Scrutin TPE : participation mineure pour un enjeu majeur ?

Scrutin TPE : participation mineure pour un enjeu majeur ?

24.02.2021

Représentants du personnel

L'élection syndicale dans les très petites entreprises (TPE) connaît une très faible participation, et ce de manière récurrente. Elle est pourtant cruciale pour les syndicats qui y jouent une partie de leur représentativité tous les quatre ans. Explications.

7,35 %. C'était le taux de participation aux dernières élections syndicales de 2017 pour les salariés des TPE et les employés à domicile, comme le relate le communiqué de presse du ministère du Travail. Le même taux était de 10,38 % lors du scrutin précédent, en 2012. La prochaine élection, du 22 mars au 4 avril prochain, verra-t-elle s'inverser la tendance ? Si la réponse à cette question est encore inconnue, gouvernement et syndicats tentent d'informer et de mobiliser les salariés et employés à domicile. FO a créé une application smartphone (lire notre brève), la CGT a mis en ligne une courte vidéo, la CFDT rappelle qui peut voter, et la CFTC met l'accent sur ses revendications, également en vidéo. A voir également les campagnes sur les sites de l'UNSA, de la CFE-CGC et de Solidaires.

Un enjeu de taille pour les syndicats : la représentativité

En plus des 7 critères légaux de représentativité (respect des valeurs républicaines, indépendance, transparence financière, ancienneté de 2 ans, audience établie selon les niveaux de négociation, influence et effectifs des adhérents et cotisations), les syndicats rejouent leur représentativité tous les 4 ans, à chaque mesure de leur audience dans les élections professionnelles. Dans les entreprises de plus de 11 salariés, où existe un ou plusieurs CSE, les syndicats doivent recueillir au moins 10 % des votes au premier tour de l'élection du CSE. Les très petites entreprises de moins de 11 salariés ne disposant pas d'un CSE obligatoire, les résultats des élections sont additionnés afin de déterminer la représentativité des syndicats dans les branches et au niveau national et interprofessionnel.

Les modalités de cette addition ne sont cependant pas précisées par les textes, nous a indiqué la Direction générale du travail (DGT). Aussi, les votes exprimés par les électeurs des TPE ne sont pas rattachés à l'entreprise qui les emploie mais à la région et à la branche dont ils dépendent. Pour être reconnues comme représentatives dans les branches, les organisations syndicales doivent (outre les critères légaux), représenter au moins 8 % des suffrages, une fois les votes des électeurs des TPE ajoutés aux votes obtenus dans les entreprises d'au moins 11 salariés. Il en va de même au niveau national interprofessionnel. Enfin, au niveau régional des CPRI, dix sièges sont attribués à la représentation des salariés. Pour y prendre place, les syndicats doivent candidater à l'élection TPE, ce qui permet à l'administration de vérifier le respect des critères légaux de représentativité.

Accords collectifs, membres de CPRI, conseillers prud'hommes

La représentativité ainsi acquise par les syndicats leur donne la légitimité indispensable à la négociation des conventions et accords collectifs, qu'ils soient interprofessionnels, de branche ou d'entreprise. Elle leur permet également de désigner des conseillers prud'hommes, de participer à la gestion de la protection sociale dans les organismes paritaires d'assurance maladie, d'assurance chômage ou encore de retraite. La représentativité détermine également la possibilité de désigner des représentants aux commissions paritaires régionales interprofessionnelles.

Ces commissions sont assez méconnues du grand public, mais elles exercent un rôle important pour les salariés de TPE. Selon le code du travail (article L.23-111-1), ces CPRI représentent les salariés et les employeurs des entreprises de moins de onze salariés relevant des branches qui n'ont pas mis en place de commissions paritaires régionales, ou, le cas échéant, départementales lorsque leur champ de compétence géographique recouvre l'intégralité d'une région, par un accord de branche ou de niveau national et interprofessionnel ou multiprofessionnel.

L'article L.23-113-1 indique que les CPRI ont pour compétence :

  • de donner aux salariés et aux employeurs toutes informations ou tous conseils utiles sur les dispositions légales ou conventionnelles qui leur sont applicables ;
  • d'apporter des informations, débattre et rendre tout avis utile sur les questions spécifiques aux entreprises de moins de 11 salariés et à leurs salariés, notamment en matière d'emploi, de formation, de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, de conditions de travail, de santé au travail, d'égalité professionnelle, de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes, de travail à temps partiel et de mixité des emplois ;
  • de faciliter la résolution de conflits individuels ou collectifs n'ayant pas donné lieu à saisine d'une juridiction (la CPRI intervenant avec l'accord des parties concernées) ;
  • de faire des propositions en matière d'activités sociales et culturelles.

On le voit, ces élections sont également majeures pour la négociation des conditions de travail des salariés. Pourtant, ils ne sont qu'une poignée à voter. En 2017, sur les 4 502 621 inscrits, ils ne furent qu'un peu plus de 330 000 à s'exprimer. Afin de savoir à qui les syndicats s'adressent, une lecture du dossier de presse du ministère du Travail (en pièce jointe) permet de se faire une idée de leur profil.

Le profil des salariés concernés : en CDI dans les services

Ils sont 5 millions à avoir reçu un courrier du ministère du Travail les informant de l'élection. 76 % d'entre eux travaillent dans les services (dont un quart sont employés à domicile), 11,6 % dans la construction et 4,6 % dans l'industrie. Une grosse majorité détient un CDI (78 %), 14 % un CDD, et 5 % un contrat d'apprentissage. Ce sont majoritairement des hommes (55 %). Le public est plutôt jeune : 48 % ont entre 25 et 44 ans.

Parmi les employés à domicile, 42 % ont un seul contrat de travail, 19 % en ont deux, 14 % en ont trois. En revanche, ce sont presque exclusivement des femmes (91 %) et elles sont plus âgées que les salariés des TPE : 67 % ont entre 45 et plus de 54 ans.

Au niveau géographique, près d'un quart des électeurs se trouve en Île-de-France (23 %), région suivie par l'Auvergne-Rhône-Alpes (12 %), puis à égalité (7 %) le Grand Est et les Hauts-de-France.

Quant aux causes des records d'abstention, on peut y voir bien sûr l'affaiblissement des corps intermédiaires qui mine les syndicats depuis plusieurs années. De plus, la crise du Covid risque de voir bon nombre d'électeurs mobilisés sur des sujets plus urgents dans leur court-terme, comme la réduction du risque de contamination lors de l'exercice des missions d'aide à domicile, ou tout simplement la préservation des emplois dans un contexte économique morose. Un espoir cependant : le dernier baromètre de confiance du Cevipof montre une hausse de 5 points de la cote de confiance des syndicats (lire notre brève). A voir si cela se traduira dans les urnes…

En attendant, voici un rappel des résultats de 2017 en pourcentage des voix obtenues (lire notre article complet):

CGT 25,12 %
CFDT 15,49 %
FO 13,01 %
UNSA 12,49 %
CFTC 7,44 %
Solidaires 3,50 %
CAT 1,20 %
CFE-CGC 3,38 %
CNT 2,31 %
CNT-SO 1,81 %
SAP 2,10 %
STC 1,07 %

 

 

 

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Marie-Aude Grimont
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