L'Unapei veut braquer les projecteurs sur le polyhandicap

L'Unapei veut braquer les projecteurs sur le polyhandicap

29.03.2016

Action sociale

Un Livre blanc sur le polyhandicap déclinant des tas de recommandations, une tournée des régions pour faire signer un pacte sur ce thème... l'Unapei engage ses forces pour que le polyhandicap cesse d'être le grand oublié des politiques publiques du handicap. Un changement de regard et un engagement des pouvoirs publics sont espérés.

"L'étrangeté de leur apparence déconcerte, leur très grande vulnérabilité les différencie des autres personnes handicapées. Elles peuvent susciter à la fois violence et compassion, rejet et souci de l'autre." Présidente de la commission polyhandicap au sein de l'Unapei, Coryne Husse sait trouver les mots pour parler de cette singularité si souvent oubliée. Parce que les situations sont complexes, qu'elles relèvent de spécialités n'ayant pas l'habitude de travailler ensemble, parce que les polyhandicapés sont plus exposés au risque de mort prématurée, ce champ est encore trop souvent négligé.

Humanité niée

Pour sortir de cette situation, l'Unapei a décidé de rendre public un Livre blanc qui développe un ensemble de préconisations sur les différentes dimensions de la vie de ces personnes avec l'objectif de faire reconnaître leur place. "Souvent, leur humanité est niée, explique Christel Prado, la présidente nationale." Le document de l'Unapei entend (re)donner des outils et des espaces pour débloquer ces impasses dans lesquelles sont cantonnés les personnes et leur famille.

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Modes d'expression non verbale

Tous les moments clés sont explorés, de l'annonce du handicap à l'accompagnement médical en passant par l'accès à la scolarité et aux loisirs, sans oublier les échanges entre parents et professionnels. Sur le premier point, l'Unapei explique que "les étapes successives de l'annonce ne s'improvisent pas" et qu'il faut donc former les professionnels à cette mission. En matière de communication, soutient l'organisation, il importe de "développer, mutualiser et diffuser les outils d'expression et de communication pour faciliter le recueil de la volonté des personnes". "Trop souvent, on ne leur donne pas la possibilité de s'exprimer. Les professionnels doivent développer des techniques d'expression non verbales", insiste Christel Prado dont la réflexion est nourrie par sa propre expérience d'une communication difficile avec sa fille, jeune adulte polyhandicapée.

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Décloisonner les interventions

Sur le lieu de vie, l'Unapei refuse de cantonner les personnes dans l'alternative entre vivre chez leurs parents ou dans un établissement. Il est parfois possible que les polyhandicapés puissent vivre à leur domicile en organisant toute une palette de services à domicile. De même, des séjours temporaires en établissement doivent être encouragés. Dès lors, les MDPH auront à "introduire une plus grande souplesse dans les orientations."

Les établissements - dont certains sont gérés par les Udapei - sont appelés également à réfléchir à leur fonctionnement pour décloisonner davantage le médical, l'éducatif et la vie sociale. En effet, explique le Livre blanc, "les problématiques de grande dépendance supposent une transversalité dans l'accompagnement et le suivi de chaque personne, une grande cohérence des interventions de l'ensemble des professionnels impliqués."

L'organisation insiste également sur la formation initiale et continue des professionnels sur cette dimension spécifique. Dans les établissements dédiés au polyhandicap, certains modules de formation doivent être communs à l'ensemble des professionnels.

Prise de conscience générale

Par-delà sa dimension informative, à quoi va servir ce Livre blanc ? La présidente de l'Unapei décrit un double objectif. Dans un premier temps, cet outil vise à ouvrir des débats et des réflexions pour changer les regards et pratiques. En région, les associations volontaires sont invitées à signer ce Pacte polyhandicap et à enclencher des actions dans les établissements qu'elles gèrent. Une première signature devrait intervenir le 23 avril dans le Loiret avec trois structures dont l'Adapei et les PEP. "Certaines actions peuvent se faire sans moyens nouveaux, mais il faut une prise de conscience générale", explique Christel Prado.

Un plan national pour le polyhandicap ?

Mais cela ne suffira pas. Une meilleure prise en compte des besoins spécifiques des personnes polyhandicapées suppose plus de temps pour les professionnels, des services doivent s'ouvrir ou revoir leur mode d'accompagnement... Tout cela exige des moyens nouveaux. Selon la présidente de l'Unapei, la secrétaire d'Etat Ségolène Neuville s'est exprimée l'an dernier en faveur d'un plan national polyhandicap. Avec l'autisme qui commence à sortir du trou noir dans lequel il était plongé (lire le dossier du magazine tsa de mars), le polyhandicap fait partie des deux champs les plus problématiques. Mais la situation n'est pas nouvelle. "En 2003, se souvient Christel Prado, les agences régionales d'hospitalisation avaient fait un bilan des hospitalisations inadéquates. C'était très souvent lié à des situations d'autisme ou de polyhandicap."

"Nous n'attendons pas tout des pouvoirs publics"

La cause du polyhandicap peut-elle être entendue dans cette dernière année du quinquennat ? "Vous savez, explique la présidente de l'Unapei, nous n'attendons pas tout des pouvoirs publics. La première étape, c'est de mobiliser tout notre réseau sur le terrain pour convaincre les décideurs de l'importance de cet enjeu. Et puis si un plan national est décidé, notre Livre blanc peut aider à en constituer l'architecture".

Noël Bouttier
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