Quatrième plan autisme : la concertation lancée en grande pompe au palais de l’Elysée

Quatrième plan autisme : la concertation lancée en grande pompe au palais de l’Elysée

10.07.2017

Action sociale

Six mois de discussions viennent d’être engagés, pour préparer le prochain plan pour l’autisme attendu pour 2018. La concertation ira du local au national, tout en s’appuyant sur les consensus existants. Brigitte et Emmanuel Macron auront apporté un lustre tout particulier à son lancement officiel le 6 juillet.

BFM TV aura d’abord retenu la touchante visite de jeunes autistes à l’Elysée, avec photo de groupe sur le perron, puis goûter avec les époux Macron. Ce 6 juillet pourtant, l’avenir des Français autistes se jouait d’abord au fond du palais, sous les dorures et les lustres de la salle des fêtes. Sophie Cluzel, la secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées, y lançait officiellement six mois de concertation, qui devront aboutir, en décembre, à l’élaboration du quatrième plan autisme attendu.

« Depuis 2005 et le premier plan pour l’autisme, des avancées ont été faites, qu’il ne faut pas ignorer », a d’abord reconnu la secrétaire d’Etat. Mais face à des retards de diagnostic persistants, ou à des défauts d’accompagnement trop fréquents, « nous sommes encore loin du compte » : il faut « agir maintenant avec efficacité ». Ce quatrième plan, déjà préparé par le précédent gouvernement, devra être prêt pour 2018.

Solennité

Et ce lancement de concertation n’a pas manqué de solennité, avec l’intervention de pas moins de trois ministres aux côtés de Sophie Cluzel. Ainsi Agnès Buzyn, aux Solidarités et à la santé, a-t-elle pu souligner le « trop grand retard » demeurant « dans le champ de l’accompagnement » ; Jean-Michel Blanquer, à l’Education nationale, a pour sa part espéré pouvoir « passer d’une logique de structure d’accueil à une logique de parcours » ; quant à Frédérique Vidal, à l’Enseignement supérieur et la recherche, elle a invité à s’éloigner « de toute pensée dogmatique »… Même le petit Nao, un robot utilisé comme médiateur avec des enfants autistes, avait été convié à s’exprimer face aux dizaines d’invités de marque. Pour la première fois sans doute dans l’histoire de l’Elysée, un humanoïde a ainsi pu converser avec une secrétaire d’Etat, pour lui assurer, de sa voix métallique, que les enfants l’adoraient.

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Les "fragilités" du troisième plan

Mais au-delà du décorum, ce lancement en grande pompe a aussi permis de préciser les bases de la concertation à venir. Elle s’appuiera, tout d’abord, sur les consensus existants, comme l’a souligné Sophie Cluzel. Le récent rapport d’évaluation du troisième plan autisme (2013-2017) a ainsi pu être présenté, par ses auteurs des inspections générales des affaires sociales (Igas) et de l’Education nationale (Igen). S’ils ne nient pas les avancées obtenues, ces inspecteurs mettent en lumière plusieurs « fragilités » dans sa construction et sa gouvernance, ainsi que des « résultats très hétérogènes » - avec par exemple des obstacles persistants dans l’accès aux soins des personnes autistes. Le troisième plan, en outre, n’a pas permis de forger « un cadre solide d’action pour les adultes et les familles », rappelle l’inspectrice Claire Compagnon.

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"Made in Autistan"

Le philosophe Josef Schovanec a pu évoquer, quant à lui, son rapport sur le devenir professionnel des personnes autistes - et vanter le « savoir-faire » de ses pairs, qui mériterait bien un label « made in Autistan » ! Enfin a été esquissé l’état actuel des connaissances, par quelques membres de la « commission scientifique internationale » qu’avait installée en mars l’ancienne secrétaire d’Etat Ségolène Neuville. Les professionnels français en retiendront, notamment, qu’« aucun de ses membres ne soutient l’approche psychanalytique » de l’autisme, comme le rapporte Claire Compagnon.

Concertations territoriales

Et maintenant ? La concertation qui débute en ce mois de juillet va d’abord se déployer à l’échelle des territoires, avec un copilotage de départements, des ARS, et de services déconcentrés de l’Etat – et la participation, notamment, des associations. De ces « concertations territoriales » devront remonter, d’ici à novembre, de bonnes pratiques locales faisant consensus, ainsi que des propositions pour les généraliser en France. Parallèlement doivent se mettre en place cinq groupes de travail nationaux – sur la scolarisation et la formation ;  sur l’insertion sociale ; sur la recherche et l’innovation ; sur les familles et les parcours ; et sur l’accompagnement au changement. Cette double concertation, finalement, devra aboutir à « un nombre limité de mesures, clairement priorisées et assorties d’un calendrier de mise en œuvre », selon le secrétariat d’Etat.

Un "engagement plein et entier"

Cette démarche ascendante « me semble être la plus-value de ce plan », a commenté Emmanuel Macron, venu clore l’après-midi, en compagnie de son épouse et de leurs jeunes invités. Et il espère bien que ses futures mesures permettront de « bien articuler le médico-social et le non médico-social », ou encore d’aider les adultes autant que les enfants. « C’est notre dignité collective qui se joue aussi dans ce combat », a conclu le chef de l’Etat, avant de promettre : « Vous pouvez compter sur mon engagement plein et entier. »

Photos et selfies

Les acteurs de l’autisme en ont-ils été convaincus ? Alors que des petits-fours achevaient de donner son lustre à ce lancement officiel, dans la salle des f��tes de l’Elysée, les réactions divergeaient. Geneviève Gueydan, la directrice de la CNSA, appréciait une « très belle dynamique » et saluait « l’ancrage dans les territoires ». Luc Gateau, le président de l’Unapei, se réjouissait de « l’implication d’un maximum d’acteurs », en attendant d’en savoir plus « sur la question des moyens ». Jean-Louis Garcia, le président de la fédération des Apajh, remarquait un lancement « symboliquement fort » mais se voulait « ambitieux et vigilant » pour la suite. Quant à Danièle Langloys, la présidente d’Autisme France, elle s’étonnait de cette nouvelle concertation, alors que « tout le monde sait déjà quoi faire » - par exemple former des travailleurs sociaux qui, selon elle, « ne connaissent rien à l’autisme et sont noyautés par la psychanalyse ». A défaut de blanc-seing pour ce futur quatrième plan, Brigitte Macron, au moins, paraissait susciter l’enthousiasme, à croire le nombre de photos et de selfies qu’elle aura accordées.

Olivier Bonnin
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