Législatives : quand le candidat de la "République en marche" est l'ancien secrétaire d'un syndicat CGT...

Législatives : quand le candidat de la "République en marche" est l'ancien secrétaire d'un syndicat CGT...

16.06.2017

Représentants du personnel

L'Assemblée nationale sera dominée par les cadres si la vague en En Marche se confirme au second tour. S'il est élu, Denis Sommer, candidat dans la 3e circonscription du Doubs, sera donc une sorte d'exception car cet ancien ouvrier du site sochalien de Peugeot a été pendant 15 ans syndicaliste. Comment un ancien secrétaire de syndicat CGT en vient-il à soutenir le mouvement d'Emmanuel Macron ? Interview.

C'est un cas à part : Denis Sommer, ancien délégué syndical CGT de Peugeot à Sochaux (Doubs), est en lice pour le deuxième tour des élections législatives dans la troisième circonscription du Doubs sous l'étiquette "République en marche". Il est arrivé en tête au premier tour, avec 33,8% des suffrages exprimés, devant le candidat des Républicains, Frédéric Cartier (25%). Il faut dire que l'engagement en politique de l'ancien représentant du personnel n'est pas récent. S'il a rallié le mouvement d'Emmanuel Macron en mai 2017, Denis Sommer était déjà maire PS de Grand-Charmont et conseiller régional Bourgogne-Franche-Comté, après avoir été vice-président de la Région jusqu'en juin 2016. Comment un ancien secrétaire de syndicat CGT en vient-il à soutenir le mouvement d'Emmanuel Macron ? Interview.

Comment passe-t-on de la CGT au mouvement de la République en Marche ?

Denis Sommer : "J’ai repris mes études à 35 ans. J’ai créé une imprimerie associative, j’ai enseigné l’économie et la gestion dans un lycée agricole. Ce travail sur les questions économiques et internationales m’a ouvert les yeux. Comment, réellement, peut-on faire évoluer les choses si on ne réfléchit pas à la façon dont la France peut s’adapter à la mondialisation ? Nier la réalité de la mondialisation, c’est refuser de se donner les moyens de toute possibilité effective de transformation, y compris sociale.

Avec la Région, nous avons formé 15 000 personnes qui étaient en chômage partiel

Par ailleurs, j’ai été élu à la Région où je me suis beaucoup investi durant la crise économique, en 2009-2010, sur les questions économiques et sociales. En 4 mois, nous avons réussi à monter un programme de sécurisation de l’emploi qui a fédéré du Medef à la CGT et qui a touché 15 000 personnes de la région. Nous avons utilisé le chômage partiel pour faire monter les compétences par la formation professionnelle, grâce à l’appui de la Région. Je suis très attaché à cette façon de travailler et j’ai trouvé que la démarche d’Emmanuel Macron allait dans le même sens. C’est pourquoi j’ai envoyé une note sur le dialogue social à Jean-Pierre Delevoye quand il présidait le conseil économique et social (*).

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Mais partagez-vous la réforme du droit du travail envisagée par le gouvernement ?

Cette réforme, vous la connaissez, vous ? Moi pas ! Les partenaires sociaux travaillent en ce moment avec le gouvernement et j’espère qu’ils parviendront à aboutir �� un texte partagé.

Mais la CGT, notamment, se demande si tout n’est pas déjà écrit…

La CGT est dans son rôle. Mais je ne pense pas que tout soit déjà écrit, loin de là. La question essentielle, c’est bien de savoir comment parvenir à une économie française compétitive dans le monde actuel avec davantage d’emplois.

Il faut trouver de bons compromis

La précarité du monde du travail ? Mais elle existe déjà ! Justement, le projet d’Emmanuel Macron vise à miser sur la formation professionnelle, dont on ne peut pas dire qu’elle bénéficie d’abord aux ouvriers ou aux demandeurs d’emploi. Sur ce dossier, il faut trouver le bon compromis, comme d’ailleurs sur la protection sociale. Nous ne sommes plus dans la France de 1945 et le financement de la protection sociale ne peut plus entièrement reposer sur le travail. Il faut trouver des recettes de façon plus large, et je rappelle que c’est bien un socialiste, Michel Rocard, qui a imaginé et mis en place la CSG (contribution sociale généralisée). De plus, baisser les cotisations permettra de redonner du pouvoir d’achat aux salariés.

Vous avez été délégué syndical et secrétaire du syndicat CGT de Peugeot. Que vous a apporté cette expérience ?

J’ai effectivement été délégué syndical et même délégué de groupe et j’ai d’ailleurs fait partie des militants qui ont lancé l’affaire des discriminations syndicales chez Peugeot, mais je dois dire que je suis parti avant que l’affaire devienne judiciaire. Ce que tout cela m’a apporté ? Quand vous êtes délégué syndical, vous travaillez beaucoup, vous écrivez beaucoup, vous parlez beaucoup. Si bien que lorsque j’ai repris des études pour changer de vie à 35 ans, finalement, cela n’a pas été trop difficile pour moi car les mandants syndicaux constituent, en quelque sorte, une formation professionnelle et une promotion sociale. Maintenant, quand on en sort, on se rend compte que la réalité est plus complexe que ce qu’on imaginait.

Si vous êtes élu député, siégerez-vous à la commission des affaires sociales ?

Je ne sais pas car je ne connais pas bien encore comment fonctionne l’Assemblée nationale et j’imagine qu’il y aura aussi une répartition collective par groupe politique. Mais les sujets qui me passionnent sont l’économie, la compétitivité des entreprises et le dialogue social.

 

(*) Ndlr : Président du CESE de 2010 à 2015, Jean-Pierre Delevoye a présidé la commission d’investiture de La République en marche, pour les législatives de 2017.

 

Bernard Domergue
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