Alors qu'Emmanuel Macron tient aujourd'hui à Genève un discours devant l'Organisation internationale du travail qui fête ses 100 ans, les ministres du Travail du G7 ont adopté vendredi soir à Paris un appel pour réduire les inégalités dans le monde, généraliser la couverture sociale des travailleurs et préparer les individus aux transformations, notamment numériques, du monde du travail. Un petit pas vers une mondialisation plus sociale ?
Hier a débuté à Genève, en Suisse, la 108e conférence internationale du travail qui rassemble, jusqu'au 21 juin, 187 pays. Cette convention revêt une symbolique forte cette année : l'Organisation internationale du travail, l'OIT, fête en effet son centième anniversaire en 2019. Emmanuel Macron devrait y prononcer aujourd'hui un discours. Il devrait insister sur la nécessité de donner un nouvel élan au multilatéralisme et au système tri-partite qui caractérisent l'OIT. L'organisation rassemble en effet les Etats mais aussi les organisations syndicales et d'employeurs, charge à ces trois acteurs de trouver des accords pour définir des normes internationales en matière de travail, normes auxquelles les pays décident ensuite d'adhérer, et auxquelles les syndicats s'appuient pour défendre les droits des salariés, comme en témoigne en France la controverse sur le barème dit Macron pour les dommages et intérêts versés en cas de nullité du licenciement (lire notre article dans cette même édition).
Représentants du personnel
Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux. Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.
Née au lendemain de la première guerre mondiale, l'OIT repose sur l'idée que le progrès social et la réduction des inégalités pour de meilleures conditions de travail dans le monde sont le meilleur rempart à la violence internationale et au retour de la guerre. Mais aujourd'hui, ce système semble grippé, la scène internationale étant marquée par l'hostilité de puissants pays au multilatéralisme, qu'il s'agisse de la Chine ou des Etats-Unis de Donald Trump. Et en Europe même, on ne peut guère dire qu'il existe une dynamique forte d'accroissement des règles sociales communes minimales (lire notre article).
Il n'empêche. Alors qu'en France, Emmanuel Macron ne paraît pas accorder le même rôle aux partenaires sociaux ni apparaître toujours comme le promoteur d'une politique efficace de réduction des inégalités, il devait aujourd'hui tenter d'apparaître sur la scène internationale comme le défenseur du développement du socle de droits fondamentaux dont doivent bénéficier tous les travailleurs du monde entier. Il est vrai qu'il s'agit d'un rôle traditionnel pour la France, l'un des pays qui ratifie le plus, avec l'Espagne, les conventions de l'organisation internationale du travail.
"L'OIT doit rester vivace pour répondre aux grands défis de demain pour garantir un développement équilibré, que ce soit via la réduction des inégalités ou l'accès universel à la protection sociale", dit l'entourage du chef de l'Etat. L'Elysée soutient ainsi, avec le Royaume Uni, le projet de convention internationale sur le harcèlement au travail, que l'OIT espère enfin faire adopter cette année : il faudra pour cela que deux-tiers des pays l'approuvent.
La France entend aussi utiliser la présidence, qu'elle exerce en 2019, du G7, le groupe qui rassemble des pays représentant 40% PIB mondial (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Canada). Pour préparer la réunion du G7 à Biarritz du 24 au 26 août, la France a ainsi organisé un "G7 social", les jeudi 6 et vendredi 7 juin à Paris, c'est-à-dire une réunion des 7 ministres du travail du groupe du G7, auxquelles s'ajoute la commissaire chargé de l'emploi de l'Union européenne.
Ce sommet a produit un appel commun du G7 doublé d'une déclaration associant les organisations syndicales et d'employeurs (*). Le texte rappelle que la réduction des inégalités est au coeur du mandat confié à l'OIT depuis 1919, le G7 appelant à un dialogue multilatéral et coordonné pour :
- réduire ces inégalités (l'appel encourage les organisations internationales, l'OIT, l'OCDE, le FMI et la Banque mondiale étant citées, à poursuivre leurs efforts pour travailler ensemble à la promotion d'un ordre économique et social soutenable);
- soutenir l'accès à une protection sociale "adaptée aux mutations du travail";
- préparer les individus aux transformations numériques, via notamment des conditions de travail décentes pour les travailleurs des plateformes numériques;
- assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Cette collaboration internationale doit promouvoir, dit le texte, les principes et droits fondamentaux au travail "et la non dégradation des systèmes de protection sociale". Le texte, dépourvu de toute force contraignante, ne mentionne toutefois pas explicitement l'idée d'un rendez-vous annuel entre organisations internationales afin, comme le souhaitait la France, que les normes internationales de l'OIT soient intégrées aux discussions relatives au commerce mondial et aux échanges internationaux. Sans doute est-ce le fruit d'un compromis et d'une certaine résistance de la part des Etats-Unis, comme nous l'explique Christophe Lefevre, qui a participé à ce sommet pour la CFE-CGC : "Les discussions ont achoppé sur la notion de justice sociale, une notion trop "syndicaliste" pour les USA, d'où un texte finalement plus large. Mais cette déclaration est néanmoins importante". Un avis partagé par Cyril Cosmes, le directeur du bureau français de l'OIT : "Ces déclarations ont une portée politique, c'est un bon signe à la veille de l'ouverture de la convention qui commémore les 100 ans de l'Organisation internationale du travail (OIT), cela atteste de la vitalité du système tripartite".
Tel est en tout cas le message que veut véhiculer l'Exécutif. Vendredi soir, en présentant l'appel du G7 social, Muriel Pénicaud, la ministre du Travail française, a souligné que ce texte doublé d'une déclaration associant les organisations internationales syndicales et d'employeurs (*), était une première : "La mondialisation a contribué à réduire la pauvreté dans le monde, mais dans le même temps les inégalités se sont accrues, pour les revenus, l'accès à l'éducation et à un meilleur avenir professionnel (..) Cet appel souligne la nécessité d'une coopération entre Etats et partenaires sociaux pour définir des normes sociales internationales".
(*) Cette déclaration tripartite est signée par l'IOE (l'organisation internationale des employeurs), l'ITUC CSI IGB (la confédération syndicale internationale), la TUAC (la coordination syndicale pour le dialogue avec l'OCDE et le G7) et le BIAC (coordination des employeurs pour le dialogue avec l'OCDE et le G7).
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