Grippe en Ehpad : le vaccin plus efficace pour les personnels que pour les résidents

Grippe en Ehpad : le vaccin plus efficace pour les personnels que pour les résidents

10.01.2017

Action sociale

L’Ehpad lyonnais touché par l’épidémie grippale concentre aujourd’hui l’attention institutionnelle et médiatique. Analyse et retour d’expériences pour les autres établissements.

L’Ehpad Korian Berthelot de Lyon (Rhône) a fait la une des médias ces derniers jours après l’épidémie de grippe qu’il a connu. Pour rappel, l’épisode a provoqué la contamination de 72 personnes âgées d’une moyenne d'âge de 91,5 ans, et le décès de 13 d’entre elles en deux semaines. Six personnes sont encore hospitalisées. Un rapport de l’Igas est attendu d’ici le 17 janvier. Une réunion de crise devait avoir lieu hier à la DGCS en fin de journée.

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Une explosion de l’épidémie dans la région en décembre

Si l’épidémie semble sévère au sein de cet Ehpad, la surveillance épidémiologique de l’Institut national de veille sanitaire (INVS) indique néanmoins pour fin décembre une progression de 115 % de la maladie dans la région, soit 616 cas pour 100 000 habitants. Autre enseignement de ce bulletin épidémiologique, les personnes de 65 ans et plus sont proportionnellement plus touchées par la grippe que les années précédentes. En 2016, elles représentent 74 % des cas signalés, contre 41 % en 2015.

Loi santé du 26 janvier 2016

Morceaux choisis d'un texte aux multiples facettes

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Un cas d'école de gestion d'événement indésirable grave

Même si l'épidémie grippale au sein de l'Ehpad lyonnais a été signalée dès les premiers signes à l'ARS, "le cas de l'Ehpad lyonnais doit sensibiliser les Ehpad aux EIG", estime Anne Savey, responsable du CCLIN Sud-Est (Centre de coordination de la lutte contre les infections nosocomiales). "Le secteur médico-social est en pleine restructuration de ses procédures de signalement, c'est une bonne chose." Ces multiples hospitalisations et décès imputés à la grippe surviennent en effet alors que viennent de paraître un décret (décret du 25 novembre 2016) sur les modalités de signalement des événements indésirables graves (EIG). Un nouveau décret sur le signalement des infections liées aux soins (IAS) devrait être publié courant janvier.

 

Avis d'experts

Pour éclairer la situation, un praticien et un spécialiste ont répondu à nos questions : Gaël Durel, médecin coordonnateur en Ehpad et co-président de la fédération de médecins coordonnateurs MCOOR, et Bruno Lina, virologue spécialiste de la grippe au CHU de Lyon.

Parmi les treize personnes décédées, six étaient vaccinées…

Bruno Lina : « L’efficacité du vaccin pour les plus de 80 ans est de 45 %, contre 65 % pour une personne plus jeune. Vacciner les résidents ne suffit donc pas comme leurs défenses immunitaires sont affaiblies du fait de leur polypathologie. Il faut aussi et surtout vacciner le personnel et si possible l’entourage des résidents. La campagne de vaccination doit démarrer début octobre afin d’être prêt à partir du 15 novembre. La prise en charge d’une épidémie se prépare. Elle ne devrait pas intervenir au niveau de la réaction mais de la prévention. »

La propagation massive de l’épidémie dans cet Ehpad est-elle liée à la survenue précoce de la grippe en décembre ?

Bruno Lina : « L’épidémie a commencé plus tôt cette année qu’entre 2010 et 2016, mais elle ne revêt pas un caractère précoce inhabituel. 30 % des épidémies se déclarent avant le 15 décembre. »

En cas d’épidémie au sein de l’établissement, l’isolement de la personne contaminée est-il une option ?

Gaël Durel : « L’isolement des personnes présentant des troubles infectieux reste la première mesure à appliquer. Au-delà de 48h, en revanche, il est compliqué à mettre en place. C’est une vraie problématique pour le lieu de vie collectif qu’est l’Ehpad. Une proportion importante de résidents présente des troubles du comportement.

Dans ce cas, comment arbitrer entre sécurité sanitaire et liberté d’aller et venir ?

Gaël Durel : Il peut s’agir de supprimer les animations ou de limiter les entrées pour réduire le risque de contamination. Pour autant, peut-on décemment enfermer quelqu’un dans sa chambre ou l’enchaîner à son fauteuil ? Cette personne ne viendra de toute façon pas prendre son repas avec les autres résidents. Mais peut-on lui interdire de quitter sa chambre ? L’équation est difficile à résoudre. L'administration de psychotropes va majorer les troubles infectieux tandis que l’isolement lui-même va majorer les troubles comportementaux. C’est insoluble. »

Marie Pragout
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