Gilets jaunes : le secteur social également représenté

Gilets jaunes : le secteur social également représenté

07.12.2018

Action sociale

Samedi 8 décembre est présenté comme une date déterminante pour la suite du mouvement des Gilets jaunes. En son sein, des professionnels du social et du médico-social sont présents, amenant avec eux les problématiques souvent difficiles de leur travail. tsa est parti à la rencontre de quelques-uns de ces professionnels et a examiné ce qui se dit sur les réseaux sociaux.

"Aide soignante en Ehpad, je suis blouse blanche et gilet jaune". Sur Facebook, Manon explique le sens de son engagement. Elle détaille les raisons de sa colère. "Marre d'être payée comme de la merde, marre de voir la retraite de mes vieux baissée alors que leur chambre leur coûte toujours 2 000 €, marre de n'avoir que trois gants de toilettes pour 14 résidents le matin, marre d'être en sous-effectif, marre de ne pas pouvoir prendre le temps de parler à mes résidents, marre de courir [...]"

Conflit historique dans les Ehpad

Ce samedi, comme tous les samedis depuis le 17 novembre, ils devraient être nombreux, les professionnels du secteur social ou médico-social, à descendre dans la rue pour bloquer ronds-points ouNoël Bouttier avenues. Un immense ras-le-bol a saisi des secteurs d'activité comme la protection de l'enfance, l'hébergement, les missions locales, l'aide à domicile ou encore les Ehpad. Le conflit historique du début d'année dans les établissements pour personnes âgées dépendantes (lire ici et ) a été le signal de la profondeur du ras-le-bol de ceux qui travaillent sans compter pour les plus faibles de la société pour un salaire de misère. Sur ce point, Pascal Champvert, président de l'AD-PA, remarque que, malgré la mobilisation qui a débouché sur un moratoire dans la convergence tarifaire, "l'écoute du secteur est restée insuffisante". Lui même ne supporte plus d'entendre ses interlocuteurs déclarer : "Arrêtez vos histoires en disant qu'il n'y a pas assez de personnel !"

Points de méfiance

Au début de la mobilisation, certaines de ces caractéristiques étaient de nature à rebuter les professionnels du secteur. Une polarisation sur les taxes et un discours anti-impôt pouvaient effrayer des secteurs qui vivent grâce à la redistribution fiscale. De plus, certains incidents racistes ou homophobes ont pu refroidir les professionnels qui portent des valeurs diamétralement différentes.

Visibilité d'une certaine France

Mais sur le terrain, loin des grands médias, les choses ont été vécues différemment. La chaleur des communautés humaines, la rencontre de milieux et de générations qui ne se croisaient plus depuis longtemps, la visibilité de cette France qui tire la langue pour boucler les fins de mois... tous ces éléments ont facilité la mobilisation des travailleurs sociaux. 

"Le peuple est descendu dans la rue"

C'est le cas de Sophie, 52 ans, aide-soignante dans la région de Poitiers. "Je suis Gilet jaune depuis le début. Financièrement, c'est de plus en plus difficile", explique-t-elle. Elle insiste sur l'augmentation des salaires. "Dans la fonction publique, nos salaires sont gelés. Les écoles d'aides-soignants ont vraiment du mal à recruter." Elle raconte une vie difficile. Un grand enfant sans travail. Un père en Ehpad qui coûte 2 400 € chaque mois. Une maman qui vit dans un petit appartement avec 500 € par mois. Une maison de famille qui a été vendue pour payer l'Ehpad... Sophie ne croit pas aux syndicats : "Je ne trouve pas qu'ils nous représentent". Ce qu'elle gardera de ces semaines de mobilisation : "Pour une fois, le peuple est descendu dans la rue."

"On se bat pour notre statut"

Dans l'Aisne, Sandrine est également sur la brèche depuis des semaines. "On porte nos gilets, explique-t-elle, mais on ne se retrouve pas sur les ronds-points. En effet, en tant qu'assistante familiale, nous pouvons être appelés à tout moment pour prendre en charge un enfant." Elle fait directement le lien entre cet engagement et la défense de son métier. "Depuis deux ans, nous écrivons des cahiers de doléances pour les assistants familiaux. On se bat pour notre statut", raconte-t-elle. Elle dénonce notamment le fait que les conseils départementaux maintiennent dans la précarité ces professionnels, usant et abusant des procédures de licenciement. "Il est très difficile pour nous de faire grève car nous risquons de perdre notre agrément", assure Sandrine qui est syndiquée à la CGT. 

"La casse ne mène à rien"

Par rapport au mouvement des Gilets jaunes, elle a constaté une évolution dans le groupe de Soissons. "La première semaine était très cacophonique. Nous avions du mal à trouver notre voie. Depuis deux semaines, j'ai pu me faire entendre et j'ai trouvé une écoute. Je revendique mon droit à avoir un salaire décent." Elle dit rejeter la violence : "la casse ne mène à rien". Et elle dédie son combat à la jeune majeure qui "a été abandonnée à sa majorité par le département" et qu'elle accueille à titre gracieux.   

Noël BouttierGilet jaune ou gilet rouge ?

Sur les réseaux sociaux, les appels à rejoindre le mouvement des Gilets jaunes se multiplient. Soiz explique : "Nous, les travailleurs sociaux, premiers spectateurs de la misère économique et sociale, pourquoi on ne nous voit jamais ? Pourquoi on ne se mobiliserait pas nous aussi ? Il est temps de se réveiller et de se faire entendre." Un autre professionnel s'interroge : "Pour faire reconnaître la précarité de leur statut et de leurs conditions de travail, les salariés du domicile doivent-il revêtir eux aussi un gilet jaune ou plutôt rouge ? Le rouge de la colère et du signal d'alarme."

Au-delà de la manif de samedi, un autre rendez-vous spécifique au secteur permettra de mesurer l'importance de la mobilisation et l'éventuelle convergence avec les Gilets jaunes. Mardi 11 décembre, une manifestation nationale, soutenue entre autres par la CGT et Sud, est organisée à Lille pour "la bataille du social". Décidément, cette année 2018 aura été particulièrement combative...     

 

Pas d'accord avec les Gilets jaunes !
Sur Facebook, tous les professionnels ne sont pas des sympathisants du mouvement. "Y avait-il autant de monde dans la rue quand il y a eu grève pour les soignants ? Les Ehpad ? Pas un seul soutien...la seule chose qu'on entend en parlant des hôpitaux et maisons de retraite, c'est la maltraitance", dénonce Marie. Autre son de cloche avec Caroline : "Même si l'on paye beaucoup de taxes et impôts, je n'oublie pas à quoi servent ceux-ci. Je n'oublie pas que la France paye avec les impôts et les taxes, plus de 300 aides sociales et fiscales, l'éducation gratuite, la sécurité sociale, la CMU pour les pauvres, le RSA, la prime d'activité, la prime de Noël [...]"

 

Action sociale

L'action sociale permet le maintien d'une cohésion sociale grâce à des dispositifs législatifs et règlementaires.

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Noël Bouttier
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