Représentativité : dans les entreprises privées, la CFDT supplante la CGT

Représentativité : dans les entreprises privées, la CFDT supplante la CGT

03.04.2017

Représentants du personnel

La nouvelle mesure de la représentativité syndicale dévoilée vendredi 31 mars par le Haut conseil au dialogue social voit la CFDT devancer la CGT dans les entreprises privées, la CGT restant en tête dans les TPE et la fonction publique. Le paysage syndical n'est pas pour autant bouleversé.

En 2013, la première mesure de l'audience électorale, qui fait désormais dépendre la représentativité syndicale des résultats obtenus lors des élections professionnelles, avait vu la CGT (26,77%) devancer de peu la CFDT (26%), devant FO (15,94%), la CFE-CGC (9,43%) et la CFTC (9,30%), ces scores étant réhaussés par le poids relatif, qui consiste à recalculer le poids de chaque syndicat en ne tenant compte que de ceux qui passent la barre des 8%. C'est ce poids dont il faut tenir compte pour apprécier la capacité des organisations syndicales à signer un accord (voir notre article). 

Pas de bouleversement du paysage syndical

Quatre ans plus tard, comme on le voit ci-dessous dans notre infographie, les rôles s'inversent au sommet, selon les chiffres présentés vendredi 31 mars devant le Haut conseil du dialogue social.

La CFDT (26,7%) devance la CGT (24,85%), suivies par FO (15,59%), la CFE-CGC (10,67%) et la CFTC (9,49%). Luc Bérille, le secrétaire général de l'UNSA, n'a pas tort de noter que le paysage syndical change peu, un constat également dressé par Solidaires qui note que les évolutions se produisent sur le long terme. En effet, les cinq grandes confédérations restent représentatives (la CFTC améliore même son score, de même que la CFE-CGC, en progression, tandis que FO reste stable) et ni l'UNSA ni Solidaires ne passent la barre des 8%. Mais symboliquement, la CFDT sort largement gagnante du fait de l'érosion de la CGT et de sa meilleure implantation dans les entreprises privées. "C'est historique", s'est félicité, lors d'une conférence de presse, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, visiblement conforté par ces résultats. De fait, la confédération de Belleville obtient, avec 30,32% en poids relatif, les moyens de signer seule un accord interprofessionnel national. Le fera-t-elle ? "Nous ferons comme d'habitude : nous jugerons sur pièces. Dans le passé, nous avons déjà su prendre nos responsabilité en nous engageant seuls, notamment pour l'assurance chômage", a répondu Laurent Berger, en ajoutant d'un ton mordant : "Pour autant, nous n'allons pas monter partout des intersyndicales en disant aux autres : voilà ce qu'il faut faire" (lire notre autre article dans cette même édition).

62,5% de taux de participation aux élections DP/CE

D'un cycle électoral à l'autre, les comparaisons ne sont pas si faciles à établir. Car le corps électoral a augmenté : de 5,45 millions de votants, nous sommes passés à 5,6 millions, soit 207 000 votants supplémentaires. Une évolution qui conforte, aux yeux de la direction générale du travail (DGT), la méthode consistant à établir la représentativité des syndicats selon leur audience électorale. "Cela compense la faible participation au scrutin TPE", s'est par ailleurs félicité vendredi Yves Struillou, le DGT, en soulignant les efforts de ses équipes en vue d'obtenir "un résultat fiable, robuste et solide". Et le DGT de préciser : "Le taux de conformité des procès-verbaux électoraux, que nous vérifions deux fois, a progressé de huit points". Ces résultats montrent en outre que le taux de participation aux élections CE/DP se maintient à un niveau important (62,58% contre 62,96% en 2013) mais le taux de participation global (42,76%) le masque quelque peu.

Le fait marquant est l'érosion de la CGT

Néanmoins, on voit bien que les syndicats qui profitent le plus de ces votants supplémentaires sont  :

  • la CFE-CGC qui engrange 81 845 suffrages supplémentaires valablement exprimés;
  • la CFDT avec + 65 500 voix (la confédération réalise 19,39% dans le collège cadres et passe de 10,78% à 12,27% tous collèges confondus);
  • l'UNSA avec + 64 800 voix (le syndicat autonome dit gagner sa représentativité dans 86 branches contre 58 auparavant);
  • la CFTC avec + 26 530 voix (le syndicat estime "conforter son ancrage dans le paysage syndical français");
  • FO avec + 10 130 voix (le syndicat se félicite de demeurer la 3e confédération dans le secteur privé);
  • Solidaires avec + 5 850 voix (le syndicat rappelle être souvent en butte aux directions et n'est implanté que dans 15% des entreprises tenant des élections).

Au contraire, la CGT perd 53 150 suffrages. Dans un communiqué, la confédération de Montreuil admet son retard sur les implantations syndicales dans le privé, d'où, selon elle, le fait que la CGT touche potentiellement moins de 500 000 électeurs que la CFDT. Dans une déclaration vidéo, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, souligne aussi le besoin de sa confédération de renforcer sa présence dans le collège cadres. "C'est d'un déficit de présence auprès de l'ensemble du salariat auxquelles la CGT est confrontée pour prétendre demeurer la première organisation syndicale du secteur privé", constate le syndicat "qui ne peut se satisfaire de ce résultat", même si la CGT reste en tête dans les TPE et dans le secteur public. Deux terrains où la CFDT se voit déjà damer le pion à la CGT d'ici quatre ans...

La méthode de mesure

La mesure de l'audience de la représentativité syndicale résulte de l'agrégation des suffrages recueillis par les syndicats lors :

  • du scrutin organisé pour les très petites entreprises de fin 2016;
  • lors des élections professionnelles organisées dans les entreprises d'au moins 11 salariés entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2016;
  • et lors des élections des chambres d'agriculture de janvier 2013.

La DGT précise que ces résultats reposent au total sur 620 000 PV d'élections, qui représentent 5,3 millions de suffrages exprimés, soit plus de 200 000 supplémentaires par rapport à 2013.

Les syndicats sont reconnus représentatifs s'ils franchissent le seuil de 8% des suffrages au niveau national interprofessionnel et dans les branches. C'est la première fois que ce critère s'applique directement, car la période 2013-2016 était une période transitoire prévue par la loi de 2008.

Au critère d'audience s'ajoutent d'autres critères cumulatifs : respect des valeurs républicaines, indépendance, transparence financière, ancienneté de deux ans, influence, effectifs d'adhérents et cotisations.

C'est seulement à l'issue de ces vérifications que le ministère du Travail arrêtera la liste des syndicats représentatifs au niveau national et interprofessionnel et dans les branches, ce qui sera fait au deuxième semestre, a précisé le DGT.

Ce dernier a indiqué que la mesure d'audience des organisations patronales sera connue le 12 avril prochain, sachant que la DGT a enregistré 603 000 candidatures d'organisations d'employeurs.

 

 

 

 

 

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue
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