Le constructeur PSA veut externaliser une partie du personnel de la direction informatique vers Cap Gemini. Délégué syndical CFE-CGC et élu au CCE, Laurent Oechsel juge ce projet contraire à l'esprit du contrat social signé en 2013. Son syndicat va demander en CCE une expertise sur la stratégie de sous-traitance du groupe. Interview.
Délégué syndical CFE-CGC sur le site de Carrières-sous-Poissy (Yvelines), élu au CCE de PSA, Laurent Oechsel travaille depuis 21 ans chez le constructeur automobile. Après avoir été responsable maintenance, travaillé dans la recherche et développement dans le domaine de l'électricité et l'électronique, il fait depuis peu partie de l'entité qui planche sur la validation et le développement des moteurs. Il réagit dans cette interview au projet d'externalisation d'une partie de la direction informatique de PSA vers Cap Gemini.
La direction de PSA a effectivement annoncé au CCE du 4 février son projet d'externaliser 198 salariés de la direction informatique, dont 47 personnes sur Rennes, le reste sur les sites de Velizy et de Poissy mais aussi sur Bessoncourt, Sochaux et Mulhouse. Ce serait la quatrième vague d'externalisations chez PSA.
Représentants du personnel
Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux. Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.
Ce projet pose selon nous un problème de loyauté. Il s'agit pour l'entreprise de faire usage de l'article L1224-1 du code du travail pour "vendre" des personnes à l'extérieur alors même que le contrat social que nous avons signé exclut les mobilités et départs forcés pour privilégier le volontariat (*). Ce qui nous préoccupe, c'est la logique financière plus que technique de ces externalisations. Elles se font au coup par coup, sous prétexte que ce ne sont pas des postes "coeur de métier". Le risque est de se priver de compétences internes qui nous feront défaut demain. Quand nous parlons avec nos collègues de Renault, l'entreprise d'où viennent certains de nos dirigeants, ils nous disent qu'ils sont allés trop loin sur la voie de l'externalisation au point de faire aujourd'hui marche arrière.
Pour eux, l'important est de garder un contact avec PSA plus que rester centrés sur leur seul métier. Parmi eux, il y a beaucoup de cadres et techniciens qui ont évolué par la promotion interne, ce qui n'est pas forcément très reconnu dans une société extérieure. Si Cap Gemini ne va pas bien demain, ces salariés pourraient être les premières victimes.
De nombreux salariés concernés sont issus d'une reconversion. Il convient de leur accorder un soin particulier, et nous pensons spécialement à ceux qui ont 55 ans et plus. Pour l'heure, nous demandons la possibilité pour les salariés de revenir au sein de PSA au bout de 36 mois, avec un retour sur le site d'origine. Nous voulons aussi une garantie de reprise des salariés dans tous les cas de défaillance, y compris en cas de difficulté professionnelle rencontrée par le salarié, et sans délai. Nous souhaitons aussi une indemnité de transfert, la prise en compte de la retraite complémentaire qui n'existe pas chez Cap Gemini, la garantie d'un suivi de carrière et de rémunération des salariés ex-PSA, la garantie d'un statut social équivalent à préciser dans le futur accord de substitution, la prise en compte d'une partie des frais de déplacement, l'absence de mobilité sur les futurs contrats, un bilan des externalisations réalisées avec Proservia, etc.

Mais nous contestons aussi le recours à ces externalisations compte-tenu de l'importance croissante du numérique dans l'automobile, un domaine où les entreprises françaises sont en retard. Au prochain CCE, à la mi-février, nous aurons les premiers retours de la direction des ressources humaines sur nos observations. Nous demanderons sans doute une expertise indépendante sur ces externalisations.
Nous avons une instance centrale du CHSCT chez PSA. Elle a d'ailleurs été saisie durant l'été 2015 au sujet des entretiens d'évaluations. Mais sur la question des externalisations, la direction préfère saisir les CHSCT locaux, pour collecter les avis des établissements pour le prochain CCE. A la CFE-CGC, nous avons mis en place un coordinateur afin de pouvoir faire le lien entre les différentes instances.
Nous allons être consultés en mars en vue d'une nouvelle négociation sur un accord compétitivité. Dans cette perspective, nous sommes en train de faire un bilan précis du suivi métiers par métiers. Vous savez que dans l'accord de 2013, nous avions défini des métiers sous tension (ndlr : nécessitant des recrutements), des métiers à l'équilibre et des métiers sensibles (c'est à dire menacés). Or nous avons l'impression que les RH passent trop facilement, quand cela les arrange, d'une qualification à l'autre. Il nous faut donc faire le point sur les engagements tenus et sur ceux qui ne l'ont pas été.
(*) Selon l'article L1224-1 du code du travail, "lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise".
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