisé à partir de 11 salariés, explique le professeur Emmanuel Dockès. Mais l’objectif poursuivi est très clairement de renforcer la présence sur le terrain des élus avec un comité du personnel mis en place au niveau de la communauté de travail, pour faire obstacle à la centralisation et à la réduction du nombre de CE". "Sur le terrain des prérogatives économiques du comité du personnel, nous ajoutons la faculté d’auditionner deux fois par an l'actionnaire dominant ou l'employeur de l'entreprise dominante, complète Florence Debord, professeur à l’université Lyon 2. Dans les groupes, l’instance devra aussi être consultée chaque fois qu'une décision de l'entreprise dominante peut avoir des conséquences sur l'activité de ses filiales".

Seul le CHSCT, rebaptisé par les enseignants "comité de santé et des conditions de travail" (CSCT) , bénéficiera d’un droit de veto contre les décisions de l’employeur, et uniquement pour les problématiques de santé au travail : "Nous n’avons pas souhaité un système de cogestion de l’entreprise à l’allemande", justifie Florence Debord.

"Tout licenciement sans cause réelle et sérieuse sera frappé de nullité"

Le droit du licenciement serait également remodelé : "Nous avons repris les précisions de la jurisprudence pour la définition de la cause réelle et sérieuse de licenciement. La grande nouveauté, c’est que nous proposons la nullité de tout licenciement injustifié, disciplinaire ou économique, se félicite Morgan Sweeney, professeur à l’université Paris Dauphine. Donc le salarié pourra exiger sa réintégration et l’indemnisation sera renforcée avec un droit au paiement de tous les salaires dûs entre le licenciement et la réintégration". Enfin, si le salarié ne souhaite pas être réintégré, il bénéficiera d’une indemnité plancher d’un an de salaire si l'entreprise emploie plus de 10 salariés, et 6 mois de salaires au sein des TPE : "Cette différence est motivée par la volonté d’éviter qu’un licenciement injustifié ne mettre en danger l’ensemble des emplois d’une petite structure", est-il précisé.

Remplacer 5 jours fériés catholique par une 6e semaine de congés payés

Sur la laïcité en entreprise, sujet d’actualité après la décision rendue lundi par la CJUE, "nous avons pris des positions assez fermes, assure Emmanuel Dockès. La loi Travail, le juge de l’Union européenne et la Cour de cassation présentent une possibilité d'imposer une neutralité, en particulier vestimentaire, dans l'entreprise. Cela nous inquiète. Nous sommes favorables à la liberté, sous toutes ses formes, affirme le professeur de droit. Le fait qu'une caissière soit voilée, en quoi cela impacte-t-il la qualité de son travail ? Nous proposons aussi la suppression de 5 jours fériés catholiques et de les remplacer par une 6eme semaine de congés payés. Le tout accompagné d'un droit au week-end prolongé pour célébrer la fête religieuse de son choix. C'est notre approche de la laïcité", conclut-il.

 

(*) Proposition de code du travail, 32 euros aux éditions Dalloz (Dalloz est une société du groupe ELS, également propriétaire des Editions Législatives, société éditrice d'actuEL-CE.fr)

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Julien François
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