La CGT veut un débat sur l'avenir de Renault et de la production automobile en France
14.11.2023
Représentants du personnel

Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT, se déplace aujourd'hui sur le site de l'usine Flins (Yvelines) pour soutenir le débrayage lancé par la CGT. Selon le syndicat, les salariés de ce site, qui doit cesser de produire des véhicules neufs l'an prochain, craignent pour leur emploi et leur avenir, alors que Renault a réorganisé ses activités et doit appliquer la nouvelle convention collective de la métallurgie. De son côté, FO souligne que 90% des salariés du site ont déjà basculé dans les nouvelles activités.
Le syndicat CGT de l'usine Renault de Flins, dans les Yvelines, appelle aujourd'hui les salariés du site à débrayer (*). Ils seront soutenus par des représentants syndicaux CGT venus d'autres sites, comme Florent Grimaldi, secrétaire du syndicat CGT de Renault-Lardy (Essonne), mais surtout par leur secrétaire générale nationale, Sophie Binet, qui va interpeller l'Etat sur le maintien en France d'une filière automobile forte. "Pour nous, la venue de Sophie Binet, c'est une façon de montrer que le problème de l'emploi chez Renault est un enjeu national qui dépasse Flins et qui concerne tous les sites en France", nous indique Ali Kaya, le secrétaire du syndicat CGT de Flins, issu de l'emboutissage.
Pour Florent Grimaldi, la venue sur le terrain de la jeune dirigeante syndicale est aussi une façon d'alerter l'opinion et les politiques sur les enjeux de la transition écologique et de poser des questions stratégiques : "Renault continue de faire de l'argent en proposant des gros SUV électriques très coûteux et très lourds mais aux marges importantes. D'une part, ce n'est pas terrible pour le climat et d'autre part, nous ne produisons pas en France des véhicules électriques légers qui soient abordables, cette production est faite à l'étranger".
Ali Kaya espère une forte mobilisation. Le site de Flins emploie 2 400 salariés sont 1 877 sont "estampillés" Renault. Mais ils ne savent pas encore, nous dit Ali Kaya, vers quelle filiale ils vont basculer. En effet, Renault a réorganisé ses activités autour de deux pôles, un pôle "Ampère" pour les activités électriques, et un pôle "Horse" pour les activités thermiques et hybrides. Problème : Flins, qui fabriquait depuis 70 ans des véhicules (**), n'en produira plus dès la fin mars prochain. La production de la Zoé devrait cesser, au bénéfice d'une activité dite d'économie circulaire, Renault voulant faire de ce site "la Refactory, première usine européenne d’économie circulaire dédiée à la mobilité, avec un objectif de bilan CO2 neutre d'ici à 2030".
Autrement dit, adieu l'assemblage de véhicules neufs, et bienvenue à la réparation, au reconditionnement, aux pièces détachées (une activité transférée de Choisy-le-Roi), et aux échanges standard de moteurs et boites de vitesse. Selon la CGT, les salariés s'inquiètent de cette évolution devant la lente montée en puissance de ces activités, et ils craignent surtout que celles-ci ne nécessitent beaucoup moins de personnel.
Florent Grimaldi partage ces doutes. Le site d'ingéniérie de Renault Lardy n'emploie plus aujourd'hui que 1 200 personnes dont 700 salariés sous-traitants, soit des effectifs divisés par deux depuis octobre 2018. "Alors que notre centre devait être le fer de lance de Renault dans l'innovation électrique afin de lutter contre la concurrence chinoise, Renault a réduit l'emploi et ses investissements". Sur l'effectif total de Lardy, 80% des salariés Renault ont basculé dans l'entité Ampère, une activité elle-même subdivisée en plusieurs filiales (***). "La perte du nom Renault sur le contrat de travail, symboliquement, c'est très fort", souligne le délégué syndical. Les droits sociaux survivent pour l'instant, et au moins pour 15 mois, mais une négociation est en cours pour aboutir à un socle social valable pour tous, et que Florent Grimaldi redoute d'être orienté à la baisse.
Aux enjeux d'emplois et de changements de métiers s'ajoutent les questions liées à l'application, au 1er janvier prochain, d'une nouvelle convention collective dans la métallurgie. A l'inverse de la CFE-CGC qui estimait récemment que Renault s'était sérieusement attelé à ce chantier (lire notre article), les deux délégués syndicaux de la CGT affirment que Renault reste très en retard. "Ca suscite beaucoup d'inquiétude chez les salariés. Des caristes et des retoucheurs (ndlr : ceux qui interviennent sur des problèmes de qualité en fin de production), qui avaient professionnellement évolué, craignent d'être ramenés au même niveau que les opérateurs", dit le secrétaire du syndicat CGT de Lardy, un site d'ingénierie qui travaille aussi bien sur le thermique que sur l'hybride.
Sur le site de Flins, Ali Kaya déplore également l'absence de transparence sur les nouvelles classifications : "Nous sommes à un mois et demi de ces nouvelles classifications. Les managers ne communiquent certains éléments que si les salariés les leur demandent alors que les salariés sont censés disposer d'un mois pour réagir. De nombreux salariés ne devraient découvrir leur nouvelle classification que fin janvier, avec leur bulletin de salaire".
(*) Les autres syndicats, qui disent s'être investis pour éviter la perspective d'une fermeture après l'arrêt de la production, n'appellent pas à cette action.
(**) Ont été notamment produites à Flins la Dauphine, la Renault 4, la Renault 5, la Clio, la Micra (Nissan), la Zoé.
(***) Ampère SAS, Apère Cléon, Ampère Software, Ampère Electricity.
Mounir Mestari, de FO : "90% des salariés de Flins ont déjà basculé sur les nouvelles activités"
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FO ne partage pas la vision de la CGT concernant le site de Flins. Selon le délégué syndical groupe de FO Mounir Mestari, "il y a eu certes un coup de massue avec la décision d'arrêter la production, alors que notre site faisait des voitures depuis 1952, et tout n'est bien sûr pas parfait dans la reconversion du site". Mais il souligne d'une part que cette décision n'est pas récente et qu'elle a été anticipée : "90% des effectifs de Flins ont déjà basculé dans les nouvelles activités de l'économie circulaire". Et le délégué syndical d'ajouter que la direction de Renault, qui s'est engagée à un niveau d'emploi de 3 000 personnes sur le site à l'horizon 2030, vient d'annoncer 150 recrutements en CDI en 2024. "Tout un processus de formation, sur les métiers de la carrosserie, de la peinture, sur les retouches lourdes par exemple, a été menée avec l'Afpa, et un campus a été ouvert sur le site", explique le syndicaliste, qui était lui-même chef d'équipe dans l'atelier de montage de Flins. |
Représentants du personnel
Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux. Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.
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