Vidéo / La CFE-CGC veut s'imposer comme le 3e syndicat français

Vidéo / La CFE-CGC veut s'imposer comme le 3e syndicat français

02.06.2016

Représentants du personnel

A Lyon, la CFE-CGC a affirmé son ambition de devenir la troisième force syndicale française. Son nouveau président, François Hommeril, refuse de se ranger dans le bloc réformiste et réclame au gouvernement de renvoyer les points bloquants du projet travail vers les partenaires sociaux. Son interview en vidéo et notre analyse.

 

 

 

Ici, pas de motion âprement discutée ni de "camarade !" envoyé à la cantonade : le 36e congrès de la CFE-CGC, tenu les 1er et 2 juin à Lyon, s’est déroulé dans une ambiance de séminaire de communication, animé par un sosie de Gad Elmaleh, deux jours marqués par l’absence totale de débat, mis à part des échanges convenus à la toute fin du congrès sur le thème de l'engagement. "Mais c'est parce que tout se passe avant", explique-t-on au niveau confédéral. Après le discours ému de la présidente sortante Carole Couvert, François Hommeril a été élu mercredi soir président de la CFE-CGC aux côtés d’Alain Giffard, secrétaire général, et Franck Zid, trésorier national (voir notre article précédent et notre encadré ci-dessous).

Comme en contraste avec cette ambiance très lisse, le nouveau président a tenu pour sa part un discours assez offensif. François Hommeril a repris l’ambition évoquée par la veille par Carole Couvert de faire de la CFE-CGC la troisième force syndicale française. Un objectif réaliste, soutient François Hommeril, au regard de l’augmentation de la proportion de cadres dans la population française, une évolution qui explique pour partie la dynamique électorale du syndicat des cadres dans les grandes entreprises (la CFE-CGC est le premier syndicat chez Renault, Air France, etc). Le nouveau président s’appuie aussi sur la croissance régulière du nombre d’adhérents (+3% par an, soit 157 000 adhérents en 2016) et la création de sections syndicales, même s’il admet l’absence ou la faiblesse de sa confédération dans certains secteurs comme le bâtiment ou le commerce. L’avantage catégoriel dont bénéficie la CFE-CGC en matière de représentativité joue aussi un rôle dans cette dynamique, alors que la réforme de la représentativité de 2008 a entraîné dans les autres syndicats des disparitions de sections syndicales.

Le projet de loi Travail, "fond de tiroir du néolibéralisme"

Sur le plan politique, le nouveau président de la CFE-CGC a tenu un discours résolument hostile au projet de loi Travail : François Hommeril demande la suspension du débat parlementaire afin que les partenaires sociaux négocient sur les sujets du blocage, à savoir notamment l’articulation entre accords d’entreprise et accords de branche. "Il est contradictoire de vouloir affaiblir le rôle des branches au profit des accords d'entreprise au moment même où l’on prétend renforcer les branches en réduisant leur nombre", observe-t-il. "Ce texte, au départ, ce sont les fonds de tiroir du néolibéralisme, comme si le gouvernement cherchait à remplir les critères du plan de réformes pour rassurer Bruxelles", dénonce le président de la CFE-CGC en reprochant à l’Exécutif de n’avoir véritablement associé à la préparation de ce projet que les seuls Medef et CFDT.

La recherche d'une troisième voie, entre CFDT, CGT et FO

"Quand la CFDT dit qu’il faut laisser sa chance au développement de la négociation d’entreprise, ce point de vue doit être respecté. Mais je partage l’inquiétude de Jean-Claude Mailly (FO) sur le risque de dumping social quand on voit ce que les donneurs d’ordre peuvent imposer à leurs sous-traitants", ajoute-t-il. François Hommeril refuse toutefois d’être enfermé dans une catégorie binaire : "Le gouvernement a décidé de classer les syndicats selon leur appréciation de son projet : on est réformiste si on le soutient. Mais moi, je ne sais pas ce que c’est le bloc réformiste. Aucun de ces deux camps ne me convient". Cette recherche d’une troisième voie, entre une CFDT jugée trop alignée sur le gouvernement et une CGT trop contestataire, semble partagée par de nombreux militants.

"Oui, il y a une place pour cette troisième voie, dans une période où il y a une hystérisation des positions entre deux camps", commente Franck Mikula, le secrétaire chargé de l'emploi, qui passe d'ailleurs la main. "Dans ma région, les sections n'arrêtent pas de me demander : qu’est-ce qu’on fait ? Quand défilons-nous ?  Il y a une peur de l’inversion de la hiérarchie des normes très forte, notamment chez les sous-traitants et dans la réparation navale", nous confie Jean-Marie Bertho, président de la métallurgie Bretagne.

L'enjeu de la définition du statut cadre 

En attendant de voir les résultats de cette stratégie, et alors qu'est programmée la disparition du régime de retraites complémentaires des cadres (Agirc), la CFE-CGC va devoir se positionner sur l'avenir du statut cadre, une question quasiment absente du congrès alors qu'une négociation interprofessionnelle est censée se tenir en 2016 sur le sujet. "Nous devons prendre le temps de réfléchir à cette question de la définition du statut, en englobant l'évolution des métiers", nous répond Gilles Lecuelle, nouvellement chargé du dialogue social, et par ailleurs délégué syndical central chez Solvay, première entreprise à signer un accord regroupant les instances représentatives en application de la loi Rebsamen.

Une question que la branche de la métallurgie devrait également aborder, nous dit Gabriel Artero, président de la fédération métallurgie CFE-CGC : "Nous avons devant nous un chantier de deux ans pour réviser l'ensemble de la branche et passer de 76 à 1 convention collective. Il nous faudra clarifier le statut de l'encadrement". Exercice périlleux, les employeurs voulant une gestion souple des trajectoires individuelles, ce qui remet en cause le statut et notamment les conditions salariales de début de carrière, alors que les organisations syndicales veulent des garanties attachées au statut...

 

Un ingénieur pour régler la trajectoire de la CFE-CGC

Candidat malheureux face à Carole Couvert au congrès de Saint-Malo de 2013, François Hommeril accède à 54 ans à la présidence de la CFE-CGC. Cet ingénieur né dans le Cotentin a travaillé 20 ans chez Pechiney, devenu Alcan puis Roi Tinto, où il a accompli de nombreux mandats (DS, DSC, CE, etc.)., devenant ensuite délégué national international de la CFE-CGC de 2006 à 2010 puis secrétaire national en charge de la formation. 

 

 

 

Le nouveau secrétaire général, Alain Giffard, 61 ans, succède à Marie-Françoise Leflon. Secrétaire confédéral chargé de l’économie et de l’industrie depuis 2013, Alain Giffard était auparavant chargé des retraites et de la protection sociale. Alain Giffard est gestionnaire de patrimoine dans le groupe bancaire CIC, où il a accompli différents mandats (DS, membre du comité de groupe, etc.).

Reconduit comme trésorier, Franck Zid, 60 ans, vient de la fédération du transport aérien, où il dirige le syndicat CFE-CGC d’Air France.

Les 8 secrétaires confédéraux sont Gilles Lecuelle (dialogue social), Jean-François Foucard (formation, emploi), Serge Lavagna (protection sociale), Christophe Lefevre (Europe et international), Pierre Lichon (développement interne), Gérard Mardiné (économie), Simon Policciardi (fonction publique) et Martine Keryer (santé), seule femme élue. Un mauvais signe adressé par la confédération à ses troupes qui devront, elles, se conformer début 2017 à l'obligation légale d'une représentation "équilibrée" des hommes et des femmes dans les listes des candidats à toutes les élections professionnelles. Un enjeu d'ailleurs évoqué dans le programme du nouveau trio à la tête de la CFE-CGC : "Notre confédération se doit d'évoluer concrètement sur la parité".

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue
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