Lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a indiqué que le Covid-19 serait reconnu comme maladie professionnelle pour tous les personnels soignants. Plusieurs associations et syndicats réclament que le classement comme maladie professionnelle soit élargi à tous les salariés exposés dans les secteurs essentiels comme l'alimentaire. Au travers de ce débat, les modalités d'indemnisation des salariés sont en jeu.
Comparées à un arrêt de travail classique (50 % de votre salaire journalier de base), l'indemnisation pour maladie professionnelle est donc plus avantageuse. Elle demeure cependant forfaitaire donc limitée. Par ailleurs, le coronavirus étant une maladie nouvelle, aux conséquences et séquelles à long terme totalement inconnues, on peut aussi se demander si l'indemnisation pour maladie professionnelle sera adaptée aux victimes. Pour autant, plusieurs associations et syndicats demandent que la reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle soit élargie aux salariés qui ont travaillé pendant le confinement, notamment dans les secteurs essentiels comme l'alimentaire, les transports ou la sécurité, ou faute de pouvoir télétravailler.
Dans un communiqué de presse publié mercredi 22 avril, Force Ouvrière a demandé l’élargissement, au-delà des soignants, du dispositif de reconnaissance automatique en maladie professionnelle du Covid-19 pour tous les salariés exposés dans le cadre de leur activité. "Distribution, logistique, éboueurs, travailleurs sociaux, postiers, personnels de sécurité… De nombreux métiers, jusqu’ici très largement dévalorisés, contribuent aujourd’hui à maintenir notre pays en fonctionnement (...). La reconnaissance en maladie professionnelle est une mesure de justice sociale (...), Les efforts consentis ne peuvent être récompensés par de simples remerciements", conclut le communiqué.
L'UNSA Fonction publique a pointé quant à elle qu'"un enseignant accueillant des élèves, un policier procédant à un contrôle, un hospitalier exerçant à l’hôpital doit pouvoir bénéficier des dispositifs liés aux maladies professionnelles dans la fonction publique".
Depuis le 3 avril 2020, l'Académie de médecine apporte de l'eau au moulin de la reconnaissance du Covid-19. Dans l’attente de l'inscription du virus au tableau des maladies professionnelles, elle recommande "que les cas de maladie liée à une contamination professionnelle puissent être déclarés comme affection imputable au service pour les agents de l’État et des collectivités, en accident du travail pour les autres".
Mais d'autres voix s'élèvent pour réclamer un régime différent, au premier rang desquelles la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH). L'association demande la création d'un fonds d'indemnisation spécifique afin de pallier aux inconvénients liés au régime des maladies professionnelles, notamment dans son mode d'indemnisation et son exclusion de la fonction publique (lire notre brève). Après la prise de parole d'Olivier Véran à l'Assemblée nationale, la FNATH et l'ANDEVA (Association nationale de défense des victimes de l'amiante) ont publié un communiqué commun où elles qualifient la reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle de "jeu de dupes". Il s'agit selon elles d'une "indemnisation au rabais". Elles déplorent également que le gouvernement ne détermine pas précisément qui entre dans la définition de personnel soignant, et que les autres professions exposées doivent engager des procédures longues et coûteuses.
Enfin, dernière réaction en date, celle de la CFDT. Comme la FNATH, les secrétaires nationales du syndicat Catherine Pinchaut et Jocelyne Cabanal réaffirment la nécessité de la mise en œuvre "d’un dispositif ad hoc, pour tous les travailleurs mobilisés dans cette période et qui participent à la continuité sociale de l’activité".
L'avis de Morane Keim-Bagot, Professeur de droit privé à l’Université de Bourgogne : "Les maladies professionnelles, un système centenaire et inadapté"
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Lors d'un colloque virtuel organisé sur Youtube par l'Institut régional du travail de Nancy le 15 avril 2020 (donc avant l'intervention d'Olivier Véran), Morane Keim-Bagot, professeur de droit à l'Université de Bourgogne, a tenu une vidéoconférence gratuite et très claire sur le sujet "Le Covid-19, un nouveau risque professionnel ?". Elle y explique que le régime des maladies professionnelles est "centenaire et inadapté". L'indemnisation forfaitaire des séquelles y présente peu d'avantages. Si les séquelles ne sont pas permanentes, leur réparation est limitée au préjudice subi pendant la période traumatique. L'inscription du Coronavirus au tableau des maladies professionnelles est selon elle peu probable car elle nécessite de réunir l'instance paritaire qui en décide. Quant à la reconnaissance comme accident du travail, elle a été bornée par la Cour de cassation : la cause de la maladie doit se trouver dans un traumatisme soudain survenu pendant le temps de travail, la contagion étant insuffisante. De plus, la preuve de la matérialité de l'accident incombe au salarié. Enfin, la solution d'un fonds d'indemnisation a déjà été adoptée lors des crises du sang contaminé et de l'amiante. "L'avantage, c'est qu'il canalise les demandes. De plus, les victimes peuvent obtenir rapidement leur indemnisation sans rapporter la preuve du lien de causalité entre le dommage et le fait dommageable. Enfin, le fonds neutralise les différences de droits entre salariés, fonctionnaires et travailleurs indépendants". Il restera cependant à en déterminer les bénéficiaires, et par hypothèse, toutes les victimes du Covid-19 n'y auront pas accès... |
Représentants du personnel
Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux. Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.
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