Marie-Anne Montchamp : la CNSA doit travailler sur la transformation de l'offre

Marie-Anne Montchamp : la CNSA doit travailler sur la transformation de l'offre

30.11.2017

Action sociale

Invitée par l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis), Marie-Anne Montchamp a précisé sa vision de la CNSA dont elle vient de prendre la présidence. Elle fixe comme ambition une réflexion approfondie sur la transformation de l'offre aussi bien pour les personnes âgées que handicapées. Elle plaide par ailleurs pour une gestion pluriannuelle des ressources.

C'est ce qui s'appelle un retour aux sources. Marie-Anne Montchamp (1), la nouvelle présidente du conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), avait porté au sein du gouvernement Raffarin la loi qui avait institué la CNSA. C'était en 2004 et c'était, selon elle, un "organisme innovant, une audace" dans le mesure où il associait l'ensemble des composantes des politiques de l'autonomie : l'Etat, les départements, les syndicats et les associations dans le champ des personnes âgées et handicapées. Treize ans plus tard, M.-A. Montchamp se retrouve à la tête du conseil de la CNSA et elle goûte d'arriver à ce moment particulier où cet "Ovni administratif" doit évoluer.

Les quatre fonctions de la CNSA

Devant les journalistes de l'Ajis, l'ancienne secrétaire d'Etat a estimé que la caisse devait remplir quatre fonctions qu'elle assume déjà peu ou prou, mais qu'il lui faut renforcer. D'une part, c'est un lieu d'influence de la décision politique, pas au sens d'un lobby. "La caisse, précise-t-elle, a une forte capacité à influencer, à nourrir et à clarifier les politiques dans le champ de l'autonomie." Seconde fonction : l'animation des réseaux, le rapprochement des interlocuteurs. Même si la caisse n'a pas vocation à intervenir dans le conflit entre l'Etat et les départements, le fait est que ces deux parties peuvent dialoguer au sein du conseil.

Des financements pluriannuels ?

D'autre part, la CNSA a une dimension scientifique. "La caisse produit de la science, estime la présidente. Elle a permis l'émergence comme objet de recherche des questions de l'autonomie." Enfin, revenant sur la polémique concernant le prélèvement de 100 M€ sur les fonds de la CNSA pour financer le fonds d'aide aux départements, Marie-Anne Montchamp affirme que cela doit être l'occasion de réfléchir à la pluriannualisation des financements. Elle appelle de ses voeux une gestion dite prudentielle en la matière. "La caisse n'a pas à avoir de réserves, soutient-elle, mais elle doit s'assurer dans une vision pluriannuelle que ses politiques pourront être financées."

Comment convaincre Bercy ?

Un séminaire du conseil de la CNSA est prévu début février pour, entre autres, définir cette nouvelle gestion souhaitée par la présidente. L'objectif devrait être de montrer, notamment à Bercy, que les ressources affectées à la CNSA servent aux publics concernés et ne doivent plus être récupérées par l'Etat quand bon lui semble. Cela suffira-t-il à changer la pratique du ministère des finances ? Rien n'est moins sûr, mais M.-A. Montchamp entend sortir d'une simple position d'indignation pour tenter de faire bouger les lignes. Cependant, elle considère qu'il n'est pas possible de sanctuariser des ressources. "Aucun organisme public ne peut considérer que les produits financiers qui lui sont attribués lui appartiennent", affirme-t-elle.

Des Ehpad hors les murs         

Pour Marie-Anne Montchamp, l'un des enjeux stratégiques pour la caisse est de réfléchir à la transformation de l'offre à "10, 20 ou 30 ans". "Il ne s'agit pas simplement de répondre aux besoins d'aujourd'hui", précise-t-elle. Aussi a-t-elle décidé d'engager la réflexion prospective de la CNSA sur trois ans autour de cette question. Il faut notamment réfléchir à l'évolution des Ehpad qui pourraient devenir, en dehors de leur fonction traditionnelle, des Ehpad hors les murs, c'est-à-dire des lieux ressources pour les professionnels engagés dans le maintien à domicile.

La question du domicile

Sinon, faut-il fermer tous les établissements handicap, comme l'a demandé la rapporteure de l'Onu sur le droit des personnes handicapées ? La présidente de la CNSA pourfend "la brutalité" de cette déclaration, mais estime qu'un électrochoc peut permettre de réfléchir à des alternatives, avec des structures hors les murs. Dans le cadre de la réflexion prospective sur la transformation de l'offre, elle propose de se pencher sur la question du domicile : "A quelles conditions peut-on faire d'un établissement le domicile pour une personne fragilisée par le vieillissement ou le handicap ?"

Décloisonnons, décloisonnons...

Sur la question du décloisonnement, elle constate que le sanitaire continue à prendre le dessus sur le médico-social. Or, estime Marie-Anne Montchamp, "le prendre soin et le maintien en société doivent prendre toute leur place. Sinon, nous avons un risque très sérieux de dégradation du sanitaire". Celui-ci aura bien du mal à faire face, seul, aux nouvelles demandes et à la montée des pathologies chroniques.

Ralentisseurs à la perte d'autonomie

La présidente de la CNSA se félicite de la politique induite par la loi ASV qui permet de "fabriquer des ralentisseurs à la perte d'autonomie". "Les actions proposées notamment par les conférences des financeurs s'intègrent à une politique de santé globale", dit-elle en citant abondamment la stratégie nationale de santé voulue par la ministre Buzyn. Sur le champ du handicap, l'ancienne secrétaire d'Etat qui avait fait voter la loi de 2005 constate qu'il reste toujours "un plafond de verre" dans l'accès à l'emploi voire à la scolarité. Elle attend beaucoup des grandes ambitions affichées par l'exécutif en ce domaine.

Une 3e phase pour la CNSA

En conclusion, la nouvelle présidente estime que la CNSA doit entrer dans une troisième période de sa (encore) courte existence. Après la phase de lancement portée par le duo Cordier/Piveteau, elle est passée en vitesse de croisière en développant tous ses services et en produisant des réflexions très ciblées. Là voilà maintenant engagée dans une phase de réflexion plus globale sur la transformation de l'offre. C'est, en tout cas, le souhait de sa nouvelle présidente qui, par ailleurs, s'inscrit dans la majorité présidentielle.

(1) Un portrait lui est consacré dans le numéro de décembre du magazine tsa.

 

Les incidences de la réforme tarifaire des Ehpad
Interrogée sur la réforme tarifaire pour les Ehpad, la présidente a cité une étude toute récente de la CNSA qui a établi le bilan par catégorie d'établissements. En termes d'impact global (sections soins et dépendance), il est partout positif, mais dans des proportions tout à fait différentes. Le privé commercial gagne près de 200 M€ ; le privé non lucratif perd 56 M€ et en gagne 160. Quant aux Ehpad publics, le bilan est moins positif avec un solde de 100 M€ : ils perdent 144 M€ et en gagnent 244 M€.

 

Action sociale

L'action sociale permet le maintien d'une cohésion sociale grâce à des dispositifs législatifs et règlementaires.

Découvrir tous les contenus liés

Loi santé du 26 janvier 2016

Morceaux choisis d'un texte aux multiples facettes

Je télécharge gratuitement
Noël Bouttier
Vous aimerez aussi

Nos engagements