E. Beynel, Solidaires : "Contre la loi travail XXL, construisons une mobilisaton intersyndicale"

E. Beynel, Solidaires : "Contre la loi travail XXL, construisons une mobilisaton intersyndicale"

19.06.2017

Représentants du personnel

Plus de 400 délégués ont participé, du 12 au 15 juin, au 7e congrès de Solidaires à Saint-Brieuc (Côtes d'Armor). Eric Beynel, porte-parole de l'union syndicale, nous explique pourquoi Solidaires appelle les salariés à se mobiliser dès ce lundi contre la réforme du code du travail. Interview.

Pourquoi appelez-vous les salariés à se mobiliser contre les futures ordonnances Macron sur le droit du travail ?

"Mais en raison du fonds du projet ! Depuis la campagne d'Emmanuel Macron, nous voyons bien qu'il s'agit d'une loi Travail XXL et que le nouveau président est dans la continuité de ce qu'il a proposé lorsqu'il était ministre de l'Economie. Nous tentons de bâtir une intersyndicale pour nous opposer à ce projet dangereux pour les salariés. Mais c'est vrai que c'est plus difficile dans une période post-��lectorale. D'autant que la stratégie du président Macron est de contourner les mobilisations en passant tout cela pendant l'été. Nous avons pris un long temps dans notre congrès pour analyser le contenu de ce projet.

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Mais ce contenu reste pour l'instant assez vague, non ?

Non, les grandes lignes nous semblent fixées. J'en citerai trois. Premièrement, il y a la poursuite de l'inversion de la hiérarchie des normes avec la volonté de donner la possibilité aux accords d'entreprises de déroger aux accords de branche sur des sujets de plus en plus nombreux. C'est de nature à accentuer la concurrence entre les entreprises, et donc à affaiblir les protections dont bénéficient les salariés.

Une seule instance, c'est moins d'élus et moins de moyens pour la défense des salariés

Deuxièmement, il y a aussi la fusion des instances représentatives du personnel. On l'a déjà vu avec la délégation unique du personnel : l'instance unique, cela signifie moins d'élus, moins de temps de délégation et moins de possibilité de se saisir pleinement de sujets complexes et différents. Réduire les instances, c'est donc réduire la capacité des représentants du personnel à analyser les conséquences d'un projet d'accord, par exemple. Troisième sujet : le plafonnement des indemnités prud'homales. C'est inacceptable pour nous. Il appartient au juge de définir le préjudice subi par le salarié et d'évaluer la sanction que doit subir l'employeur. 

Pensez-vous qu'une mobilisation intersyndicale soit possible, et que les salariés y soient prêts ?

Il faut construire cette mobilisation intersyndicale et nous nous y employons. Toutes les organisations syndicales doivent se sentir concernées. Nous avons déjà eu des positions communes avec la FSU, FO et la CGT contre la loi Travail l'an dernier.

Depuis, le contexte a changé. La prudence semble de mise chez FO...

Chaque OS a son propre tempo d'analyse et de réaction. Nous pensons qu'il faut chercher maintenant à mettre en place une riposte. Ce lundi 19 juin, il y a plusieurs rassemblements, à Paris à 18h devant l'Assemblée, mais aussi dans d'autres villes, contre les projets de réforme du code du travail. Nos délégués ont voté, jeudi 15 juin, une motion appelant les salariés à participer à ces rassemblements organisés à l'initiative de collectifs comme Front social mais aussi, dans certaines villes comme le Havre, à l'appel des intersyndicales qui s'étaient mobilisées contre la loi Travail. C'est un début de mobilisation.

Mais l'été va constituer une coupure, non ?

Nous sommes réalistes. Nous ne tablons pas sur une manifestation massive entre le 31 juillet et le 15 août ! Mais il nous faut préparer la suite pour la rentrée de septembre. Dans le bilan des mobilisations contre la loi Travail que nous avons dressé lors du congrès, nous avons constaté qu'il avait été difficile de mettre beaucoup de secteurs en grève. Il faut en tirer la leçon. Nous avons déjà prévu une action le 30 août lors de l'université d'été du Medef.

Où en est Solidaires concernant son implantation dans le privé ? Vous n'avez obtenu que 3,46% lors de la deuxième mesure d'audience des organisations syndicales. Déçu ?

Non, pas de déception. Nous consolidons nos implantations dans le secteur privé. L'an dernier, de nombreux syndicats d'entreprise se sont créés ou se sont renouvelés dans la protection sociale, le transport, les services, le monde associatif, etc. Par exemple, nous devenons représentatifs dans l'animation. En revanche, nous ne sommes plus représentatifs dans le caoutchouc, où nous étions bien présents, mais ce secteur a connu de nombreuses restructurations. Nous allons analyser tout cela et continuer notre travail d'implantation (*). Nous avons la satisfaction d'être de plus en plus nombreux lors de nos congrès : nous avions plus de 400 délégués présents, avec 43 organisations nationales et 60 organisations départementales présentes. Et nous cherchons aussi à travailler sur le plan international : notre congrès a adopté une résolution en faveur d'un réseau international de syndicats de lutte, dont le congrès aura lieu à Barcelone l'an prochain".

 

(*) Lors de son congrès, Solidaires a adopté une motion de "dénonciation des politiques managériales qui encouragent la répression antisyndicale et consduisent les salariés et militants au suicide".

Bernard Domergue
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