Deux secrétaires d'Etat passent à l'offensive

Deux secrétaires d'Etat passent à l'offensive

12.09.2016

Action sociale

De façon quasi-simultanée, Pascale Boistard et Ségolène Neuville ont publié des tribunes dans la presse pour mettre en avant les réalisations du quinquennat en matière de vieillissement et de lutte contre la pauvreté. A chaque fois, les propositions de la droite, en particulier celles de Nicolas Sarkozy, sont sévèrement épinglées. La campagne de 2017 est lancée.

On a du mal à croire que tout cela n'est pas concerté. Au lendemain du discours de la salle Wagram au cours duquel le Président Hollande a fait un grand pas vers une nouvelle candidature à l'élection présidentielle, deux de ses secrétaires d'Etat ont publié des tribunes offensives avec deux objectifs évidents. 1/ Montrer que, par-delà les critiques sur le manque d'ambition de certaines mesures, la gauche a, depuis quatre ans qu'elle est aux rênes du pouvoir, rendu la société plus solidaire. 2/ Expliquer pourquoi le retour de la droite, surtout si elle est conduite par Nicolas Sarkozy, signerait une formidable régression.

14 % de pauvres : un succès ?

"Gardons le cap pour faire reculer la pauvreté". Dans un article publié sur le site de Libération, Ségolène Neuville revient sur les dernières statistiques de l'Insee qui montrent une stabilisation en 2014 du taux de pauvreté à 14 % de la population vivant en France. Ce que d'aucuns pourraient prendre pour un succès tout à fait relatif est là analysé comme une réussite. Mais la secrétaire d'Etat répond en deux temps. D'abord, cette stabilisation fait suite à deux années (2012 et 2013) de baisse qui avaient été consécutives à une augmentation de ce taux, surtout depuis 2008. CQFD : la pauvreté régresse quand la gauche est au pouvoir. D'autre part, la responsable gouvernementale explique que l'Insee avait estimé fin 2015 que la pauvreté pouvait repartir à la hausse en 2014. Il n'en a rien été, et c'est grâce, selon elle, à la mise en oeuvre du plan pluriannuel contre la pauvreté.

Un tableau idyllique

Le tableau idyllique que la secrétaire d'Etat dresse des effets de celui-ci risque de hérisser quelque peu le poil des militants associatifs (par exemple au sein du collectif Alerte) ou des élus qui se coltinent quotidiennement la misère sociale. "Toutes les mesures mises en oeuvre depuis le début du quinquennat fonctionnent, assure Ségolène Neuville. [...] Ce plan permet d'empêcher le basculement dans la précarité. Plus encore, avec ce plan, nous avons remis le travail social au coeur des politiques sociales."

"Des dépenses publiques inutiles ?"

Audacieuse, elle assure que la pauvreté va reculer "dans les deux prochaines années" en raison de la prime d'activité qui "a bénéficié à 4,3 millions de personnes et offre un complément de revenus en moyenne de 164 euros par mois." Mais l'essentiel du propos n'est pas là. L'essentiel est de mobiliser l'ensemble des acteurs engagés dans la lutte contre la pauvreté contre le danger que représenterait le retour de la droite au pouvoir. Ségolène Neuville cite divers propos, notamment du candidat à la primaire, Nicolas Sarkozy, faisant croire qu'un allocataire du RSA toucherait autant que le salarié payé au Smic (alors que ce dernier gagne le double). Elle croit savoir que "les dépenses publiques inutiles" brocardées par l'ancien président concernent la revalorisation du complément familial ou celle du RSA socle qui ont bénéficié respectivement à 1,2 et 2 millions de ménages. Et elle en appelle à la défense d'une "République sociale" qui serait menacée par les propositions des Républicains.

Un demi-milliard pour l'APA

Le ton est encore plus offensif chez la secrétaire d'Etat Pascale Boistard qui, dans une tribune publiée par le site d'information Le Huffington Post, estime que "Nicolas Sarkozy propose le désengagement public" sur le vieillissement. La secrétaire d'Etat chargée des personnes âgées et de l'autonomie revient sur ses déclarations lors de l'université d'été des Républicains à la Baule. Elle répond à l'attaque en règle de l'ancien président contre le pouvoir accusé d'avoir abandonné les personnes âgées et les familles. Et de rappeler le "demi-milliard qui est débloqué par an pour la revalorisation (de 13 %) de l'APA". Les professionnels seront très heureux d'apprendre que la loi ASV permet "l'augmentation des salaires de la branche d'aide à domicile".

Loi ASV : la compte n'y est pas dans la Somme

La responsable gouvernementale en profite pour épingler "quelques présidents de conseils départementaux" membres des Républicains qui ne respecteraient pas la loi. Le département de la Somme (dont P. Boistard est élue) est en ligne de mire : le conseil départemental oblige, en effet, les personnes moyennement dépendantes (GIR 3 et 4) de passer par le système mandataire. Si bien que certaines personnes qui souhaitent passer par une structure prestataire se seraient vues priver d'allocation.

L'Arlésienne de la récupération sur succession

Mais l'intervention de la secrétaire d'Etat vise d'abord à dénoncer la proposition de l'ancien président contenue dans son livre "Tout pour la France" : "créer une aide à l'hébergement pour les personnes âgées dépendantes en maison de retraite, récupérable sur les successions". Pour Pascale Boistard, on est là dans une logique aux effets pervers : "La récupération sur succession peut conduire les personnes les plus modestes à renoncer à une aide sociale pour ne pas entamer l'héritage qu'elles souhaitent léguer à leurs proches". Et la très politique Boistard de conclure : "Notre histoire de l'aide sociale se voit mise à mal avec un retour aux principes les plus libéraux du XIXe siècle."

A ceux qui ne s'en seraient pas aperçus, révélons un scoop : la campagne présidentielle est déjà lancée. Sur tous les dossiers, même les plus techniques, les considérations électoralistes ne seront jamais très éloignées...  

 

"C'est quoi, l'ambition ?"
Nous avons demandé à Christophe Robert, directeur de la Fondation Abbé Pierre, de réagir à la tribune de Ségolène Neuville. "La secrétaire d'Etat a raison de parler de certaines avancées autour du RSA, la prime d'activité ou la revalorisation des minima sociaux. La France, à la différence de certains de nos voisins, a su préserver son modèle social. Pour autant, ce taux de 14 % est élevé car il faut revenir à 1996, je crois, pour arriver à un tel niveau. Je pose la question : c'est quoi l'ambition pour notre pays en matière de lutte contre la pauvreté ? Quand je vois que l'encadrement des loyers n'a pas été généralisé et que le montant des APL a été revu à la baisse récemment, je m'interroge. Je ne vous cache pas que je me fais du souci pour la campagne électorale quand j'entends certaines propositions de candidats. Sur la question du logement, il faudrait un consensus républicain."

 

Action sociale

L'action sociale permet le maintien d'une cohésion sociale grâce à des dispositifs législatifs et règlementaires.

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Noël Bouttier
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