Représentativité patronale : l'audience des organisations est établie pour la première fois

Représentativité patronale : l'audience des organisations est établie pour la première fois

27.04.2017

Représentants du personnel

Pour la première fois est mesurée l'audience des organisations patronales, qui n'aura toutefois pas les mêmes conséquences que pour les syndicats. La CPME décroche 34,54% de l'audience auprès des entreprises adhérentes à une organisation, derrière les artisans et libéraux de l'U2P (35,8%) mais devant le Medef (29,4%). Mais le Medef représente 70,72% de l'audience des entreprises compte-tenu du critère des effectifs. Explications et infographie.

Après les organisations syndicales, qui ont connu leur deuxième mesure d'audience le 31 mars 2017, c'est au tour des organisations patronales d'expérimenter la mesure de leur représentativité, qui clôt ainsi le système qui prévalait jusqu'alors de reconnaissance mutuelle entre organisations d'employeurs. Hier, le Haut conseil au dialogue social, présidé par Jean-Denis Combrexelle, a rendu publics les éléments de ces critères multiples et complexes (voir ci-dessous notre infographie ainsi que notre pièce jointe sur les résultats dans les branches). Il en ressort que, sur 420 000 entreprises employant 12 millions de salariés :

  • le Medef compte 123 387 entreprises adhérentes, soit une audience de 29,41% dans les entreprises et une audience de 70,72% du point de vue du critère du nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes;
  • la CPME (ex-CGPME) compte 144 939 entreprises adhérentes, soit une audience de 34,54% dans les entreprises et une audience de 25% du point de vue du critère du nombre de salariés employ��s par les entreprises adhérentes;
  • l'U2P (fusion de l'UPA et de l'UNAPL, soit l'union des artisans et des professions libérales) compte 150 000 entreprises adhérentes, soit une audience de 35,89% côté nombre d'entreprises et une audience de 4,22% du point de vue du critère du nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes;
  • la CNDI (coordination des indépendants) compte 647 entreprises adhérentes, soit 0,15% des entreprises et 0,06% pour le critère d'audience côté salariés.

C'est peu dire que le cadre juridique de la mesure d'audience en vue de la représentativité patronale est complexe, il a d'ailleurs évolué selon le compromis trouvé entre la CGPME et le Medef, compromis acté dans la loi Travail, le Medef obtenant un critère permettant de rehausser le poids des entreprises qui emploient un grand nombre de salariés. Pour résumer, disons que la mesure de l'audience des organisations patronales consiste pour l'Etat à mesurer l'adhésion des entreprises aux organisations patronales, en demandant aux commissaires aux comptes de certifier ces adhésions.

Est donc représentative l'organisation patronale qui :

  • réunit au moins 8% des entreprises qui adhérent à des organisations professionnelles d'employeurs (l'audience a été mesurée en fonction des chiffres 2015);

ou bien :

  • l'organisation dont les entreprises adhérentes emploient au moins 8% des salariés employés par l'ensemble des entreprises adhérant à des organisations patronales (audience mesurée sur la base des données sociales de 2014).

Sinon, comme pour les syndicats, les organisations d'employeurs doivent respecter d'autres critères : respect des valeurs républicaines, indépendance, transparence financière, ancienneté de 2 ans et influence, implantation territoriale équilibrée. A partir de tous ces critères, le ministère du Travail prendra des arrêtés de représentativité des organisations d'employeurs au niveau national interprofessionnel (le Medef, la CPME et l'U2P seront donc représentatifs) et au niveau des branches d'ici la fin du deuxième trimestre pour les 500 premières branches.

Des conséquences pratiques pour l'instant limitées

Cette mesure de l'audience patronale n'a toutefois pas les mêmes effets que pour la représentativité syndicale, même si la direction générale du travail veut visiblement faire passer ce message, qui vise à réduire le nombre d'interlocuteurs dans la perspective d'une réduction du nombre des branches. En effet, côté syndicats, la représentativité détermine qui peut s'asseoir à la table des négociations et donc signer un accord (un syndicat pesant moins de 8% des suffrages n'a plus droit de négocier dans une branche ou au niveau national).

Si l'on s'en tient aux textes, ce ne sera toujours pas le cas pour les organisations patronales, l'article L.2231-1 du code du travail qui pose les conditions générales de conclusion d'un accord collectif ne s'appliquant pas aux organisations d'employeurs. Toutes les organisations patronales pourront toujours négocier et conclure un accord tant au niveau national interprofessionnel que dans les branches. En revanche, et c'est une nouveauté, l'audience déterminera lesquelles de ces organisations pourront s'opposer à l'extension d'un accord collectif. "Quand vous envisagez de signer un accord de branche, vous devrez avoir des organisations professionnelles représentatives pour que l'accord soit étendu. Il faut savoir qu'environ 80% des accords font l'objet d'une extension", précise Yves Struillou, le directeur général du travail.

Une ou plusieurs organisations patronales dont les entreprises adhérentes emploient plus de 50% de l'ensemble des salariés des entreprises adhérant aux organisations patronales reconnues représentatives dans le champ concerné par l'accord pourront s'opposer à l'extension d'un accord collectif. Dans ce cas, l'opposition n'invalidera pas l'accord, mais il limitera sa portée : le texte ne s'appliquera qu'aux entreprises adhérentes des organisations patronales signataires de l'accord. Attention toutefois : un accord de branche conditionne parfois son entrée en vigueur à leur extension. Dans ce cas, une opposition patronale pourrait le rendre inapplicable. Au niveau national interprofessionnel, avec une audience de 70%, le Medef pourra donc s'opposer à l'extension d'un accord auquel il est hostile. "Mais à ce niveau, les accords nationaux interprofessionnels sont souvent davantage des pré-législations que des accords collectifs ayant vocation à être étendus", relativise Jean-Denis Combrexelle. Il faudrait examiner en revanche l'audience des organisations patronales dans les branches pour mesurer l'effet de cette nouvelle disposition.

 

Par ailleurs, l'audience peut aussi faire varier :

  • l'attribution (proportionnelle à leur audience à partir de la fin de la période transitoire, c'est à dire en 2018) du fonds paritaire de financement du dialogue social aux organisations d'employeurs (l'audience prise en compte sera relative au poids des employeurs, c'est à dire 53,48% pour le Medef, 28,99% pour la CPME, 17,53% pour l'U2P);
  • le nombre des conseillers prud'hommes que les organisations patronales pourront désigner (contrairement aux organisations syndicales pour lesquelles l'audience départementale sera prise en compte, ce sera l'audience nationale des organisations patronales qui servira de base de calcul);
  • la désignation des représentants patronaux dans les nouvelles commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) constituée de 10 représentants syndicaux et 10 représentants patronaux.

En outre, la mesure d'audience des organisations patronales entraînera un nombre de voix plus ou moins importants de ces organisations au sein de l'association de gestion du fonds paritaire national pour le dialogue socail (AGFPN), l'association qui gère désormais le financement public des partenaires sociaux.

 

 

 

 

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue
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