Peut-on valoriser l’aide à domicile sans revaloriser le métier ?

Peut-on valoriser l’aide à domicile sans revaloriser le métier ?

02.02.2017

Action sociale

Le gouvernement a lancé le 1er février une campagne visant à redorer le blason de l'aide à domicile auprès des actifs. 30 000 nouveaux emplois sont attendus d'ici 2030. Si ces métiers sont aujourd'hui légèrement plus attractifs du fait de la refondation de la branche, ils restent parmi les métiers les moins rémunérés, en-deçà du Smic. Eclairage et perspectives.

Nouvel acte de la refondation de l’aide à domicile dans le cadre de la loi Vieillissement, le ministère des affaires sociales et de la santé vient de lancer une campagne nationale de promotion de l’aide à domicile. Le slogan « Aider les autres, c’est mon métier » sera visible sur des affiches, bannières web et dépliants diffusés largement au sein de tous les organismes publics.

Un métier qui s’est certes professionnalisé...

Pour valoriser le métier, le ministère met en avant plusieurs arguments : le fait que le secteur recrute, avec ou sans diplôme, que ces emplois s’exercent dans une proximité géographique, avec une dimension altruiste importante, mais aussi la possibilité de passer d'un domaine à l'autre. C’est, en effet, le cas depuis un an. Les diplômes d’Etat d’auxiliaire de vie sociale (AVS) et d’aide médico-psychologique (AMP) ont été regroupés en un seul : le diplôme d’Etat d’accompagnement éducatif et social (Deaes). Les aides à domicile peuvent donc aujourd’hui emprunter des passerelles de formation pour changer de métier et accompagner différents publics – enfants, personnes en situation de handicap ou âgées.

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… mais qui reste difficile...

Cette campagne du gouvernement est d’autant plus nécessaire que le secteur, déjà en tension, pourrait recruter 30 000 nouveaux professionnels d’ici 2030. Un quart des aides à domicile aujourd’hui est âgé de plus de 55 ans. Le taux de départ en retraite représente également 5 % des effectifs. Si elle embauche des CDI à 80 %, la filière correspond à des emplois faiblement rémunérés, démarrant au Smic durant les cinq à dix premières années. Les horaires de travail peuvent aussi être à rallonge, partiels et fragmentés pendant la journée. Sans oublier la pénibilité du travail qui occasionne un taux d’accident plus élevé que dans le bâtiment, pourtant une référence en la matière.

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… et peu attractif

La professionnalisation récente liée au nouveau diplôme, encore récent, peut-elle changer la donne ? Pas sûr, nous indique un responsable de la formation à Adessadomicile, Christophe Trousseau : « En Ile-de-France, le nombre d’étudiants qui s’inscrivent dans la filière « domicile » est très faible, de l’ordre de 5 %, et il semble que ce soit ainsi partout sur le territoire d’après ce qu’en disent les inspecteurs ». Sur le sujet, Dominique Ribet, auxiliaire de vie à Valence et représentante CGT de l’aide à domicile, enfonce le clou. « Il n’est pas étonnant que les jeunes n’aient pas envie d’aller dans ces métiers ! Je pars en retraite en mars prochain après 38 ans de service d’aide à domicile. Je vais toucher une retraite de 970 € par mois », explique-t-elle, furieuse. « Heureusement que j’étais à temps plein. Je vais être obligée de continuer à travailler en parallèle de ma retraite alors que j’ai travaillé toute ma vie… Les salaires de la branche sont ridicules. Le nombre d’inaptitudes, de 16 % en 2014, augmente chaque année. C’est dramatique ! »

Une rémunération en-deçà du Smic

En effet, nous explique le porte-parole de l’ADMR Florent Lebaigue : « Les premiers niveaux des grilles de rémunération de l’aide à domicile sont immergées sous le seuil du Smic. C’est donc le Smic qui s’applique pour les sept premières années des salariés en grille A [premier niveau de salaire, NDLR] et les six premières années des salariés en grille B [second niveau de salaire, NDLR], soit un tiers de la branche. Le problème réside dans le fait que le Smic augmente plus rapidement que le point d’indice de la branche, qui a seulement progressé de 1 % depuis 2009. La loi Vieillissement va dans le bon sens, mais s’avère nettement insuffisante au niveau des financements. Alors c’est vrai, l’aide à domicile mériterait d’être valorisée en termes d’image, mais aussi en termes de rémunération ! »

Une revalorisation annoncée le 3 février ?

Au vu de ces éléments, il semble impossible de valoriser l’aide à domicile sans la revaloriser. La prochaine conférence salariale du 3 février 2017 pourrait apporter du nouveau. D'après nos informations, une revalorisation du point d'indice serait dans les tuyaux.

Marie Pragout
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